Page:Landes - Contes et légendes annamites, 1886.djvu/256

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

réponse. Un matin enfin, au point du jour, Trinh alla au lieu où était couché ce messager, lui arracha sa natte et le chassa en disant : « Pars vite ! bien vite ! »

Le messager courut rapporter la chose à Trai. Celui-ci branla la tête et dit : « Mon frère nous dit de nous hâter et que nous vaincrons. » En effet les Mac furent battus et forcés de se réfugier en Chine. Les soldats des Lè les avaient poursuivis jusqu’aux défilés des frontières, quand devant eux ils trouvèrent Trinh qui leur barrait le chemin. Le commandant de l’avant-garde prévint Trai qui accourut avec le roi Trang tông et demanda à Trinh pourquoi il arrêtait ainsi la marche de l’armée. Celui-ci répondit : « Ne poursuivez pas les rebelles aux abois[1]. Je veux un jour remplir envers Mac mon devoir de sujet ; je ne puis les laisser périr. Je vous prie de rappeler vos troupes et de laisser les Mac fuir en Chine. » Le roi Le et ses troupes écoulèrent Trinh et se retirèrent en arrière.

Dans le royaume d’Annam, depuis la dynastie des Hong bàn jusqu’à maintenant, il n’y a pas eu d’autre trang nguyên digne de ce titre que le trang Trinh. Il savait tout ce qui était arrivé cinq cents ans avant lui, tout ce qui devait arriver cinq cents ans après lui, et il en avait composé un livre[2]. Mais le roi Minh mang, irrité de ses prédictions, défendit d’en parler sous peine de mort, de sorte qu’il n’est pas connu du peuple.



  1. On peut voir dans le Livre des récompenses et des peines (trad. St. Julien, p. 195) le précepte qui dirige ici la conduite de Trinh.
  2. Il doit exister au Tonquin, sous une forme ou une autre, un recueil de prédictions attribuées au trang Trinh et prédisant des révolutions pour notre époque. Sans cela on ne comprendrait pas pourquoi Minh mang en a interdit la circulation. Nous avons déjà vu qu’on lui attribuait une prédiction d’après laquelle la dynastie Nguyèn ne compterait que quatre rois. (Voir ci-dessus le XXVIII qui contient un autre récit relatif aux origines du trang Trinh