Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/290

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Puis, s’animant de plus en plus et accumulant invectives sur invectives, sa rage ne connut plus de bornes, et il finit par nous ordonner de sortir de sa présence, pour attendre son bon plaisir.

Je voyais les yeux du drayhy s’enflammer, ses narines se gonfler ; je craignais à chaque instant une explosion d’impuissante colère, qui n’aurait servi qu’à pousser le roi aux dernières extrémités ; mais, se voyant entièrement sans défense, il se contint, et, se levant avec dignité, se retira lentement, pour réfléchir à ce qu’il devait faire. Tout tremblait devant les fureurs d’Ebn-Sihoud ; nul n’aurait osé s’opposer à ses volontés. Nous restâmes deux jours et deux nuits dans notre appartement, sans entendre parler de rien : personne ne se souciait de nous approcher ; ceux qui avaient paru les plus empressés lors de notre arrivée nous fuyaient, ou se moquaient de notre crédule confiance dans la foi d’un homme si connu pour son caractère perfide et sanguinaire. Nous nous attendions à chaque instant à voir arriver les satellites du tyran pour nous massacrer, et nous cherchions en vain quelques moyens de nous tirer de ses griffes. Le troisième jour, le drayhy, s’écriant qu’il aimait mieux la mort que l’incertitude, envoya chercher un des ministres du Wahabi, nommé Abou-el-Sallem, et lui dit : « Allez de ma part porter ces paroles à votre maître :

« Ce que vous voulez faire, faites-le promptement ; je ne vous le reprocherai pas ; je ne m’en prendrai qu’à moi-même de m’être livré entre vos mains. »

El-Sallem obéit, mais ne revint pas ; et, pour toute ré-