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dins paysagers, sur le bord des massifs, autour des bouquets d’arbres, dans les platesbandes, en bordures, sur les talus et les terrains en pente, au milieu des roeailles, etc. Elle produit toujours un bel effet. On en a obtenu une variété à fleurs doubles, une autre a fleura tout a fait roses. Cette spirée convient beaucoup pour la confection des bouquets.

Les tubercules de cette plante, quand ils Sont frais, exhalent une odeur analogue à celle des fleurs d’oranger. Leur saveur est amèreet astringente ; aussi sont-ils peu prof»res à l’alimentation de l’homme, bien qu’on es ait utilisés quelquefois dans les temps de disette. Ils renferment toutefois une assez grande proportion de fécule, qu’on pourrait en extraire avec avantage ; elle est bonne à manger, et convient d’ailleurs pour la fabrication de la colle et pour d’autres usages industriels. Ils contiennent aussi beaucoup de tannin, et peuvent servir au tannage. Les cochons en sont très-friands. On les a employés, en médecine, comme astringents, diurétiques ou incisifs, contre les diarrhées, la dyssenterie, l’hydropisie, la leucorrhée, les hémorroïdes et les scrofules ; on leur a même attribué des propriétés lithontriptiques, qui sont au moins tort exagérées. Les feuilles ont été vantées aussi contre l’hydropisie ; tous les bestiaux les mangent ; enfin, on les emploie pour le tannage. Les fleurs de cette plante, infusées dans le lait, lui donnent une saveur agréable.

Lu. &pirée barbe de chèvre (aruncus) a des feuilles amples, trois fois ailées, à grandes folioles ovales et dentées en scie, et des fleurs blanches, petites, mais très-nombreuses ; elle croît dans les régions montagneuses et boisées de l’Europe centrale. On la regarde comme astringente et vulnéraire. L’usage de cette plante est très-ancien ; c’est une des espèces médicinales que Charlemagne, dans ses cupitulaires, ordonne de cultiver dans ses jardins, La spirée du Kamtchatka habite le nord de la Russie d’Europe et d’Asie, où on la cultive quelquefois comme plante potagère ; on mange ses racines, ses feuilles et ses jeunes pousses. La spirée tumenceuse, à feuilles blanchâtres cotonneuses en dessous, et à fleurs roses, croît dans l’Amérique du Nord ; on emploie ses feuilles comme vulnéraires, aius’i que celles de la spirée américaine, qui est employée aussi pour le tannage. La spirée trifoliée se trouve aux États-Unis ; ses racines, connues sous le nom d’ipecacuanlia des Indiens, ont des propriétés cinétiques et sont usitées, dans le pays, comme vomitives. La spirée à feuilles d obi’r est un arbrisseau de 2 à 3 mètres, à fleurs blanches, qui croit au Canada ; ses rameau> servent à teindre les étoffes en jaune nantir, . Nous citerons, comme espèces ornemental s, les spirées crénelée, élégante, étalée, de -teeues, lisse, lancéolée, pubesesnle, de Fortme, etc.

SPIRÉE, ÉÉE adj. (spi-ré-é — vad. spirée). Bot. Qui ressemble ou qui se rapporte à la spirée.

— s. f. pi. Tribu de la famille des rosacées, ayant pour type le genre spirée, et élevée par plusieurs auteurs au rang de famille distincte, sous le nom de spiréaches.

SPIRÉINE s. f. (spi-ré-i-ne — rud. spirée). C’hiiu. Mauère colorante jaune des fleurs du la spirée ulmaire ou reine des prés.

— Encycl. Ou peut extraire la spiréine au moyen de 1 ether. On précipite par l’eau la solution éthéree et l’on dissout le précipité dans l’alcool à chaud ; celui-ci dépose, par le refroidissement, de la matière grasse. Ou filtre et l’on évapore la liqueur filtrée ; on fait dissoudre dans l’alcool, a plusieurs reprises, la spiréine qui se dépose ainsi.

C’est une poudre jaune et cristalline, insoluble dans l’eau, fort soluble dans l’éther et dans l’alcool ; les solutions concentrées sont vert foncé ; à l’état étendu, elles sont jaunes, et rougissent iégèrement le tournesol. Elle n’est pas volatile sans décomposition. Zâwig lui a attribué la formule (JSIH^O10 ; cette fuimule, qui correspond assez bien aux analyses, manque néanmoins de contrôle ; et même le carbone ost en quantité un peu trop forte dans les analyses.

