Page:Laporte - Émile Zola, 1894.djvu/163

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ment particulier, l’artiste. C’est la profession de foi systématique au réel dans la nature et le dédain systématique de l’idéal, de ce qui dépasse la nature. L’art véritable, c’est l’union harmonieuse de l’idéal et de la nature ; c’est la nature inondée des reflets de l’idéal, c’est l’idéal réfléchi dans la nature. L’art exprime la réalité, mais la réalité transfigurée par l’idéal ; l’art exprime l’idéal, mais l’idéal réalisé dans un type de la nature. Le réel tout seul est une erreur ; l’idéal tout seul en est une autre. Le réel tout seul est un être brut qui supprime en se montrant toute la raison d’art. Le propre du génie artistique est de saisir la proportion où ces deux choses : le réel et l’idéal, doivent s’unir pour faire éclater la splendeur de l’ordre et de l’harmonie, c’est-à-dire la beauté même. L’idéal sans le réel dans les œuvres d’art, ce serait comme l’âme sans le corps ; et le réel sans l’idéal, ce serait comme le corps sans l’âme ; ce serait l’art cadavre.

L’art vrai, le beau artistique est comme l’homme lui-même ; il est esprit et corps ; il est le corps transfiguré par l’esprit éclatant à travers le corps. Le sommet de l’art est le point culminant où l’âme et le corps, l’esprit et la matière, comme dans l’homme même, arrivent à la compénétration la plus complète et la plus harmonieuse.

L’homme, qui a la prétention d’avoir été créé à l’image de Dieu, doit, par l’art, créer,