Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/103

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après avoir gravi pendant des journées entières sur les parois à pic des montagnes, qui ne sont qu’un bloc de rocher, il trouve tout à coup, dans les enfoncements d’une gorge élevée ou sur le plateau d’une pyramide de montagnes, un beau village bâti de pierres blanches, peuplé d’une nombreuse et riche population, avec un château moresque au milieu, un monastère dans le lointain, un torrent qui roule son écume au pied du village, et tout autour un horizon de végétation et de verdure où les pins, les châtaigniers, les mûriers, ombragent la vigne ou les champs de maïs et de blé. Ces villages sont suspendus quelquefois les uns sur les autres, presque perpendiculairement ; on peut jeter une pierre d’un village dans l’autre ; on peut s’entendre avec la voix, et la déclivité de la montagne exige cependant tant de sinuosités et de détours pour y tracer le sentier de communication, qu’il faut une heure ou deux pour passer d’un hameau à l’autre.

Dans chacun de ces villages vous trouvez un scheik, espèce de seigneur féodal qui a l’administration et la justice du pays. Mais cette administration et cette justice, rendues sommairement et dans de simples attributions de police par les scheiks, ne sont ni absolues ni sans appel. La haute administration appartient à l’émir et à son divan. La justice relève en partie de l’émir, en partie des évêques. Il y a conflit de juridiction entre l’émir et l’autorité ecclésiastique. Le patriarche des Maronites conserve seul la décision de tous les cas où la loi civile est en conflit avec la loi religieuse, comme les mariages, dispenses, séparations.

Le prince a les plus grands ménagements à garder en-