L’acide azotique concentré la dissout à chaud avec une couleur rouge, et ne l’altère que par une ebullition prolongée, sous forme d’acide oxalique. L’acide suifurique la dissout sans altération, et l’eau la précipite intacte de cette dissolution. L’acide chlorhydrique est sans action sur elle. Le brome la décompose eu dégageant de l’acide bromhydrique, et eu produisant une masse rouge particulière, composée de plusieurs combi- : naisons. Distillée avec un mélange d’acide | suifurique et de peroxyde de manganèse ou i de bichromate de potasse, elle fournit de l’acide furuuque et de l’acide carbonique. Les j alcalis caustiques la dissolvent avec une cou- | leur jaune ; elle expulse l’acide carbonique quand ou la chauffe avec une solution de carbonate de potasse ; les acides l’en précipitent sans altération. Les solutions alcalines brunissent ù l’air et se décomposent avec assez de promptitude.

L’eau «.le baryte, le sulfate d’aluminium et l’émétique précipitent en jaune la solution alcoolique de la spiréine ; l’acétate de plomb

}t produit un précipite cramoisi qui noircit par a dessiccation. Ce précipite renferme du carbone, de l’hydrogène en petite quantité et uuo

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forte proportion de l’oxyde de plomb PhO8. Les sels ferreux précipitent la spiréine en vert foncé ; les sels ferriques la précipitent en noir ; les sels de zinc mélangés d’un peu d’ammoniaque donnent un précipité jaune soluble dans un excès d’ammoniaque. La combinaison avec l’oxyde de cuivre affecte une couleur vert de pré.

L’azotate d’argent ne précipite la solution alcoolique de spiréine que sous l’influence d’une addition d’ammoniaque, qui ne redissout pas le précipité noir ainsi produit. L’azotate mercureux donne un précipité brun jaunâtre qui passe rapidement au brun foncé. Le sublimé corrosif, le chlorure d’or et le perehlorure de platine ne font naître aucun précipité dans cette solution.

SPIRICELLE s. f, (spi-ri-sè-le — de spire, et du lat. cetla, chambre). Moll. Genre de mollusques, rapporté avec doute à la famille des cabochons, et dont l’espèce type est fossile dans les terrains miocènes.

SPIRiCULE s. m. (spi-ri-ku-le — dimin. de spire). Bot. Kilet mince, enroulé en hélice, dans l’intérieur des vaisseaux trachéens.

SPIRIDANTHE s. m. (spi-ri-dan-te — de spire, et du gr. anthos, fleur). Bot. Genre de plantes, de la famille des composées, tribu des sènécionées, dont l’espèce type croît dans l’Asie tropicale.

SP1RIDENT s. m. (spi-ri-dan — de spire, et de dent). Bot. Genre de mousses, dont l’espèce type, de très-grande taille, croît à Java et à Tuïti.

SP1B1D10N (saint), èvèque deTrimilhonte, né dans l’île de Chypre, mort en 348. Il possédait de nombreux troupeaux qu’il gardait lui-même. Spiridion se maria, eut une fille, puis vécut, dit-on, avec sa femme comme un frère avec sa sœur. Comme il était très-charitable, ses concitoyens le nommèrent évêque de TYimithonte ; il accepta ces fonctions, tout eu continuant à élever et à vendre des moutons, et assista aux conciles de Nicée (325) et de Sardique (347). La légende, qui lui attribue un certain nombre de miracles plus ou moins grotesques, raconte que l’empereur Constance l’appela auprès de lui pour le guérir d’une maladie, qu’il lit un voyage k Alexandrie pour y détruire les idoles, et qu’il lui suffit de les maudire pour qu’aussitôt elles fussent réduites en poudre, etc. Pendant la persécution de Galérius, il fut condamné aux mines et à la perte de l’œil droit. L’Eglise l’honore le 14 décembre.

Spiridion, roman par G. Sand (Paris, 1839). Spiridion a été écrit en grande partie et terminé dans la Chartreuse de Valdamosa, aux gémissements de la bise, dans le cloître en ruines, C’est en vain que dans ces’pages graves et dogmatiques, où le style ne dépouille parfois son austérité que pour s’élancer vers les hauteurs nuageuses d’un mysticisme de nouveau genre, on chercherait a. retrouver l’ardent poète A’Indiana, les cris du cœur et l’éloquence passionnée de Valentine, ici, point de femmes, point d’amour, mais des théories philosophiques et morales, écrites sous l’inspiration des idées de Lamennais et de Pierre Leroux.

