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RENCONTRES ET ENTRETIENS

mon côté droit. J’en fis part à mes parents, qui s’entre-regardèrent avec des airs inquiets en montrant des signes d’un grand embarras. J’entendis ma mère proposer un délai, suggérer de différer notre départ, mais mon père d’un ton ferme lui répondit, montrant plus de confiance qu’il n’en avait : « Puisque la douleur a lieu, c’est que cela doit arriver ; il n’y a qu’à se soumettre ici ou en route, c’est bien égal ; nous sommes prêts à partir, partons. » Le lendemain, après mille difficultés, mon père, aidé par ma mère, put se hisser dans la voiture, où, après l’avoir enveloppé dans des couvertures, ma mère s’installa pour conduire le cheval, et nous voilà partis. Tout alla bien jusqu’à un endroit appelé les Carrières, situé à environ un mille de la maison. Tout à coup, j’entendis un murmure de mon père ; en même temps je vis s’avancer cinq hommes dont la mine n’offrait rien de rassurant pour nous. En effet, les cinq hommes, après s’être approchés, reconnurent mon père et la persécution commença. Ma mère, qui pouvait prononcer quelques mots d’anglais, leur dit d’une voix tremblante : « Mon mari est bien malade, veuillez donc nous laisser passer en paix. » Sa demande, sa prière, fut accueillie par des éclats de rire