Page:Langlois - Seignobos - Introduction aux études historiques, 1899.djvu/189

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son imagination, les éléments seuls en sont sûrement réels ; on ne peut donc affirmer que l’existence séparée des éléments irréductibles, forme, matière, couleur, nombre. Quand le poète parle de portes d’or ou de boucliers d’argent, il n’est pas sûr qu’il ait existé des portes en or ou des boucliers en argent ; mais seulement qu’il existait des portes, des boucliers, de l’or et de l’argent. Il faut donc descendre dans l’analyse jusqu’à l’élément que l’auteur a forcément pris dans l’expérience (les objets, leur destination, les actes usuels).

3o La conception d’un objet ou d’un acte prouve qu’il existait, mais non qu’il fût fréquent ; c’est peut-être un objet ou un acte unique ou du moins restreint à un très petit cercle ; les poètes et les romanciers prennent volontiers leurs modèles dans un monde exceptionnel.

4o Les faits connus par ce procédé ne sont localisés ni dans le temps ni dans le lieu : l’auteur peut les avoir pris dans un autre temps et un autre pays que le sien.

Toutes ces restrictions peuvent se résumer ainsi : avant de tirer d’une œuvre littéraire un renseignement sur la société où a vécu l’auteur, se demander ce que vaudrait pour la connaissance de nos mœurs le renseignement de même nature tiré d’un de nos romans contemporains.

Comme les conceptions, les faits extérieurs ainsi obtenus peuvent s’établir par un seul document. Mais ils restent si restreints et si mal localisés que pour en tirer parti il faut attendre de les avoir rapprochés d’autres faits semblables ; ce qui est l’œuvre de la synthèse.

On peut assimiler aux faits résultant des conceptions les faits extérieurs indifférents et très grossiers que l’auteur a exprimés presque sans y penser. On n’a