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de narguilés, de pipes, de vases de fleurs et de sorbets. Ces trois femmes, vêtues du costume oriental, offraient chacune, dans leur caractère de beauté, l’ensemble le plus admirable qu’un œil d’homme puisse contempler ; nous passâmes une soirée délicieuse dans leur conversation, et nous promîmes de les revoir au retour.

Le scheik d’Éden, dernier village habité au sommet du Liban, était oncle, par sa mère, de M. Mazoyer, mon interprète. Averti par son neveu de notre arrivée à Tripoli, le vénérable scheik descendit des montagnes avec son fils aîné et une partie de ses serviteurs ; il vint me rendre visite au couvent des Franciscains, et m’offrit l’hospitalité chez lui, à Éden. D’Éden aux cèdres de Salomon il n’y avait plus que trois heures de marche, et si les neiges qui couvraient encore la montagne nous le permettaient, nous pourrions aller de là visiter ces arbres séculaires qui ont répandu leur gloire sur tout le Liban, et qui sont contemporains du grand roi. Nous acceptâmes, et le départ fut fixé au lendemain.

À cinq heures du matin nous étions à cheval. La caravane, plus nombreuse encore qu’à l’ordinaire, était précédée du scheik d’Éden, admirable vieillard dont l’élégance de manières, la politesse noble et facile, et le magnifique costume, étaient bien loin de rappeler un chef arabe ; on eût dit un patriarche marchant à la tête de sa tribu : il montait une jument du désert, dont le poil bai doré et la crinière flottante auraient fait la digne monture d’un héros de la Jérusalem ; son fils et ses principaux serviteurs caracolaient sur des étalons magnifiques, à quelques pas devant lui ;