Page:Landry, Manuel d’économique, 1908.djvu/161

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permet de faire des choses qu’un seul travailleur ne pourrait pas faire, même en y mettant beaucoup plus de temps, ou encore qu’elle permet de faire de certaines choses avec une quantité totale de travail de beaucoup réduite.

79. Le travail divisé. — Cette première forme de travail associé est ce qu’on appelle parfois l’association simple des travailleurs. Il y a maintenant une association complexe : c’est celle qui comporte une division du travail. Mais cette expression « division du travail » a pris dans la littérature économique des significations multiples, et assez diverses. Il convient de les distinguer avec soin, pour éviter toute confusion[1].

On parle quelquefois d’une division du travail productif entre les entreprises, qui résulte de ce que chacune d’elles se consacre à une certaine sorte de production. On parle même d’une division géographique du travail, qui résulte de ce que les forces productives de chaque région sont utilisées sinon d’une manière exclusive, du moins principalement pour tel ou tel genre de production, de ce que des genres de production déterminés sont localisés dans telle et telle régions. Mais à vrai dire c’est improprement que l’on se sert ici de l’expression « division du travail ». On devrait parler plutôt de la spécialisation des entreprises et de la localisation des industries. Ces deux questions, au reste, de la spécialisation des entreprises et de la localisation des industries sont des questions que nous retrouverons plus tard.

C’est entre les travailleurs que l’on peut dire correctement que le travail se divise. Dans cette division du travail entre les travailleurs, certains auteurs distinguent deux degrés. Il y aurait une division du travail du premier degré, à laquelle correspondrait l’association complexe du premier degré : c’est cette division qui naît de ce que chaque travailleur, parmi les besognes infiniment diverses de la production en général, est capable d’en exécuter une, ou un certain nombre, de ce que dans le cours de sa vie il se consacre à telles et telles besognes. Mais ici à la vérité, plutôt que division du travail, il conviendra de parler de spécialisation des travailleurs[2].

  1. Sur la division du travail, consulter Smith, Richesse des nations, liv. I, chap. 1-3, J-B. Say, Cours complet, 1re partie, chap. 15 17, Mill, Principles of political economy, I, 8, Marx, Le capital, liv. I, chap 13 14, Bücher, Die Entstehung der Volkswirtschaft, 5e éd., Tübingen, 1906 (trad. fr., Études d’histoire et d’économie politique, Paris, Alcan, 1901, vii-viii. Le travail de Bücher est particulièrement remarquable. On peut consulter encore Schmoller, Grundriss, §§ 113-122 (trad. fr., t. II).
  2. Sur la spécialisation des travailleurs, et sur l’augmentation, dans l’économie contemporaine, de la proportion des non-spécialisés, on peut consulter Schmoller, Grundriss, § 118 (trad. fr., t. II). Mais on prendra garde que Schmoller confond quelque peu la spécialisation du travail avec la qualification du travail.