Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1877, tome 1.djvu/461

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juger la religion d’une manière plus équitable, sous le rapport de sa valeur morale et civilisatrice ; or c’est a quoi l’on ne devait nullement s’attendre sur le terrain où le Système de le nature avait pris naissance.

Le chapitre IVe, de la 2e partie, relatif au panthéisme, montre surtout à quel point de vue étroit le Système de la nature s’est placé en ce qui concerne l’idée de Dieu. Quand on pense que, pendant longtemps, spinozisme fut synonyme de matérialisme et que, par naturalisme, on entendait souvent les deux tendances réunies ; quand on pense qu’il se rencontre même fréquemment des aspirations tout à fait panthéistes chez des homme qui sont rangés parmi les chefs du matérialisme, il est permis de s’étonner de l’ardeur déployée par d’Holbach pour bannir de la pensée humaine le simple nom de Dieu, dût-on l’identilier avec le mot nature. Et cependant d’Holbach, en cela, ne va pas trop loin, si l’on se place à son point de vue. Car c’est précisément la disposition mystique, essentielle à l’âme humaine, qu’il regarde comme la maladie, à laquelle il attribue les plus grands maux qui affligent l’humanité ! Et de fait, pour peu que soit donnée une idée de Dieu, prouvée et définie n’importe romment, l’aîme humaine s’en emparera, la transformera poétiqurement, la personnifiera et lui vouera un culte, une adoration quelconque, dont l’influente sur la vie ne dipendra plus guère de l’origine logique et métaphysique de l’idée. Si cet entraînement vers la religion, qui se produit sans cesse à travers les barrières de la logique, n’a pas même la valeur de la poésie ; s’il est, au contraire, complètement nuisible, certes il faut alors éliminer même le nom de Dieu ; et c’est ainsi seulement que l’on pourra édifier sur un fondement solide une conception de l’univers conforme à la nature. Mais alors il nous faudra aussi accuser d’Holbach d’une petite faiblesse oratoire qui pourrait avoir des conséquences dangereuses, car il parle du vrai culte de la nature et de ses autels.