Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/123

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Comment de l’homme en vous est-il assez resté
Pour trembler et souffrir dans la divinité ?
Tout mortel à me voir me prendrait pour un frère,
Et s’il m’appelle ainsi sa bouche est téméraire ;
Lorsqu’au-devant de moi je sens son cœur venir,
Je voudrais l’embrasser, et je dois le bénir !
Mon front doit se voiler devant un regard tendre.
L’amour qui m’est offert c’est à Dieu de le rendre.
Je ne puis me donner selon mes doux penchants,
Car j’appartiens à tous et surtout aux méchants !
Et ceux qui m’ont aimé de l’amour la plus forte
N’ont fait qu’unir leur croix à celle que je porte. »


Il passa : la prière abrégea le combat ;
Et les Anges ont dit qu’une larme tomba.
Larme attestant l’effort, mais que Jésus avoue ;
L’urne des séraphins la reçut de sa joue,
Et des pauvres humains par un amour brisés
Les cœurs faibles et doux y seront baptisés.

Or, il marchait, rempli de cette ardeur plus prompte
Que puise dans la lutte une âme qui se dompte,
Prêt à tous les périls que Dieu dans ses desseins
Suscite à chaque pas sur la route des saints.