Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/273

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Et tant d’humbles vertus, qu’on découvre aujourd’hui,
À la porte du ciel s’en vont frapper pour lui.

Or, une voix vibrait dans ces accords mystiques,
Claire et d’un timbre d’or dominait les cantiques ;
Son lointain que le vent jetait dans ce concert,
Sur des flots de parfums apportés du désert.
Les steppes d’Orient, du milieu des bruyères
Les avait vus monter ces longs flots de prières
Qu’en sa ferveur d’amante exhalait, chaque soir,
Une âme ardente et pure ainsi qu’un encensoir.


ROSA MYSTICA.

Mon âme est la sœur de cette âme en peines,
Donnez-moi, mon Dieu, sa part de douleurs ;
Pour vous la payer, je viens les mains pleines.
S’il vous faut du sang, prenez dans mes veines ;
Prenez dans mes yeux s’il vous faut des pleurs.

Quand vous répandez vos grâces divines,
Remplissez son cœur aux dépens du mien.
Que toute ma sève aille à ses racines ;
Les roses pour lui, pour moi les épines ;
J’accepte tout mal, s’il en a le bien.

Cultivez en moi, pour qu’il les moissonne,
Les belles vertus, les beaux épis d’or.
Labourez mon cœur, je vous l’abandonne ;
Pourvu que, là-haut, la même couronne
À vos pieds, mon Dieu, nous unisse encor.