Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/152

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homme, d’un savoir sérieux. — Ce n’est qu’en troisième ou quatrième ligne qu’arriverait, dans un système régulier d’éducation philosophique, l’étude approfondie de l’histoire de la philosophie. Si l’on fait de celle-ci, comme c’est assez l’usage aujourd’hui, la première et l’unique condition, si l’on y joint l’adoption d’un système quelconque de philosophie déterminé, la conséquence infaillible, c’est que l’histoire de la philosophie devient elle-même une pure fantasmagorie. Les formules sous lesquelles les penseurs des temps passés cherchaient à comprendre l’univers, sont détachées du fonds scientifique sur lequel elles sont nées et perdent ainsi toute valeur réelle.

Laissons donc de côté le reproche de dilettantisme, puisque l’on ne sait en quoi consiste au juste la qualité opposée, et que, précisément sur le terrain philosophique, l’avantage d’une vigoureuse originalité contre-balance souvent toutes les traditions d’école. Vis-à-vis les sciences exactes, les matérialistes sont justifiés par la tendance philosophique de leur travail, mais seulement s’ils constatent les faits avec précision et s’ils se bornent à tirer des conclusions de ces mêmes faits. Quand l’enchaînement de leur système les force de hasarder des hypothèses qui empiètent sur le domaine des sciences empiriques, ou quand ils ne tiennent aucun compte des résultats importants des recherches scientifiques, ils encourent à juste titre, comme tout philosophe en pareil cas, le blâme des juges compétents ; mais ces derniers n’acquièrent point par là le droit de traiter dédaigneusement tout l’effort de pareils écrivains. Néanmoins, à l’égard de la philosophie, les matérialistes ne sont point encore complètement justifiés, quoique nous devions affirmer que, dans le cas présent, le reproche de dilettantisme ne signifie rien de précis.

Et d’abord tout système qui prétend fonder une conception philosophique de l’univers exclusivement sur les sciences physiques, doit, à notre époque, être qualifié de demi-philosophie de la pire espèce. Le même droit qui permet au