Le sujet de Spiridion est fort simple. Un jeune homme, Angel, obéissant k ses pieux instincts, à sa ferveur religieuse, s’est fait admettre dans un couvent. Là, au lieu de rencontrer le calme et le recueillement qu’il souhaitait, il s’est trouvé en contact avec des moines grossiers, ignorants et sensuels, incapables de comprendre les aspirations généreuses, l’enthousiasme ardent de son cceur. Il avait fui le monde pour se soustraire aux préoccupations matérielles et échapper au tourbillon de la vie mondaine, et il se trouve mêlé dans le cloître à toutes les menées de ses compagnons. Un sourd désespoir s’empare de l’âme d’Angel et il va se jeter aux pieds du fère Alexis, vieux moine retiré dans un coin du couvent et qui, depuis longues années, dégoûté de la vie en commun par les mêmes raisons qu’Angel, vit solitaire dans la méditation et l’étude. Le Père Alexis accueille Angel, lui raconte les combats, les luttes qu’il a eu à soutenir pour l’apaisement de son âme, et, trouvant dans son nouveau compagnon la ferveur et la foi, il entreprend de lui faire concevoir une religion nouvelle, et pour cela il lui raconte l’histoire de Spiridion, le fondateur du couvent. Spiridion, lui aussi, dès sa jeunesse, s’était senti au cœur un ardent amour pour la religion ; d’abord, il avait penché pour les doctrines de Luther, puis la religion catholique avec ses magnificences et ses pompes avait séduit son imagination avide de poésie et d’idéal ; il avait alors abjuré la foi protestante et, désireux de mettre ’ son âme à l’abri des passions et des tumultes du nionde, il avait fonde un couvent pour s’y retirer et s’y livrer, dans une pieuse retraite, à la méditation et à l’étude. Mais bientôt ia dissipation, les querelles, les intrigues avaient force les portes du cloître et mis le désordre parmi les moines qu’il s’était uonnés pour compagnons. Il s’était vu forcé de s’isoler complètement, et pendant de longues années de recueillement, absorbé dans les réflexions et les recherches philosophiques, il en était arrivé à tomber dans un doute profond ; puis, poursuivant avec une énergie nouvelle la recherche de la vérité, il avait conclu au rejet du christianisme et à son remplacement par

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une religion basée sur un déisme pur, dont il avait exposé les principes dans un écrit qu’il avait t’ait renfermer avec lui dans son cercueil, la léguant à celui qui se sentirait assez fort pour aller chercher la vérité au sein de la tombe. Le Père Alexis a passé par toutes les souffrances morales, a soutenu les mêmes luttes que Spiridion ; comme lui, après de longues années de méditations dans le silence du cloître, il s’est vu eu face du doute et de la négation ; mais il m s’est jamais senti assez fort pour se faire l’héritier spirituel de son maître Spiridion. C’est Angel qui descend dans la tombe, ouvre le cercueil du philosophe et s’approprie le manuscrit qui révèle la religion nouvelle. Nous n’entreprendrons pas d’analyser les idées renfermées dans le prétendu livre de Spiridion ; c’est un mélange des théories du prêtre philosophe Lamennais et du socialiste poëte Pierre Leroux. Quant à la portion du livre qui renferme la peinture des luttes terribles entre la raison et la foi, dont les voûtes du cloître ont dû et doivent être encore témoins, elle est traitée de main de maître ; on y retrouve G, Sand avec les brillantes qualités de Son style et Sa connaissance profonde du cœur et de l’esprit humains.

SPIRIFÈRE adj. (spi-ri-fè-re — de spire, et du lat. fero, je porte). Hist. nat. Qui est muni d’une spire.

— s. m. Moll. Genre de mollusques braehiopodes, formé aux dépens des térébratules, et comprenant plusieurs espèces fossiles des terrains de transition.

