Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/219

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nécessaire. Un physicien de profession, même quand il admet des atomes étendus, ne s’avisera guère de faire dépendre l’existence de ce que nous appelons matière, dans la vie ordinaire et dans la science, de l’existence de corpuscules étendus infiniment petits. Redtenbacher, par exemple, ne défend contre Cauchy que ses axes d’élasticité, mais non la réalité de la matière. D’un autre côté, nous ne pouvons nous dissimuler que l’Auguste de Büchner, probablement d’après le plan conçu par l’auteur, émet l’opinion de presque tous les profanes qui se sont plus ou moins occupés de ces questions. Le motif est probablement que l’on ne peut s’affranchir suffisamment de la représentation sensible de corps composés et compactes en apparence, tels que notre toucher et nos yeux nous les font connaître. Le physicien de profession, du moins le physicien mathématicien, ne peut pas faire le moindre progrès dans sa science, s’il ne s’affranchit de ces représentations. Tout ce qu’il rencontre dans ses travaux est la résultante de forces pour lesquelles la matière forme un sujet entièrement vide en soi et pour soi. Or la force ne saurait être représentée sensiblement d’une manière adéquate on se sert d’images, comme les lignes des figures dans les théorèmes de géométrie, mais sans jamais confondre ces figures avec l’idée de force. Cette habitude continuelle d’associer à l’idée de force une conception intellectuelle et abstraite de la force est aisément transportée par le savant à l’idée de matière ; c’est ce que nous montrera l’exemple d’un physicien, dont le nom fait honneur à la science allemande.

W. Weber s’exprime ainsi dans une lettre à Fechner (25) : « Il importe, dans les causes de mouvement, d’éliminer une partie constante, telle que le reste soit variable, mais qu’on puisse se figurer ses changements comme dépendant uniquement de rapports mesurâmes de temps et d’espace. Par cette voie, on arrive à une idée de masse, à laquelle ne s’attache pas du tout nécessairement la représentation d’étendue