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s’aperçoit qu’il y a deux éléments dans les espérances des prophètes : le premier, ’c’est la certitude du triomphe final pour la race et la religion d’Israël ; le second, ce sont les préliminaires, les circonstances, les formes de ce triomphe. Tous les prophètes admettent le triomphe d’Israël précédé de la ruine de ses ennemis ; mais ils ne sont pas d’accord sur la manière et les circonstances dans lesquelles cette destruction s’accomplira. Chacun parle d’après les événements qu’il a sous les yeux, d’après les impressions du moment. Pasplusquenous, lespropAètesn’échuppentau milieu dans lequel ils vivent. Ainsi, Joël annonce que les Philistins et les Phéniciens, vainqueurs naguère des Israélites, les Edomites et les Égyptiens seront battus dans la vallée de Josaphat et écrasés pour toujours. Mais, dit un critique, Philistins et Phéniciens vécurent comme par le passé. La vallée de Josaphat ne fut témoin d’aucune catastrophe. Rien ne changea aux cieux ni sur la terre. Osée annonce un châtiment comme Isaïe ; mais l’un dit qu’il viendra d’Égypte et l’autre d’Assyrie. Sophonie, qui vécut après eux et qui a vu le déclin de Ninive, ne redoute plus l’Assyrie, mais il attend une invasion des peuples du Nord pour purifier les enfants dAbruhara. Daniel nous transporte au milieu des agitations et des guerres de l’époque des Macchabées, et nous retrouvons ainsi la trace, dans.ces divers écrits, des destinées successives de la nation juive.

Chez tous se rencontrent l’espérance de la domination du peuple de Dieu sur les autres pays et la certitude de la conversion des païens au culte de Jéhovah ; mais cette domination ne s’établira pas sans lutte ; la guerre sera l’instrument de l’Eternel, la vengeance l’avant-goùt de la félicité. Par qui sera dirigée cette grande œuvre, qui sera le libérateur, le sauveur, le messie ? Osée, Isaîe, Michée, Jéréraie, Ezéchiel veulent que ce soit un prince de la maison de David ; dans un autre passage, Isaïe désigne clairement Cyrus comme le héros prédestiné ; Oggée et Zachurie désignent Zoroliubel. On voit qu’il est peu question de Jésus ; d’ailleurs, quelle ressemblance y a-t-il’ entre ce messie belliqueux et guerrier et le Jésus dont les Evangiles racontent l’histoire ?

Si des traits généraux nous descendons aux détails, nous verrons’que les prophéties n’ont aucun rapport avec la vie de Jésus. Prenons, par exemple, l’Évangile selon saint Matthieu. L’Evangéliste rapporte au chap. I<sr (v. 23) l’oracle d’Isaïe : « Voici qu’une vierge sera enceinte et elle enfantera un fils et on l’appellera Emmanuel, c’est-à-dire Dieu avec nous, » et l’applique a la naissance de Jésus. Or, cette prédiction a trait à un événement tout différent et nullement miraculeux, qui devait avoir lieu du vivant même du pro~ phète. Voici le sens clair et simple des paroles qu’lsaïe adresse au roi de Juda : « Ne cois pas épouvanté de l’approche de tes puissants ennemis, les rois dIsraël et de Syrie, car il ne s’écoulera pas plus de temps avant leur retraite qu’il n’en faut à une femme, non encore enceinte aujourd’hui, pour enfanter un fils et l’amener à l’âge où l’on commence à distinguer le bien au mal. >

Plus loin, l’écrivain sacré nous apprend que Jésus, descendu en Égypte pour fuir la’ malice d’Hérode, est remonté de ce pays, afin que fût accomplie la parole du prophète : ■ J’ai appelé mon fils d’Égypte, à Or, cette explication dénature complètement un mot du prophète Osée, qui, pariant d’Israël, l’enfant bien-uimé de Jéhovah, lui rappelle, par la bouche de l’Eternel, sa sortie d’Égypte.

Ailleurs, l’Évangile nous raconte que Joseph et Marie se hxérent à Nazareth, conformément à la prophétie qui voulait que Jésus fût appelé Nazaréen. Or, cette prédiction ne se trouve pas dans l’Ancien Testament, et le seul passage qui olfre.une ressemblance de lettres avec le mot de Matthieu se trouve dans Isaïe et signifie simplement : 11 sortira d’Isaï (père de David) un rejeton (nétsér).

