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bonne action a toujours sa récompense. Sauve-lui la vie ! Tu en seras récompensé ! » — Vous riez ? je vous jure que c’est vrai ! Je sentais comme un poids qui pesait sur mes épaules, et j’entendais une voix qui disait : Sauve-le ! Sauve-le ! J’hésitai encore quelques secondes. À la fin, le bon instinct l’emporta sur le mauvais.

« Sans plus tarder je courus au plus proche ruisseau. J’y remplis mon gobelet d’eau fraîche que je jetai sur le visage du blessé. Puis, en toute hâte, je déchirai mes manches de chemise et je bandai la plaie pour arrêter le sang. Il commença alors à se ranimer. Avec les plus grandes précautions je le chargeai sur mes épaules et je partis avec ce fardeau. À chaque contrecoup que je donnais pour éviter, soit une branche, soit une souche, il se lamentait comme une bête qui souffre. Cela me faisait pitié. Bien souvent, à bout de forces, je dus m’arrêter pour reprendre haleine. Il pesait comme dix ; j’en pouvais plus. Enfin, de peine et de misère, je réussis à le traîner jusqu’au premier coteau, d’où je criai pour avoir du renfort. Trois hommes vinrent et le portèrent chez lui. Il en guérit. Le printemps suivant il se maria avec Élise.