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voisins dans la chambre, on a trouvé l’étudiant, debout, un poignard rouge de sang à la main, et couché sur le lit, la poitrine trouée d’un coup terrible, le cadavre, encore palpitant, de la jeune fille. On a arrêté et conduit le meurtrier au commissariat, pour ainsi dire inconscient de ce qui s’était passé, avouant et reconnaissant son crime, mais protestant néanmoins de son innocence, ou plutôt de son irresponsabilité.

Un juge d’instruclion a été nommé, mais rien de nouveau n’ayant modifié les faits précédents, son rôle s’est borné à les constater et à établir, d’après eux, l’acte d’accusation qui envoie le coupable devant la Cour d’assises.

Le jour du procès est arrivé ; la salle est comble, on dirait une première de l’Opéra-Comique, celle de l’Attaque du Moulin, par exemple ; beaucoup de dames du grand monde, du demi et même de l’autre, genre Nana et Pot-Bouille ; des hommes aussi, mais mêlés, comme le jour du grand prix, on ne peut s’y méprendre, ce sont des habitués de la Curée, de l’Argent, du Ventre de Paris, de la Joie de vivre, du Bonheur des Dames, d’Une page d’amour ; quelques adeptes, mais moins nombreux, de l’Assommoir, de Germinal, de la Bête humaine, de la Débâcle. On sent que ce public, tout spécial, à cause de cette affaire, attend, on ne sait quoi, mais il attend un fait quelconque, un incident peut-