On dit encore que David a prédit, dans le psaume XVI, la résurrection de Jésus dans cepassage cité par Pierre dans le discours qu’il prononça le joui’ de la première Pentecôte : ■ Tu ne laisseras point mon âme au sépulcre et tu ne permettras pas que ton saint sente la corruption. » Or, le raisonnement de l’apôtre n’a aucun fondement, puisque le Psalmiste n’a pas songé à l’avenir et qu’il a voulu exprimer seulement sa confiance dans la protection de l’Eternel. On ne peut voir dans ce passage que la joyeuse espérance du retour à la sauté, et quand ou connaît les idées des Juifs sur la vie future, il est difficile d’y trouver la certitude de l’immortalité.

Nous avons montré par quelques exemples ce qu’il faut penser des prophéties concernant Jésus-Christ ; il nous reste à parler des jcophéties que l’on attribue à Jésus-Christ ui-même. Il y en a qui se rapportent a sa personne, d’autres à son peuple. On dit d’abord que Jésus-Christ a prédit sa mort prochaine et sanglante ; mais on avouera qu’un homme engage dans la voie où Jésus était entré peut, sans beaucoup de peine et sans aucun don surnaturel, en prévoir l’issue. Aussi, s’empresse-t-on d’ajouter qu’il a prédit sa’ résurrection. Mais qui l’atteste ? Des documents écrits à une époque où la croyance à sa résurrection était déjà répandue dans l’Église, en sorte qu’il n’y aurait rien d’étonnant que

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les écrivains lui eussent prêté des paroles qu’il n’a jamais prononcées. On est confirmé dans cette pensée lorsqu’on voit que les disciples en ont si peu gardé souvenance. Dès que Jésus est arrêté, ils prennent la fuite sans attendre sa résurrection et ils y comptent même si peu qu’une tradition conservée par l’Évangile selon saint Luc nous montre les disciples complètement abattus et disant : «Nous espérions qu’il délivrerait Israël. • Ils ne l’espéraient donc plus. Voilà pour’les prédictions sur sa personne. Quant à ses autres prophéties, elles concernent la ruine de Jérusalem. Ici encore, nous ne voyons rien de surnaturel que Jésus ait prévu la ruine imminente de sa patrie. Il devait comprendre facilement que les rébellions suscitées par les faux messies qui se succédaient à cette époque sans interruption finiraient par lasser les Romains et que les Juifs seraient’ infailliblement écrasés dans la lutte. Cela, il peut l’avoir compris et l’avoir déclaré1. Et en effet, dans Matthieu, ses prévisions sur la ruine de Jérusalem sont très-vagues, très-générales ; mais dans le troisième Évangile, qui a été écrit après l’an 71, on met dans sa bouche une foule de particularités qui se sont en effet accomplies et on lui fait raconter à l’avance le siège de Jérusalem.

Il est donc bien établi que l’on ne prédit pas l’avenir et que personne ne l’a jamais prédit à coup sûr. Rappelons d’ailleurs, en. terminant, que la fonction principale des prophètes hébreux ne fut pas d’annoncer les événements les plus lointains ; sans doute, comme tous les hommes doués d’une vive intelligence et d’une conscience droite, ils purent prévoir avec plus ou moins de certitude les conséquences des actes qui s’accomplissaient sous leurs yeux et, sous ce rapport, ils méritent d’être appelés voyants ; mais, avant tout, ils ont repris, ils ont exhorté, ils ont consolé leur peuple ; ils ont prêché la fidélité a Jéhovah et la nécessité, pour être heureux, de vivre selon la loi de l’Eternel. À la fois poètes, prédicateurs et tribuns, ils ont gardé vis-à-vis de tous, peuple, prêtres et rois, leur indépendance et leur franc parler ; ils ont été au milieu des Juifs les gardiens de la justice et de la sainteté ; ils ont montré l’impuissance des. sacrifices à purifier l’homme, l’insuffisance des rites et des cérémonies ; ils ont entrevu la religion spirituelle, intérieure, universelle ; ils ont lutte contre la force ; ils ont espéré contre toute espérance ; ils ont cru au triomphe du bien et de la justice, à la ruine définitive du mal et de l’iniquité. Voilà le véritable caractère des prophètes hétfveux ; voilà dans leurs prédictions ce qui demeure éternellement. Mais ces prophéties n’offrent rien d’extraordinaire ni de surnaturel ; elles ne sont que l’expression des besoins les plus profonds et des instincts les plus impérissables de la conscience humaine.

