Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/422

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

temps de leurs études et de leurs progrès, de la politique de l’Europe, de la destinée de l’empire : ils en parlaient à merveille ; ils frémissaient d’indignation de leur état actuel, et faisaient des vœux pour le succès du sultan dans ses entreprises d’innovations.

Je n’ai jamais vu une ardeur plus vive pour la régénération d’un pays, que celle qui enflammait les yeux et les paroles de ces jeunes gens. Les jeunes Italiens à qui on parle d’indépendance et de lumières ne palpitent pas de plus d’élan. Leurs figures rayonnaient pendant que nous leur parlions. Les plus âgés pouvaient avoir de vingt à vingt-deux ans ; les plus jeunes, de douze à treize. Excepté à l’hospice militaire des orphelins de la marine, à Greenwich, je n’ai jamais vu de plus admirables figures que celles de quelques-uns de ces enfants. Ils ne voulaient plus nous laisser partir, et nous accompagnèrent jusqu’où il leur est permis d’aller, dans tous les jardins, cours et kiosques d’alentour. Un ou deux avaient les yeux mouillés en quittant Rustem-Bey. Le kesnedar était allé, pendant ce temps-là, donner ordre aux eunuques et gardiens des jardins et des palais de nous laisser circuler, et de nous introduire partout où nous le désirerions. Au fond de la cour, un peu plus loin que le palais des icoglans, un large palais nous fermait la vue et le passage, c’est celui qu’habitent les sultans eux-mêmes : il est entouré, comme les kiosques et les palais que nous venions de visiter, d’une galerie formée par une prolongation des toits. Sur cette galerie ouvrent les portes et les fenêtres sans nombre des appartements. Le palais n’a qu’un rez-de-chaussée. Nous entrâmes dans les grandes salles qui servent de vestibule et donnent accès aux différentes pièces. Ce vestibule est