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Mai 1833.


Nous passons trois jours à parcourir les environs de Rhodes, sites ravissants, sur les flancs de la montagne qui regarde l’Archipel. Après deux heures de marche le long de la grève, j’entre dans une vallée ombragée de beaux arbres et arrosée d’un petit ruisseau ; en suivant les bords du ruisseau, tracés par les lauriers-roses, j’arrive à un petit plateau qui forme le dernier gradin de la vallée. Il y a là une petite maison habitée par une pauvre famille grecque ; la maison, presque entièrement couverte par les branches des figuiers et des orangers, a, dans son jardin, les ruines d’un petit temple des Nymphes, une grotte et quelques colonnes et chapiteaux épars, à demi cachés par le lierre et les racines des arbustes ; au-dessus, une pelouse de deux ou trois cents pas de large, avec une source ; là, croissent deux ou trois sycomores ; un des sycomores ombrage à lui seul toute la pelouse : c’est l’arbre sacré de l’île ; les Turcs le respectent, et le malheureux paysan grec ayant voulu un jour en couper une branche, le pacha de Rhodes lui fit donner la bastonnade. Il n’est pas vrai que les Turcs dégradent la nature ou les ouvrages de l’art : ils laissent toutes choses comme elles sont ; leur seule manière de ruiner tout est de ne rien améliorer.

Au-dessus de la pelouse et des sycomores, les collines, qui se dressent à pic, portent des bois de sapins, et ruissel-