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MON PREMIER AMI

Cela m’était indifférent du moment que la devinette était trouvée.

Grand’père avait connu les jours sombres des colons sur les terres nouvelles, jours remplis de durs labeurs et de privations, il était resté quelque chose de cela en lui, dans le temps je pensais qu’il était rongé par l’avarice, et j’avais une raison de le juger de la sorte comme vous allez voir : Grand’père était en possession d’un succulent pain de sucre d’érable du pays ; dans les grandes occasions, quand je lui faisais plaisir, j’étais gratifié d’une petite croquette, ah ! mais pas grosse du tout, car après trois ans, on se sépara, et, le pain de sucre n’était pas encore tout consommé. Ah ! le satané pain de sucre ; que de péchés de convoitise il m’a occasionnés ! Mais le père Bernier était un peu sorcier je crois, il connaissait ça des petits garçons gourmands, il devinait mes desseins, car à chaque fois que je croyais le moment propice de tendre, d’allonger le bras pour me saisir du pain de sucre, celui-ci changeait de place, il disparaissait comme par enchantement.

Petits souvenirs d’enfance que j’aime à vous évoquer maintenant, pour faire trêve à cette vie agitée, qui par moment m’accable ; aussi pourquoi ne pas me reposer quelquefois en songeant