Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/182

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Damas chercher des marchandises et de l’argent, qui nous manquaient également. Nous y fîmes connaissance avec un Bédouin d’une tribu du bord de l’Euphrate qui avait gardé la neutralité dans l’affaire de Nasser. Ce Bédouin, nommé Gazens-el-Hamad, était venu à Damas avec quelques autres vendre du beurre. Il s’engagea à charger nos marchandises sur ses chameaux et à nous conduire chez le drayhy ; mais, hélas ! nous ne devions pas y parvenir aussi facilement. À peine arrivés à Coriétain pour reprendre nos marchandises laissées au dépôt, nous reçûmes la nouvelle d’une victoire de Zaher, fils du drayhy, sur Nasser, victoire qui renouvela la guerre avec une double violence. Toutes les tribus se prononcèrent pour l’un ou l’autre parti. Celle de Salken, tribu de notre conducteur, avait été attaquée par le drayhy, qui poursuivait ses avantages avec acharnement ; et personne n’osait plus se hasarder à traverser le désert. M. Lascaris se désespérait ; il ne pouvait plus ni manger ni dormir ; enfin, exaspéré au dernier point de se voir arrêté dans ses projets, il s’en prit à moi. Alors je lui dis :

« Il est temps de nous expliquer. Si vous voulez arriver chez le drayhy pour faire le commerce, l’entreprise est insensée, et je renonce à vous suivre. Si vous avez d’autres projets et des motifs suffisants pour exposer votre vie, dites-les-moi, et vous me trouverez prêt à me sacrifier pour vous. — Eh bien, mon cher fils, me répondit-il, je vais me confier à vous. Sachez que le commerce n’est qu’un prétexte pour cacher une mission qui m’a été imposée à Paris. Voici mes instructions, divisées en dix points :

» 1o Partir de Paris pour Alep ;