Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/163

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Il voit, dans mille occurrences, des conditions matérielles influer sur la vie intellectuelle. Son esprit, libre de toute prévention, n’aperçoit aucun motif de douter que les impressions des sens se communiquent réellement à ce qu’on appelle l’âme. Ilvoit l’esprit humain croître, pour ainsi dire, avec le cerveau »… « Aucun préjugé théorique ne l’empêche, comme Descartes, de reconnaître dans les âmes des bêtes, des membres, parents de l’âme humaine, et graduellement moins parfaits, de la même série de développement. » Il voit comment, chez les vertébrés, se développent par degrés, à mesure que croît l’activité de l’âme, celles des parties du cerveau que la physiologie aussi est forcée de regarder comme les agents des fonctions supérieures de l’entendement. « Enfin la théorie de la descendance, combinée avec celle de la sélection naturelle, lui impose l’idée que l’âme est la résultante insensiblement progressive de certaines combinaisons matérielles, et que peut-être, pareille a d’autres facultés héréditaires, utiles à l’individu, dans la lutte pour l’existence, eue s’est élevée et perfectionnée à travers une série innombrable de générations. »

On pourrait presque croire que cela suffit pour contenter le matérialisme. Par surcroît de concessions, Du Bois-Reymond prend formellement sous sa protection le propos si décrié de Vogt : Les pensées sont au cerveau ce que la bile est au foie ou l’urine aux reins (3). La physiologie ne connaît pas de hiérarchie fondée sur des considérations esthétiques. Pour elle, la sécrétion des reins est un objet aussi digne que les fonctions des organes plus nobles. « On ne peut guère non plus blâmer Vogt de faire de l’activité de l’âme un produit des conditions matérielles du cerveau. » Il a eu tort seulement de faire revivre la pensée que, d’après sa nature, l’activité de l’âme peut aussi bien s’expliquer par la structure du cerveau que la sécrétion par la structure de la glande.

Mais c’est là précisément ce qui révolte le matérialisme.