Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/303

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cher que cet homme célèbre ne mourût hors du giron de l’église catholique. Mersenne lui ayant rappelé que l’Église avait le pouvoir de remettre les péchés, Hobbes le pria de lui dire plutôt quand il avait vu Gassendi pour la dernière fois, et dès ce moment la conversation roula sur d’autres choses. Il accepta cependant l’assistance d’un évêque anglican, à condition qu’il s’en tînt aux prières prescrites par l’anglicanisme.

Les opinions de Hobbes sur la philosophie de la nature sont, les unes disséminées dans ses écrits politiques, les autres énoncées dans ses deux traités De Homine et De Corpore. Son introduction à la philosophie caractérise nettement ses théories :

« Les hommes se comportent aujourd’hui à l’égard de la philosophie comme ils faisaient dans les temps primitifs relativement aux fruits de la terre. Tout pousse à l’état sauvage sans être ni cultivé ni contrôlé. Aussi la plupart des hommes se nourrissent-ils des glands traditionnels ; et si, parfois l’un d’eux goûte à une baie étrangère, c’est ordinairement aux dépens de sa santé. De même, ceux qui se contentent de la routine passent pour mieux avisés que ceux qui se laissent séduire par la philosophie. »

Hobbes montre ensuite combien il est difficile d’arracher de l’esprit des hommes une idée enracinée et consacrée par l’autorité d’habiles écrivains ; la difficulté est d’autant plus grande que la vraie philosophie dédaigne systématiquement le fard de l’éloquence et même toute espèce de parure. Elle se fonde sur des principes vulgaires, arides, presque répugnants.

Cette introduction est suivie d’une définition ou, si l’on veut, d’une négation de la philosophie dans le sens traditionnel de ce mot :

Elle est la connaissance des effets ou des phénomènes provenant de causes admises, et par contre des causes possibles, qu’on induit des effets connus, au moyen de raisonnements