— Encycl. Les spirifères ont une coquille fibreuse, souvent triangulaire, très-bombée. La grande valve est pourvue d’une aréa inférieure large, transverse et striée en travers ; la petite valve a un petit crochet el aussi une petite aréa linéaire. L’ouverture est mince, triangulaire, sans deltidium, et échuncre un peu la valve inférieure. La charnière est souvent longue et linéaire, pourvue, dechaque côté de l’ouverture de la grande valve, d’une dent qui entre dans une fossette de la valve opposée. L’appareil spiral est soutenu par une grande apophyse de la petite valve qui part à côté de la base de la charnière. Les ornements consistent ordinairement en côtes rayonnantes ; la coquille est, du reste, souvent lisse. La grande valve présente dans son milieu une grande dépression médiane qui correspond à un bourrelet de la petite valve. Les moules présentent des impressions profondes, correspondant aux apophyses internes. Les spirifères sont, en général, caractéristiques de l’époque paléozoïque. On en cite cependant quelques-uns dans le terrain triasique. Il y a près de cinquante espèces dans les terrains siluriens. Us augmentent beaucoup de nombre dans l’époque dévonienne et sont presque aussi nombreux à l’époque carbonifère. Le spirifère strialus atteint souvent une grande dimension et est caractérisé par sa forme triangulaire, sa charnière droite et ses côtes nombreuses et irregulières. Le spirifère glaber est au contraire lisse, de forme arrondie. Le spirifère cuspidatus est remnrquau’le, par «a grande aréa. Le spirifère lineatus ôst arrondi et presque lisse. Le terrain permîen a fourni quelques espèces, et au delà de l’époque triasique les spirifères ne sont plus représentés.

SPIRIFÉRIDE adj. (spi-ri-fé-ri-de — rad. spirifère), Moll. Qui ressemble à un spirifère.

— s. m. pi. Famille de mollusques fossiles, qui a pour type le genre spirifère.

— Encycl. Les spiriférides constituent une famille des mollusques brachiopodes. L’animal est fixé par un pédoncule qui passe par le crochet de la grande valve, comme dans le3 térébratulideS. La petite valve porte pour chacun des bras une armure compliquée, formée principalement d’une lame testacée, enroulée en une longue spirale très-caractéristique. Le test est tantôt fibreux, tantôt perforé. L’armure des bras distingue clairement cette famille. Les genres lui la composent appartiennent exclusivement aux époques anciennes du globe. Surtout développés dans la période paléozoïque, ils se continuent dans le trias, deviennent plus rares dans les terrains jurassiques et manquent complètement à partir de là. Trois de ces genres, spirifer, cyrius et spirigera, commencent à l’époque silurienne et se terminent à l’époque triasique. Trois sont spéciaux à l’époque paléozoïque, les spirigerina aux terrains silurien et dévonien, les setzia à ces terrains et au carbonifère, les unéites à l’époque dévonienne. Les koninckia caractérisent les schistes de Saint-Cassian. Les spiriferina paraissent appartenir exclusivement au lias.

SPIRIFÉRINE s. f. (spi-ri-fé-ri-ne — rad. spirifère). Moll. Genre de brachiopodes, de la famille des spiriférides.

— Encycl. Les spiriférines diffèrent des spirifères par leur coquille perforée. Leur aréa est peu circonscrite et large ; l’ouverture, placée sous le crochet, est triangulaire, sans deltidium et n’échancrant pas la petite valve. Elles ont parfois une cloison médiane sur la grande valve. Leur charnière est moins longue. La grande valve a toujours un sillon médian et la petite une côte simple correspondante, peu apparente. Les Spirijérines sont spéciales au lias, mais elles se sont peut-être prolongées un peu plus loin.

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SPIRIFORME adj. (spi-ri-for-me — de spire, et de forme). Qui est en forme de spire, en spirale : Organe spiriforme.

SPIRIGÉRE s. f. (spi-ri-jè-re — de spire, et du lat. gero, je porte). Moll. Genre de la famille des spiriférides.

— Encycl. Les spirigères, de !a famille des spiriférides, ont une coquille ovale, de structure fibreuse. La grande valve n’a pas d’aréa ; son crochet est recourbé et tronqué ; celui de la petite n’est pas caché. L’ouverture est petite et placée à l’extrémité du crochet, se continuant jusqu’à la charnière sans deltidium et arrivant parfois à s’oblitérer. Les caractères internes sont ceux des spirifères. Les spirigères ont commencé avec l’époque silurienne, se continuant dans la période dévonienne et dans les dépôts carbonifères. On en cite une dans le terrain pennien et aucune au delà de l’époque triasique.

SPIRIGÉRINE s. f. (spi-ri-jé-ri-ne — dimin. de spirigère). Moll. Genre de la famille des spiriférides.

