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LE LIVRE D’UN PÈRE.


Montez jusqu’où visait le rêve de vos pères ;
Et sans rien accepter dans ce temps odieux,
Tâchez, dans vos combats, sous des astres prospères,
De venger notre injure et d’absoudre nos dieux.

Prenez la voie étroite, et pour prix de vos peines,
En plein azur, assis sur ce rocher vermeil,
Attirez de vos mains, vers ces hauteurs sereines,
Mon âme qui vous suit du côté du soleil.



III



Encor quelques degrés franchis de ce pas ferme,
Et de l’âpre escalade ils atteindront le terme.
Le sommet désiré va leur livrer ses fleurs.
Des cieux mélangés d’ombre et de sombres couleurs
Le soleil plus rapide embrasse au loin la voûte :
Il s’abaisse ; on dirait qu’il veut, las de sa route,
Choisir, pour s’y poser dans le calme du soir,
Ce faîte où deux enfants ont rêvé de s’asseoir.
Du rocher qui flamboie aux deux coureurs que j’aime,
Mesuré par mes yeux, l’intervalle est le même
Qu’entre ce trône ardent et les pieds d’or du Dieu
Le terme de la course apparaît au milieu.
Or, songeant au duel de Jacob et de l’ange,
Moi j’assistais d’en bas à cette lutte étrange.

Cependant les troupeaux, les hommes de labour,
Se hâtent vers la plaine avant la fin du jour.