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que j’ai reçue de Dieu. Aussitôt les difficultés aplanies entre Ibrahim et le Grand Seigneur, n’attendez pas un jour ; ramenez ma flotte et mon armée. »

Voilà un noble langage, une situation bien saisie, une générosité féconde. Constantinople ne s’envolera pas, et la nécessité y ramènera les Russes, que leur probité politique en éloigne un moment.




20 juin.


J’ai connu ici un homme aimable et distingué, un de ces hommes plus forts que leur mauvaise fortune, et qui se servent du flot qui devait les noyer pour aborder au rivage. M. Calosso, officier piémontais compromis, comme beaucoup de ses camarades, dans la velléité de révolution militaire du Piémont en 1820, proscrit comme les autres, sans asile et sans sympathie nulle part, est venu en Turquie. Il s’est présenté au sultan pour former sa cavalerie ; il est devenu son favori et son inspirateur militaire. Probe, habile et réservé, il a modéré lui-même une faveur périlleuse qui pouvait le mettre trop en vue de l’envie. Sa modestie et sa cordialité ont plu aux pachas de la cour et aux ministres du divan. Il s’est fait des amis partout, et a su les conserver par le mérite qui les lui avait acquis. Le sultan l’a élevé en dignité, sans lui demander d’abjurer sa nationalité ni son culte. Il est maintenant pour tous les Turcs Rustem-Bey, et