Page:Larguier - L'an mille, 1937.djvu/46

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arrangé d’une existence sans éclat de petit rentier bibeloteur. Je vois cela. J’habitais le quai d’Anjou et je connaissais Daumier, Corot et Daubigny qui me vendaient quelques études et quelques toiles. J’avais l’intérieur d’un bourgeois artiste et cossu de Chardin. Deux ou trois amis déjeunaient avec moi chaque dimanche et s’extasiaient toujours quand une vieille servante aimable et familière apportait le vol-au-vent traditionnel. L’après-midi, il pleuvait sur la Seine et nous feuilletions des dessins et des estampes, des livres anciens, et nous nous entretenions d’un poème récent de M. Victor Hugo, du dernier ouvrage de M. de Balzac. Je déjeunais en pantoufles et en robe de chambre bien étoffée. Je dormais dans un lit à rideaux de cretonne fleurie. J’allais au Théâtre-Français et à l’Odéon. Je rentrais à pied, même lorsqu’il y avait de la neige et, dès le seuil,