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RENCONTRES ET ENTRETIENS

Un jour une famille nouvelle nous arrivait du Canada et venait renforcer la petite colonie de Canadiens peu nombreux alors dans ce dernier village. Cette famille s’installait dans un logis porte à porte avec le nôtre, et coïncidence assez curieuse, nos deux familles se trouvaient également composées du père et de la mère, de trois grands garçons, de sept grandes filles ; tous avaient égalité d’âge, et de caractère, car durant les trois années que nous vécûmes ensemble, jamais le plus petit nuage de discorde ne vînt troubler la tranquillité qui régnait entre nos deux familles. Néanmoins, il y avait un couple différent des autres : c’était le vieux grand’père Bernier, et moi-même le treizième de notre famille. Le grand’père Bernier avait bien quatre-vingts ans, moi je n’en avais que sept. J’étais à l’âge de l’insouciance et de l’enfantillage, lui était entré dans les sombres calculs du lendemain et de l’éternité. Mais malgré cette différence d’âge, nous étions la meilleure paire d’amis que l’on pût rencontrer. Ce fut véritablement parlant mon premier ami. Ce qui explique le grand intérêt que je portais à tous les vieux Canadiens que j’ai rencontrés sur ma route par la suite. Que d’heures, que de jours passés en