Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/87

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cals, qui s’abritent dans les creux formés par ces rochers. Une grande quantité de perdrix, de cailles et de bécasses s’envolèrent au bruit des pas de nos chevaux.

Arrivés à la plaine, nous retrouvâmes la culture de la vigne, de l’orge, du palmier ; nous en traversâmes la moitié à peu près au milieu de cette riche végétation, et nous nous trouvâmes bientôt au pied d’un large mamelon couvert d’une forêt de pins d’Italie, avec de larges clairières où nous apercevions de loin des troupeaux de chameaux et de chèvres. Ce mamelon nous cachait le Nahr-Bayruth, que nous voulions traverser dans sa partie méridionale. Nous nous enfonçâmes sous les voûtes élevées de ces beaux pins parasols ; et, après avoir marché environ un quart d’heure à leur ombre, nous entendîmes tout à coup de grands cris, le bruit des pas d’une multitude d’hommes, de femmes et d’enfants qui accouraient de notre côté, les roulements de tambours, les sons de la musette et du fifre. En un instant nous fûmes cernés par cinq ou six cents Arabes d’un aspect étrange. Les chefs, revêtus de magnifiques costumes, mais sales et en lambeaux, s’avancèrent vers nous, à la tête de leur musique ; ils s’inclinèrent et nous firent des compliments, en apparence très-respectueux, mais que nous ne pûmes comprendre. Leurs gestes et leurs clameurs, accompagnés des gestes et des clameurs de la tribu tout entière, nous aidèrent à interpréter leurs paroles. Ils nous priaient et nous forcèrent, pour ainsi dire, de les suivre dans l’intérieur de la forêt, où leur camp était tendu : c’était une des tribus de Kurdes qui viennent, des provinces voisines de la Perse, passer l’hiver, tantôt dans les plaines de la Mésopotamie, aux environs de Damas, tantôt dans celles de la