Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 6.djvu/45

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semblent l’envelopper : on dirait Venise ou Malte dormant au milieu des flots. Ce n’est ni une île ni une ville, c’est la réverbération de la lune au point où son disque tombe d’aplomb sur la mer ; plus près de nous, cette réverbération s’étend et se prolonge, et roule un fleuve d’or et d’argent entre deux rivages d’azur. À notre gauche, le golfe étend jusqu’à un cap élevé la chaîne longue et sombre de ses collines inégales et dentelées ; à droite, c’est une vallée étroite et fermée, où coule une belle fontaine à l’ombre de quelques arbres ; derrière, c’est une colline plus haute, couverte jusqu’au sommet d’oliviers que la nuit fait paraître noirs ; depuis la cime de cette colline jusqu’à la mer, des tours grises, des maisonnettes blanches percent çà et là l’obscurité monotone des oliviers, et attirent l’œil et la pensée sur la demeure de l’homme. Plus loin encore, et à l’extrémité du golfe, trois énormes rochers s’élèvent sans bases sur les flots ; de formes bizarres, arrondis comme des cailloux, polis par la vague et les tempêtes, ces cailloux sont des montagnes ; jeux gigantesques d’un océan primitif, dont les mers ne sont sans doute qu’une faible image.