Page:Langlois - Harivansa ou histoire de la famille de Hari, tome 1.djvu/192

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La malheureuse, les yeux baignés de larmes, révèle à son époux l’action du Bhodja Satadhanwan. Crichna, faisant ses ablutions à la suite d’un sacrifice de famille que les frères Pândavas venaient de célébrer, ordonne à Sâtyaki d’atteler son char, et le vainqueur de Madhou[1] arrive promptement à Dwâravatî. Il dit à son frère aîné, au héros qui est armé du soc : « Le lion avait tué Praséna, Satadhanwan a tué Satrâdjit. Celui-ci avait reçu de moi le Syamantaca, j’en suis le maître. Monte rapidement sur ton char ; que le vaillant Bhodja soit détruit, le Syamantaca nous appartient. »

C’est alors qu’une guerre cruelle commença entre Crichna et Satadhanwan, qui attendait le secours d’Acroûra. Mais celui-ci, en voyant l’acharnement de ces deux ennemis, malgré son traité d’alliance, n’eut pas le cœur de se montrer. Le Bhodja, vaincu par la crainte, songea à la retraite, et fit cent yodjanas[2] sur le même cheval avec lequel il avait combattu et qui s’appelait Hridaya. Trouvant alors un char, il quitta sa monture harassée de fatigue ; et l’animal, d’épuisement et de regret, expira sur-le-champ.

Crichna dit à Balarâma : « Reste en cet endroit, nos chevaux sont fatigués ; je veux aller à pied à la conquête du Syamantaca. » Alors mettant pied à terre, le héros poursuivit Satadhanwan jusqu’auprès de Mithilâ[3] où il le tua. Mais vainement il avait déployé sa force et son adresse ; après avoir terrassé le Bhodja, il ne vit point le Syamantaca. A son retour, son frère lui dit : « Donne-moi cette pierre. » « Je ne l’ai point, » répondit Crichna. « Ô honte ! répéta plusieurs fois Balarâma irrité ; je vous le pardonne, parce que vous êtes mon frère. Adieu, je vous quitte. Je n’ai plus rien à démêler avec Dwâravatî, avec vous et les Vrichnis. » Le terrible Balarâma se retira à Mithilâ, dont le prince lui rendit tous les honneurs qu’il pouvait désirer.

Cependant le prudent Acroûra multipliait sans ménagement toutes les espèces de sacrifices. Ce glorieux et savant fils de Gândinî[4], afin de pouvoir


    une ville fondée sur ses bords, et par conséquent appelée Vârana ? Voy. lect. clxvi, note 1. Le mss. de M. Tod l'appelle Vâranâvata.

  1. Mauvais génie tué par Vichnou, dont Crichna est un avatare.
  2. L'Yodjana est une mesure itinéraire que l'on évalue à 9 milles ; d’autres calculs ne la portent qu'à 5 mailles ou 4 milles et ½.
  3. C’était la capitale d'un royaume dans le nord-est du Bengale. Voy. lect. xxxvi, note 4.
  4. Ce vers offre un exemple des licences que se donne quelquefois le poëte ; les trois syllabes du mot Gândinî le gênaient, il a réduit ce mot à deux syllabes, Gândî. J'ai déjà rencontré plusieurs cas semblables que je n'ai point relevés : ainsi il dit Djanmédjaya, pour Djanamédjaya.