Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/235

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ne pourrait l’être l’atomistique. Celle-ci doit ses succès à la clarté sensible de ses hypothèses, et, bien loin de la mépriser pour cette raison, nous serions porté à nous demander si l’on ne pourrait pas déduire la nécessité d’une conception atomistique des principes de la théorie de Kant sur la connaissance, ce qui n’empêcherait pas les mathématiciens, qui se plaisent tant aujourd’hui à entrer dans des voies transcendantes, de tenter de nouvelles routes. Nous sommes fort peu touché de ce que Kant, au contraire, passe pour le père du dynamisme », mot par lequel on entend, pour abréger, le dynamisme de la théorie de la continuité ; car, malgré l’emphase avec laquelle ses successeurs ont vanté cette théorie de la continuité, sa nécessité, au point de vue de la philosophie critique, est très-peu évidente ; et l’on pourrait presque, comme nous l’avons dit, suivre plus fructueusement la voie inverse ; car le mode, dont la catégorie opère, dans sa fusion avec l’intuition sensible, a toujours pour but la synthèse dans un objet abstrait, c’est-à-dire débarrassé, dans notre représentation, des liens infinis de tout enchaînement. Si l’on envisageait l’atomistique sous ce point de vue, l’isolement mutuel des masses parcellaires apparaîtrait comme une conception physique nécessaire, dont la portée s’étendrait à l’enchaînement total du monde des phénomènes, tandis qu’elle ne constituerait que le reflet de notre organisation ; l’atome serait une création du moi, mais deviendrait ainsi précisément la base nécessaire de toute science de la nature.

Nous avons fait observer ci-dessus qu’au point de vue physico-chimique, l’atome devient d’autant plus obscur que la molécule est plus inondée de lumière. Naturellement cela ne s’applique qu’à l’atome dans le sens étroit de ce mot, à la dernière fraction que l’on puisse se figurer de la matière. Ces atomes deviennent d’autant plus insaisissables qu’on en approche davantage la lumière de l’analyse scientifique. Ainsi par exemple Lothaire Meyer nous montre que le nombre des atomes contenus dans une molécule est