Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/44

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Or, à côté des lecteurs et des critiques que l’habitude de tout demander à l’imagination, à la passion, à l’émotion physique, rend indifférents à cette partie d’une œuvre qui est du ressort de l’âme elle-même, il y a ceux qui se préoccupent exclusivement des conclusions formelles de la poésie, et par cela même restent incapables d’en découvrir le sens, à moins qu’il ne soit affiché en gros caractères et formulé en termes abstraits, comme une moralité au bout d’un apologue. Contester l’utilité morale d’une œuvre parce qu’elle n’enseigne pas telle ou telle doctrine et n’aboutit pas à un précepte, ou par une autre préoccupation dénier à un poëme le sentiment et la vie, parce qu’il ne met pas en jeu les passions violentes et qu’il n’a pas pour but le plaisir et l’excitation physique, ce sont là deux erreurs bien opposées, mais également désastreuses en matière d’art. La pire des deux, peut-être, est celle des utilitaires, des propagateurs de systèmes, des hommes de parti. Nulle œuvre poétique ne leur semble douée de vie morale, s’ils n’en peuvent tirer un argument favorable à leur doctrine. Le poêle ne cesse à leurs yeux d’être un rêveur inutile, que s’il affecte les allures du tribun ou du prédicant. Certains critiques, par exemple, considèrent chez un écrivain l’absence de toute déclamation en faveur du progrès comme un signe d’affaissement et de mort digne d’être puni par l’inattention du siècle. Avec un peu de lyrisme prophétique sur les miracles que nous réservent ces deux mystérieuses