Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/426

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-nus, de la montagne des Oliviers étaient arrosés par l’eau des piscines et par les flots encore coulants du Cédron. Des jardins de grenadiers, d’orangers et d’oliviers, couvraient d’une ombre plus épaisse l’étroite vallée de Gethsemani, qui se creuse, comme un nid de douleur, dans le fond le plus rétréci et le plus ténébreux de celle de Josaphat. L’homme d’opprobre, l’homme de douleur pouvait s’y cacher comme un criminel, entre les racines de quelques arbres, entre les roches du torrent, sous les triples ombres de la ville, de la montagne et de la nuit ; il pouvait entendre de là les pas secrets de sa mère et de ses disciples, qui passaient sur le chemin en cherchant leur fils et leur maître ; les bruits confus, les acclamations stupides de la ville, qui s’élevaient au-dessus de sa tête, pour se réjouir d’avoir vaincu la vérité et chassé la justice ; et le gémissement du Cédron, qui roulait ses ondes sous ses pieds, et qui bientôt allait voir sa ville renversée et ses sources brisées par la ruine d’une nation coupable et aveugle. Le Christ pouvait-il mieux choisir le lieu de ses larmes ? pouvait-il arroser de la sueur de sang une terre plus labourée de misères, plus abreuvée de tristesses, plus imbibée de lamentations ?

Je remontai à cheval, et, tournant à chaque instant la tête pour apercevoir quelque chose de plus de la vallée et de la ville, je gravis en un quart d’heure la montagne des Oliviers : chaque pas que faisait mon cheval sur le sentier qui y monte me découvrait un quartier, un édifice de plus de Jérusalem. J’arrivai au sommet couronné d’une mosquée en ruines qui couvre la place où le Christ s’éleva au ciel après sa résurrection ; je déclinai un peu vers la droite de cette mosquée pour arriver auprès de deux colonnes bri-