Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/246

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la ville. Là, en nous appelant et en nous comptant, nous nous apercevons qu’un de nos amis, M. de Capmas, nous manque. On s’arrête, on appelle, on tire quelques coups de fusil : rien ne répond. Nous détachons deux cavaliers pour aller à la recherche, et nous entrons dans Zarklé. Il nous faut une heure pour remonter un fleuve qui traverse la ville, et pour trouver un pont unique, qui va d’un quartier à l’autre. Nos chevaux épuisés peuvent à peine se tenir sur le pavé glissant de ce pont à pic et sans parapet. Enfin, la maison de l’évêque grec nous reçoit. On allume des feux de broussailles dans les huttes qui entourent la cour. L’évêque nous prête quelques nattes et quelques tapis. Nous nous séchons.

Les deux Arabes envoyés à la recherche de notre ami reviennent avec lui. On l’apporte, presque évanoui, à côté du foyer ; il revient à lui. Nous trouvons au fond de nos caisses, inondées d’eau, une bouteille de rhum ; l’évêque nous procure du sucre ; nous ranimons, avec quelques verres de punch, notre compagnon mourant, pendant que nos Arabes nous préparent le pilau. Le pauvre évêque n’a absolument que l’abri à nous offrir : encore la curiosité des femmes et des enfants de Zarklé est telle, qu’à chaque instant ils encombrent la cour et enfoncent les portes de nos chambres pour voir les deux femmes franques. Je suis obligé de mettre deux Arabes armés à la porte de la cour, pour en interdire l’entrée.

Le lendemain, repos à Zarklé pour sécher nos habits et renouveler nos provisions de route, gâtées par l’inondation de la veille. Zarklé est une ville toute chrétienne,