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LÉGENDES GASPÉSIENNES.

impénétrable où l’ombre se faisait de plus en plus épaisse. Les pins séculaires, les érables, les sapins et les saules ployaient sous leur manteau de neige. Des murailles de neige s’élevaient partout. Ivon suffoquait. Il lui semblait que l’air manquait, qu’il allait étouffer dans ces bois sans issue. Il lui fallait l’horizon, l’immensité, la mer qui s’étend à perte de vue. Aussitôt l’hiver fini, il se rendit à Québec où il s’engagea comme homme d’équipage à bord d’un bâtiment faisant le transport de marchandises en Angleterre.

Il commença alors une vie nouvelle, vie d’aventures et de misère, dans laquelle il souffrit cruellement. Mais quand il pensait à la Louise le courage lui revenait. Elle était l’étoile, le phare lumineux que nul orage ne peut obscurcir. Partout son image brillait devant ses yeux comme le mirage qui fait voir de loin au voyageur le pays enchanté vers lequel tous ses rêves se tendent. Les semaines, les mois et les années passaient. Les effrois de la vie en pleine mer, les horreurs de la tempête, la longue monotonie des jours de