Prophètes cévennols. On appelle ainsi, dans l’histoire, les individus atteints de la monomanie prophétique qui sévit parmi les malheureuses victimes de la révocation de l’édit de Nantes. On pourrait voir dans cette exaltation, qui s’était emparée des enfants et des femmes, des cas analogues au magnétisme et au somnambulisme. Fléchier, l’apologiste des massacres qui avaient désolé toutes les populations du Midi, attribue ce mouvement prophétique à un gentilhomme verrier, Du Serre, qui aurait rapporté de Genève, où il était allé, cette maladie morale qui devint si contagieuse. Dès 1685 déjà, des personnes’avaient dit entendre des concerts angéliques et des voix célestes. Mais la grande époque de l’épidémie s’étend de juin 1688 à février 1689. Bruyeis, qui écrivit l’Histoire du fanatisme, compte que dans ce court espace de temps plus de cinq à six cents personnes furent prises du mal prophétique dans le Vivarais et le Dauphiné. En 1701, les environs de Montpellier comptaient deux cents prophètes, et il y en avait trois cents sur les douze cents prisonniers renfermés dans le château de Perpignan. Mais, pour bien comprendre ce délire universel des malheureux protestants traqués, assassinés, torturés et n’échappât à la mort que pour être jetés dans des priâ’ons infectes oujsur les galères royales, il faudrait avoir présent à l’esprit le spectacle des persécutions qu’on leur fit subir et des infâmes dragonnades. Il nous semble qu’en approfondissant ce sujet et surtout en le comparant à des sujets aualogues, l’historien ou le physiologiste arriverait à une conclusion intéressante ; la profonde misère des peuples exalte leur esprit jusqu’à la manie prophétique. C’est aux temps les plus déplorables de son histoire que le peuple hébreu eut ses prophètes. L’espérance, autant que la douleur, est une cause de ce délire. Les lettres pastorales de Jurieu, qui avait compté, d’après l’Apocalypse, que les maux de ses coreligionnaires finiraient en 1689 (il sa trompait de cent ans), l’avènement de Guillaume d’Orange au trône d’Angleterre et les secours qué s en promirent les martyrs cévennols ne contribuèrent pas peu à leur mystique exaltation. D’ailleurs, cette exaltation, loin de les affaiblir, leur communiqua une force héroïque qui les rendit capables de supporter des tortures de toutes sortes et des massacres qui effacent presque les journées de la Saiut-Barthélemy ; car à peine étaient-ils deux mille et toujours disséminés, ces camisards qui tinrent en échec cinquante PROP

deux régiments des milices de province et une armée régulière de vingt mille hommes. L’histoire ne doit pas imiter les calomniateurs de ces martyrs ; et. tout en reconnaissant ce que peut contenir de folie leur délire prophétique, elle ne doit point l’attribuer au charlatanisme. En 1861, M. Alfred Dubois a soutenu sur ce sujet une thèse remarquable devant la Faculté de théologie protestante de Strasbourg.

Prophètes (les), nouvellement traduits sur l’hébreu, avec des explications et des notes critiques sur Isaïe, par Agier, président à la cour royale du département de la Seine (Paris, 1820, 2 vol. in-8°). C’est un ouvrage remarquable, où l’auteur traite surtout des prophéties d’Isaïe, et qui fait suite à deux autres études : les Psaumes nouvellement traduits sur l’hébreu et mis dans leur ordre naturel (Paris, 1809, 3 vol. in-8°), et les Prophéties concernant Jésus-Christ et l’Église, éparses dans les livres saints, avec des explications et des notes (Paris, 1819, l vol. in-8»). L’auteur, savant hébraïsant, est de l’école de Port-, Royal, et on s’en aperçoit à la sévérité de ses appréciations, tempérée par la sincérité de ses convictions religieuses. On peut s’en convaincre en lisant l’application hardie qu’il fait à Rome de la prophétie d’Isaïe contre Tyr et dont l’extrait suivant donnera une idée :

« Rome s’est enorgueillie de ses prérogatives ; elle les a outrées ; elle a prétendu que, dans l’Église, tout doit se gouverner par ses volontés. Elle a, comme Tyr, employé pour elle-même les trésors dont la piété publique l’avait constituée dépositaire, et, comme cet esprit d’intérêt et d’égoïsme en a promptemont tari la source, il a fallu, pour les entretenir et les augmenter, recourir à des moyens qu’on n’aurait pas cru qu’elle se fût jamais permis. Elle a levé des taxes sur tous les biens consacrés au culte de Dieu ; elle a vendu, sous le nom de bénéfices, l’administration de ces biens et les dignités et les offices dont ils étaient l’accessoire ; elle a disposé de même de tout ce qui était ou qu’elle supposait être en son pouvoir, lois, jugements, grâces, dispenses, indulgences... Elle a passé encore plus avant, et, s’attribuant sur les empires la même autorité qu’elle avait usurpée sur l’Église, elle en est venue jusqu’à se croire dispensatrice des sceptres et des couronnes. »