— Encycl. Les spirigérines ont une coquille ovale, de structure libreuse et une grande valve sans aréa. Le crochet est court, saillant et entier. L’ouverture, petite et ronde, disparait parfois aussi. Elle est séparée de la petite valve par un deltidium de deux pièces soudées. Les ornements consistent le plus souvent en lignes saillantes dichotomiques. Les spirigérines paraissent spéciales à 1 époque paléozoïque et n’ont pas dépassé probablement la période dévonienne. Les plus anciennes appartiennent à l’étage silurien inférieur.

SPIRILLE s. f. (spi-ri-lle ; Il mil. — dimin. de spire). Infus. Genre d’infusoires en forme d’hélice, de la famille des vibrioniens, comprenant plusieurs espèces, qui vivent dans les infusions animales.

SPIRIQUE adj. (spi-ri-ke — rad. spire). Qui est en forme de spire.

SPIRIS s. f. (spi-riss — rad. Spire). Entom. Genre d’insectes lépidoptères nocturnes, do la tribu des chélonides.

SPIRITE s. (spi-ri-te — du lat. spirilus, esprit). Personne qui passe pour avoir la faculté de se mettre en relation avec les esprits, particulièrement avec les âmes des morts. Il l’artisan du spiritisme.

— Adjectiv. : Qui a rapport aux spirites ou au spiritisme : Une revue spiritb.

— Encycl. V. spiritisme.

Spirite, roman de Théophile Gautier (1866, in-12). Les extravagances du spiritisme prennent dans ce livre, merveilleusement écrit des teintes si poétiques et si vaporeuses, qu’on s’y laisse aller comme aux plus séduisantes créations. Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que l’auteur, sceptique et matérialiste, ne croyant pas un traître mot des choses surnaturelles auxquelles son imagination prêtait la vie, ait pu si bien entrer dans la peau d’un spirite convaincu ; ses con ceptions idéales dépassent de beaucoup la fantasmagorie des prétendus adeptes. Voici comment ce spirituel écrivain a encadré sa fiction.

Un élégant sportsman parisien, Guy do Malivert, estétendu dans unexcellent fauteuil près de sa cheminée, ou flamboie un bon feu. On est en hiver ; la neige récemment tombée assourdit le roulement lointain des voilures. Ce soir-là, Guy devait aller prendre le thé chezMnWYmbercourt, jeune elriohe veuve, dont le monde le croit amoureux ; mais, après dîner, la nonchalance l’a envahi ; il s’est senti si bien chez lui, qu’il a reculé à l’idée de s’habiller et de sortir par sept ou huit degrés de froid, malgré la pelisse et le manchon d’eau bouillante placés dans sa voiture. > Assoupi par la douce température de la chambre, où voltigeait la bleuâtre et odorante fumée de deux ou trois cabanas, dont les cendres remplissaient une petite coupe de bronze antique chinois, au pied en bois d’aigle, posée à côté de lui sur le guéridon qui supportait la lampe, if commençait à sentir rouler sous ses paupières les premières poudres d’or du sommeil ; la porte s’ouvrit avec précaution, et un domestique parut, tenant sur un plateau d’argent une lettre mignonne, parfumée et cachetée.d’une >ievise bien connue de Guy. «C’était un billet de Mme d’Vnjb’ercourt, qui lui rappelait la promesse de venir chez elle prendre une tasse de thé. Il se décide à envoyer un mot d’excuse et se met à écrire ; mais sa main, prise d’impatiem es, semble vouloir se passer d’ordre, et, qui : id il relit ce que sa main vient de tracer, il est très-étonné d’avoir écrit absolument sans conscience dix ou douze lignes dont le sens est une ru[iture. Impatieuié, il s’habille pour se rendre chez M"" d’Yinbercourt. Comme il allait sortir de sa chambre, il croit entendre un soupir, mais si faible, si léger, si aérien, qu’il fallait le profond silence de la nuit pour que l’orei.le put le saisir. Ce soupir l’arrête un instant et lui cause cette impression que ie surnaturel fait éprouver aux plus braves. Tout en roulant dans sa voiture, Malivert ne peut s’empêcher de penser au soupir mystérieux qu’il a entendu ou cru entendre. Un instinct secret lui affirme que ce soupir n’était dû à aucune des causes naturelles auxquelles son scepticisme pour 128