Page:Lambton - Rapport de Lord Durham.djvu/38

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croient qu’après que le premier choc d’un nouvel état politique serait passé, eux et leur postérité partageraient dans les progrès étonnants et dans cette prospérité que chaque jour leur démontre être le partage du peuple des État-Unis. Je ne crois pas que de tels sentiments aient encore affidé leur forte allégeance envers l’Empire britannique ; mais leur allégeance est fondée sur leur attachement profondément enraciné à des institutions anglaises comme étant supérieures aux françaises. Et s’ils trouvent que l’autorité qu’ils ont maintenue contre ceux qui ont voulu la détruire, doit pour l’avenir être exercée de manière à les assujettir de nouveau à ce qu’ils appellent une domination française, je suis parfaitement certain qu’ils s’efforceront d’éviter ce résultat, en cherchant sous aucun terme, une union avec un peuple anglo-saxon.

Tel est l’état lamentable et hasardeux des choses produit par le conflit des races qui a si longtemps divisé la Province du Bas-Canada, et qui a pris le caractère formidable et irréconciliable que je viens de dépeindre. Et représentant la nature de cette lutte, j’ai montré les causes de son origine ; et quoique j’aie mentionné la conduite et la constitution du gouvernement colonial comme modifiant le caractère de la lutte, je n’ai pas attribué à des causes politiques un état de choses, qui, je crois, sous toutes les institutions politiques, aurait résulté de la composition de la société. Une jalousie, entre deux races, si longtemps habituées à se considérer l’une et l’autre comme des ennemies héréditaires, et si différentes dans leurs habitudes, leurs langues et leurs lois, aurait été inévitable sous toute autre forme de gouvernement. Je n’ai aucun doute que des institutions libérales et une politique prudente auraient pu changer le caractère de la lutte, mais elles n’auraient pas pu l’empêcher ; on aurait seulement pu en adoucir le caractère et l’amener plus promptement à une issue plus décisive et plus paisible. Malheureusement, cependant, le système du gouvernement suivi dans le Bas-Canada a été basé sur une politique propre à perpétuer cette même séparation de races et à encourager les mêmes notions de haines nationales que le gouvernement dans le principe aurait dû arrêter et détruire. Depuis l’époque de la conquête jusqu’à ce jour la conduite du gouvernement a aggravé le mal, et l’origine du mal extrême actuel peut être trouvée dans les institutions qui ont formé le caractère actuel de la colonie.

Il y a deux modes par lesquels un gouvernement peut traiter avec un territoire conquis. Le premier moyen offert est celui de respecter les droits et la nationalité des possesseurs actuels ; de reconnaître les lois existantes, et de conserver les institutions établies ;