Voilà en quels termes s’exprimait un président de cour royale sous la Restauration, et il n’a pas été déporté ! Que l’on mesure le chemin que nous a fait parcourir le gouvernement de l’ordre moral I

La version d’Agief, sans être d’une pureté irréprochable, est néanmoins suffisamment châtiée et elle offre le mérite de serrer le texte d’assez près pour en donner une idée aussi exacte que possible. Les personnes qui ont fait de 1 étude des livres saints l’objet de leurs méditations peuvent ne pas adopter tous les commentaires du savant écrivain, mais on ne saurait lui contester la science et une grande indépendance d’opinions, mérite qui devient de plus en plus rare chez les hommes reliés au gouvernement par la nature de leurs fonctions.

Prophète (le), opéra en cinq actes, paroles de Scribe, musique de Meyerbeer ; représenté sur le théâtre de la Nation (Opéra) le 16 avril ’1849. Cet ouvrage est le troisième que le célèbre compositeur ait fait représenter sur le théâtre de notre Académie de musique. Il doit être considéré aussi comme lo troisième dans la série de ses chefs-d’œuvre. Ce n’est pas qu’on y, remarque aucune trace d’affaiblissement, aucun symptôme d’épuisement des qualités supérieures qui ont signalé l’homme de génie ; au contraire, il y a dans l’opéra du Prophète des effets entièrement nouveaux, des idées originales, une inspiration élevée et soutenue, une instrumentation dont la sûreté d’effet tient du prodige ; l’application des timbres des instruments et des dessins mélodiques de l’accompagnement à la peinture des sentiments humains montre que l’auteur était dans toute la plénitude de ses hautes facultés. Cependant Jiobert le Diable et les Huguenots ont incontestablement le pas sur le Prophète. L’a passage fort judicieux de M. Fétis donnera l’explication de cette différence : « 11 est remarquable, dit-il, que Robert, les Huguenots et le Prophète ont pour principe des idées mystiques. Dans le premier de ces ouvrages, tout l’intérêt consiste dans la lutte dit génie du bien et de celui du mal, pour la-possession d’une âme faible et passionnée. Dans les Huguenots, c’est l’amour le plus exalté aux prises avec le sentiment du devoir et la foi religieuse ; dans le Prophète, c’est l’anéantissement des sentiments humains par le fanatisme. Ce simple rapprochement suffit pour démontrer que les conditions dans lesquelles le compositeur s’est trouvé pour ce dernier opéra étaient infiniment moins favorables que celles des deux autres ; car les oppositions de sentiments et d’effets étaient les conséquences nécessaires de l’antagonisme des deux génies dans le sujet de Mobert te Diable ; et l’amour, cette source inépuisable, éternelle d’émotions de tout genre, fournissait dans les Huguenots d’admirables éléments de contraste avec les passions de sectes religieuses ; tandis que le fanatisme brutal et cruel qu’enfante un mysticisme

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sensuel prive d’intérêt quelques-uns des personnages du Prophète. Les angoisses maternelles, qui viennent, aux derniers actes de l’ouvrage, faire diversion aux violences dont les premiers sont remplis, sont la seule source d’émotion où le compositeur ait pu puiser pour les inspirations de son génie. Pour triompher des difficultés d’un tel sujet, il ne fallait pas moins que la puissance d’un talent du premier ordre, i

On ne saurait donc reprocher au compositeur le caractère sombre et un peu uniforme de sa partition. Si la grâce, la tendresse y font défaut, c’est au sujet du livret qu’il faut s’en prendre. Avant de donner une rapide analyse de la pièce, nous signalerons une fois de plus les licences que Scribe a prises avec l’histoire. Tout le monde sait que Jean de Leyde était un tailleur ; de son-plein gré, le parolier en fait un cabaretier.

