Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/258

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toujours dans la structure et la conservation du monde organique, des appuis nouveaux pour la téléologie. Bien plus, une certaine opposition aux idées matérialistes se rattachait souvent même aux seuls noms d’organisme et d’existence ; car sur ce terrain, on se ngurait avoir sous les yeux, pour ainsi dire, l’incarnation d’une force supérieure et intellectuelle, en lutte contre le mécanisme de la nature morte.

Au moyen âge et, plus encore, au commencement des temps modernes, tant que dura notamment l’influence de Paracelse et de Van Helmont, on ne trouvait pas, entre l’organique et l’inorganique, un abîme pareil à celui qu’ont admis les siècles les plus rapprochés de nous. C’était une idée généralement répandue que la nature entière est animée. Aristote ayant fait naître, de la vase, des grenouilles et des serpents, on ne pouvait regarder que comme très-naturelles des conceptions analogues, dans un temps où régnait l’alchimie. Qui voyait des génies jusque dans les métaux, dont l’altération lui semblait un processus de fermentation, ne pouvait trouver de difficulté particulière dans l’origine des êtres vivants. Il est vrai qu’en général on croyait à l’invariabilité des espèces, — dogme sorti directement de l’arche de Noé ; mais on n’y regardait pas de si près en ce qui concerne la naissance d’êtres nouveaux, et les animaux inférieurs, notamment, on les faisait provenir sur la plus large échelle de la matière inorganique. Ces deux articles de foi se sont conservés jusqu’à nos jours, l’un de préférence parmi les professeurs, l’autre parmi les paysans et les charretiers. Les premiers croient à l’invariabilité des espèces ils chercheront peut-être pendant vingt ans à sefaire, pour leur croyance, un argument de la morsure des limaçons les derniers déclarent que, suivant leur expérience, les puces naissent de la sciure de bois et d’autres ingrédients. Sur ce terrain, plus tardivement que sur d’autres, la science a fini par réduire ces articles de foi à l’état de simples hypothèses