Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/194

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de ce que l’on appelle la « vérité intime » de l’art et de la religion, dont le critérium ne consiste que dans le contentement et l’harmonie du cœur et n’a absolument rien de commun avec la connaissance scientifique, nous ne pouvons nommer vrai que ce qui paraît nécessairement, à tout être d’organisation humaine, tel que cela nous paraît à nous-mêmes, et cet accord ne peut se trouver que dans les connaissances dues aux sens et à l’entendement.

Or une connexion existe aussi entre nos idées et ces connaissances sensibles : la connexion dans notre esprit, dont les conceptions ne dépassent la nature que comme opinions et intentions, tandis que, comme pensées et produits de l’organisation humaine, elles sont néanmoins aussi des membres de ce monde des phénomènes où nous trouvons tout enchaîné par des lois nécessaires. En un mot : nos idées, nos chimères, sont des produits de la même nature, qui donne naissance aux perceptions de nos sens et aux jugements de notre entendement. Elles n’apparaissent pas dans l’esprit fortuitement, irrégulièrement et comme étrangères mais considérées par le sens et l’entendement, elles sont le produit d’un processus psychologique, dans lequel nos perceptions. sensibles jouent aussi un rôle. L’idée se distingue de la chimère par sa valeur, non par son origine. Mais qu’est-ce que la valeur ? Un rapport avec l’essence de l’homme, avec son essence parfaite, idéale. C’est ainsi que l’idée se mesure à l’idée ; et la racine de ce monde de valeurs spirituelles se perd tout aussi bien que la racine de nos représentations sensibles dans l’essence la plus intime de l’homme, laquelle se dérobe à notre observation. Nous pouvons psychologiquement expliquer l’idée comme un produit du cerveau ; comme valeur intellectuelle, nous ne pouvons que la mesurer à des valeurs analogues. La cathédrale de Cologne ne se compare qu’à d’autres cathédrales ; ses pierres, à d’autres pierres.

L’idée est aussi indispensable que le fait pour le progrès des sciences. Elle ne conduit pas nécessairement à la méta-