Au premier acte, Fidès, mère de Jean de Leyde, vient chercher Bertha, jeune fille des environs de Dordrecht, fiancée à son fils. Le seigneur, comte d’Oberthal, dont elle est la vassale, s’oppose à ce mariage et retient prisonnières en son château Fidès et Bertha. Trois anabaptistes profitent de ce rapt pour soulever les populations contre le comte. Au second acte, Jean raconte aux anabaptistes des visions qui lui annoncent qu’il sera roi. Ces fanatiques voient en lui l’homme qui convient à leurs desseins et l’engagent à les suivre. Sur ces entrefaites, Bertha accourt, poursuivie par les soldats du comte j Jean la dérobe à leurs regards ; mais ceux-ci, furieux de se voir enlever leur proie, se saisissent do la mère de Jean et vont la frapper. À cette vue, Jean leur livre sa fiancée pour sauver les jours de sa mère ; mais il n’hésite plus et s’éloigne de sa chaumière avec les anabaptistes. L’action se passe, au troisième acte, dans le camp des anabaptistes, en Westphalie. Jean a vaincu les troupes envoyées contre lui ; les horreurs de la guerre civile l’invitent à se dérober à la mission qu’il s’est donnée, lorsque le comte d’Oberthal, devenu son prisonnier, lui apprend que Bertha s’est précipitée dans le fleuve pour lui échapper et qu elle s’est réfugiée à Munster. Jean décide qu’il en fera le siège. Au quatrième acte, Fidès, qui croit que son fils n’existe plus, a quitté sa chaumière et se trouve à Munster, où elle traîne des jours misérables en tendant la main. Elle y retrouve Bertha, déguisée en pèlerin. Informée do la mort de Jean, celle-ci prend la résolution de poignarder le prophète, auteur de tant de maux. Un second tableau montre l’intérieur de la cathédrale. Jean, environné de toute la pompe impériale, est revêtu des insignes de la puissance suprême et reçoit les hommages que la foule croit rendre à un envoyé de Dieu, lorsque la voix de sa mère se fait entendre ; elle a reconnu son fils. Le faux prophète va être démasqué. Le peuple hésite entre son idole et la pauvre femme. Jean méconnaît sa mère. Celle-ci a le courage de dire qu’elle s’est méprise, que Jean n’est pas son fils.

Le dernier acte est le plus riche en effets dramatiques, mais en même temps le plus faux ou point de vue historique, puisque Jean de Leyde fut jugé et condamné à mort. Scribe a préféré le faire périr volontairement, en Sardanapale. Fidès a été conduite dans un souterrain du palais par ordre de son fils. Jean vient l’y trouver, se jette à ses pieds, implore son pardon et est sur le point de se sauver avec elle. Bertha paraît une torche à la main. Elle va mettre le feu à une sorte de mine qui doit faire sauter le palais. Mais, à la vue de Fidès et de son fiancé, elle va partager leur fuite, lorsqu’un officier accourt pour annoncer à Jean que ses ennemis ont „ pénétré dans son palais. Bertha, à ces mots, reconnaît dans celui qu’elle aimait le prophète lui-même ; elle le maudit et se tue de désespoir. Dans un dernier tableau, on voit le prophète au milieu d’une scène d’orgie. Il laisse ses ennemis l’entourer et, après avoir fait fermer les grilles du palais, il le fait sauter et s’ensevelit avec eux sous les ruines. Il a fallu l’effort titanique du génie de Meyerbeer pour préserver sa partition du sort do Jean de Leyde. Ajoutons que, dans cet ouvrage en cinq actes, aucun personnage n’est intéressant, à l’exception d’une pauvre vieille ’ mendiante qui ne peut que gémir et se plaintes La magnificence du spectacle a cora-psfeê la pauvreté de conception du poëme. La ? scène des patineurs sur un lac glacé, au troisième acte, et l’intérieur de la cathédrale de Munster ont émerveillé les spectateurs. Le rôle du prophète a été le début de Roger sur notre première scène lyrique, et il l’a créé avec une intelligence remarquable. Ce rôle a été, pour cet artiste distingué, une source d’ovations nombreuses, mais aussi unecause de fatigue excessive qtii a abrégé la carrière du chanteur. M»» Pauline Viardot a chanté le rôle de Fidès avec un art et un sentiment dramatique excellents. M»» Castellan débutait dans celui de Bertha. Les anabaptistes ont été représentés par Levasseùr, Euzet et Gueymard, qui depuis a remplacé, bien imparfaitement, Roger dans le rôle de Jean. Les autres rôles ont été tenus par Bréuiond, Ferdinand Prévôt, Paulin, Guignot, Moiimer, Génibrel et Mmes Ponchard et Courtot,

La partition du Prophète est la plus longue du répertoire. Elle ne renferme pas rcoins de vingt-cinq morceaux, dont plusieurs sont