Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 7.djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des bonnes observations, elles satisferaient à la condition que la somme des carrés des erreurs soit un minimum ; les Tables qui, comparées à un nombre considérable d’observations, approchent le plus de cette condition méritent donc la préférence.

C’est principalement dans l’Astronomie que la méthode exposée ci-dessus peut être employée avec avantage. Les Tables astronomiques doivent l’exactitude vraiment étonnante qu’elles ont atteinte à la précision des observations et des théories et à l’usage des équations de condition, qui font concourir un grand nombre d’excellentes observations à la correction d’un même élément. Mais il restait à déterminer la probabilité des erreurs que cette correction laisse encore à craindre : c’est ce que la méthode que je viens d’exposer fait connaître. Pour en donner quelques applications intéressantes, j’ai profité de* limmense travail que Bouvard vient de terminer sur les mouvements de Jupiter et de Saturne, dont il a construit des Tables très précises. Il a discuté avec le plus grand soin les oppositions et les quadratures de ces deux planètes, observées par Bradley et par les astronomes qui l’ont suivi, jusqu’à ces dernières années ; il en a conclu les corrections des éléments de leur mouvement et leurs masses comparées à celle du Soleil, prise pour unité. Ses calculs lui donnent la masse de Saturne égale à la 3512e partie de celle du Soleil. En leur appliquant mes formules de probabilité, je trouve qu’il y a onze mille à parier contre un que l’erreur de ce résultat n’est pas un centième de sa valeur, ou, ce qui revient à très peu près au même, qu’après un siècle de nouvelles observations ajoutées aux précédentes et discutées de la même manière, le nouveau résultat ne différera pas d’un centième de celui de Bouvard. Ce savant astronome trouve encore la masse de Jupiter égale à la 1071e partie du Soleil, et ma méthode de probabilité donne un million à parier contre un que ce résultat n’est pas d’un centième en erreur.

Cette méthode peut être encore appliquée avec succès aux opérations géodésiques. On détermine la longueur d’un grand arc à la surface de la Terre par une chaîne de triangles qui s’appuient sur une base mesurée avec exactitude. Mais quelque précision que l’on apporte dans la