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l’époque romantique.

compte que de Mérimée et de V. Hugo : l’un, dans le Théâtre de Clara Gazul (1825), puis dans la Jacquerie (1828), offre un drame familier, pittoresque, coulé dans les formes de la vie actuelle ou de l’histoire, et dégagé des conventions traditionnelles. L’autre, dans la Préface et dans le Drame de Cromwell, dressa la théorie complète et le spécimen monumental du théâtre romantique.

Il nous faut, avant de regarder les œuvres, étudier les doctrines, les formules nouvelles ou prétendues telles : V. Hugo nous servira de guide, Vigny et Dumas[1]nous aidant à dégager chez lui ce qui est la pensée commune de l’école.


1. THÉORIE DU DRAME ROMANTIQUE.


Au théâtre comme partout, le romantisme se détermine d’abord par opposition au goût classique : le premier article de la doctrine est de prendre le contre-pied de ce qu’on faisait avant.

Aussi est-il facile de définir le drame romantique un drame où ni les règles ni les bienséances de la tragédie ne sont observées. Plus d’unités : sous prétexte, comme dit Vigny[2], de donner « un tableau large de la vie, au lieu du tableau resserré de la catastrophe d’une intrigue ». Plus de distinction des genres : « des scènes paisibles sans drame, dit Vigny, mêlées à des scènes comiques et tragiques ». Plus de style noble : « un style familier, comique, tragique, et parfois épique », toujours selon les termes de Vigny. La Préface de Cromwell nous dit la même chose en plus de mots. Mais il n’y a pas grand’chose en tout cela de nouveau : le mélange des genres, des styles, nous connaissons cela par


    dialogue de H. Visconti sur l’Unité de temps et de lieu, une lettre de Manzoni à M. C*** sur le même sujet). Cf. p. 922, n. 2.
    1824. Vigny. Muse française, p. 62 (sur les Œuvres posthumes du baron de Sorsum).
    1825. Mérimée, le Théâtre de Clara Gazul.
    1826. Brugnière de Sorsum. Chefs-d’œuvre de Shakespeare, trad. conformément au texte original en vers blancs, en vers rimés et en prose,… 1826. in-8.
    1827. V. Hugo, Cromwell.
    1827. (Dittmer et Cavé), les Soirées de Neuilly, esquisses dramatiques et historiques, par M. de Fougeray, in-8 (lire Malet ou une conspiration sous l’Empire).
    1827-1829. Vitet, les Barricades (Préface intéressante de la 4e éd., 1830).
    1827-1830. (Lœve-Veimars). Scènes contemporaines et scènes historiques, par le vic. de Chamilly (lire Le 18 brumaire).
    1828. Mérimée, la Jacquerie.

  1. V. Hugo : Préface de Cromwell (éd. Souriau, Paris, 1897, in-16) ; Préfaces des autres drames. Dumas, Un mot (en tête de Henri III) ; Préface de Charles VII chez ses grands vassaux. Vigny, Dernière Nuit de travail (Préface de Chatterton) ; Avant-Propos de la Maréchale d’Ancre ; Avant-Propos de l’éd. de 1839 et Lettre à Lord *** (avant le More de Venise). À consulter : P. Nebout, le Drame romantique, Paris, 1897, in-8.
  2. Lettre à Lord***.