Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/371

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débris du passé, dont nous ignorions complétement l’existence, le nom et la date.

À environ un demi-mille de ce groupe de monuments, la côte de la mer s’élève et le sable se change en rocher ; ce rocher a été taillé partout par la main des hommes sur une étendue d’environ un mille de circuit : on dirait une ville primitive creusée dans le roc avant que les hommes eussent appris l’art d’arracher la pierre à la terre et de s’élever des demeures à sa surface. C’est en effet une des villes souterraines dont parlent les premières histoires, ou tout au moins une de ces vastes nécropoles, ville des morts, qui creusaient en tout sens la terre ou le rocher aux environs des grandes cités des vivants ; mais la forme des rochers et des cavernes sans nombre taillées dans leurs flancs indique plutôt, à mon avis, la demeure des vivants. Ces cavernes sont vastes, les portes en sont élevées ; des escaliers nombreux et larges conduisent à ces portes ; des fenêtres sont percées aussi dans la roche vive pour donner de la lumière à ces habitations, et ces portes et ces fenêtres donnent sur des rues taillées profondément dans les entrailles de la colline. Nous avons suivi plusieurs de ces rues profondes et larges, et où des ornières indiquent la trace de la roue des chars. Une multitude d’aigles, de vautours, et des nuées innombrables d’étourneaux, s’élevaient, à notre approche, de l’ombre de ces rochers creusés ; des arbustes grimpants, des fleurs pariétaires, des touffes de myrte et de figuier, ont pris racine dans la poussière de ces rues de pierres, et tapissent ces longues avenues. Dans quelques endroits, les anciens habitants avaient entièrement fendu la colline avec le ciseau, et percé des canaux qui laissent venir