Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/251

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Au Dieu de son attente offrir l’encens sauvé.
Dans un épanchement de douleur et d’extase,
Sur le corps de Jésus elle rompit le vase :
De larmes et de baume elle baigna ses pieds,
Les retint doucement sur son sein appuyés,
Et de ses blonds cheveux pressant leur chaste ivoire,
Longtemps elle essuya le flot expiatoire.

Et le parfum montait ; la salle du festin
Fumait comme un bois vierge au soleil du matin ;
Et l’air, tout imprégné des essences divines,
Vivifiait le sang dans toutes les poitrines.
Alors, devant Jésus, il se fit un moment
D’un silence rêveur tout plein d’épanchement.

Mais tout à coup, tombant comme une pierre aride,
Une voix vint troubler cette extase limpide.

Elle disait : « Chassez cette femme d’ici !
« Les agneaux et les boucs se mêlent-ils ainsi ?
« Le Maître ne sait pas quelles lèvres impures
« Osent à sa personne essuyer leurs souillures.
« Croit-on qu’un peu d’encens et de pleurs épanchés
« Achètent le pardon et lavent les péchés !
« Il faut pour sauver l’âme une foi plus active ;