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verticillécs, a fleurs monopétales, bleuâtres, disposées en cyme ombelliforme terminale et auxquelles succèdent des fruits composés de deux petites coques indéhiscentes et surmontés par le calice persistant. Ce genre ne comprend qu’un petit nombre d’espèces, qui habitent l’Europe. La shérai die des champs est une plante annuelle, à racine pivotante, à tiges striées, hautes de 001,10 au plus. Elle est très-répandue dans toute la France et abonde surtout dans les champs incultes et les jachères. Elle fleurit de très-bonne heure, même avant la fin de l’hiver, et fournit un pâturage, peu abondant, il est vrai, aux moutons, aux chèvres et aux chevaux, qui la mangent volontiers,

SHERBORNE, ville d’Angleterre, comté de Dorset, k 27 kilom. N.-O. de Dorchester, sur l’ivel, qui la divise en deux parties appelées Sherborne et Castleton ; 4,975 hab. Oolléjre occupant les bâtiments d’une ancienne abbaye. Fabrication de soieries, toiles, bonneterie. Cette ville, agréablement située, possède une église que l’on considère comme unft des plus belles de cette partie de l’Angleterre, et où l’on voit des spécimens des différentes époques d’architecture, depuis les Normands jusqu’au xvie siècle. Aux environs, beau château des comtes de Digby.

SHERBURN, bourg et paroisse d’Angleterre, comté et à 20 kilom. S.-O. d’York (West-Riding) ; 3,800 hab. Récolte et commerce important de chanvre, prunes et cerises.

SHERBURN, bourg des États-Unis d’Amérique, dans l’État de New.-York, à n kilom. N. de Norwich ; 3,500 hab.

SHËRBURMÎ ou SHIRBURN (sir Edward), poète anglais, né k Londres en 1G18, mort dans la même ville en 1702. Après avoir voyagé sur le continent, il succéda, en 1641, à son père dans le grade d’intendant de l’artillerie, puis fut cassé par le Parlement pendant la guerre civile et emprisonné pour ses opinions royalistes. Ayant recouvré la liberté, il alla rejoindre Charles I«r, sous les ordres duquel il combattit. Ses biens furent confisqués et, en 1646, il revint à Londres, où il vécut obscurément, en ayant soin de se cacher. Il s’adonna alors à la poésie, devint intendant de lord Saville, puis accompagna un de ses élèves sur le continent de 1654 à 1059. Lors de la restauration des Stuarts, il fut réintégré dans sa charge, qu’il perdit de nouveau pour refus de serment à Guillaume 111 (1688), et il acheva son existence dans la misère. On lui doit : Medea, tragédie (1648, in-8<>) ; Poems and translations (Londres, 1051, in-8o) ; The Sphère of Manilias (1675, in-fol.) ; Troades, tragédie (1679, in-4o).

SHERIDAN, bourg des États-Unis d’Amérique, dans l’État de New-York, sur le lac Erié ; 2,275 hab.

SHERIDAN (Thomas), acteur et littérateur anglais, né à Quilca (Irlande) en 1721, mort k Margate en 1788. Sans ressource à la mort de son père, qui avait été successivement pasteur et maître d’école, il embrassa la profession théâtrale, joua pendant quelque temps à Covent-Garden (1744), puis dirigea pendant huit ans le théâtre de Dublin (1746-1754) et se voua ensuite exclusivement à l’enseignement de la déclamation. Il professa a Londres, à Oxford, à Cambridge et en Écosse des cours fort suivis. Lorsque George III monta sur le trône, il obtint une pension. Par la suite, il dirigea pendant trois ans le théâtre de Drury-Lane, dont son fils était devenu propriétaire. Thomas Sheridan avait une idée rixe ; il était profondément convaincu que le moyen de régénérer le genre humain était do le rendre éloquent, et, eu conséquence, il pensait que le premier des arts était la déclamation. Il exposa ses idées à ce sujet dans un ouvrage intitulé Drilish éducation, the source of the disorders in Great Britaiu (1755, in-8o). On lui doit, en outre : Diclionary of tlie Jinglish tangiiage (nSO, 2 vol. in-4») ;Life of J, Swift (1864, iu 8°) ; Course of oratoricul lectures.

SHERIDAN (Frances Chamberlaine, dame), romancière et auteur dramatique anglais, femme du précédent, née en Irlande en 1724, morte à Blois en 1766. Elle écrivit en faveur de Sheridan, en 1754, une brochure à propos des troubles qui avaient éclaté au théâtre de Dublin dirigé par ce dernier, et Sheridan reconnaissant lui donna son nom. C’était une femme aimable et spirituelle qui a laissé divers écrits : Memoirs of Sidney Diddulph (Londres, 1761, 5 vol. in-8o) ; History of Nourjahad (Londres, 1767, in-12), romans qui ont été traduits en français, et deux comédies, The Discovery et The Lape.

SHERIDAN (Richard-Briiisley-Butler), célèbre auteur dramatique et homme politique anglais, fils des précédents, né à Dublin le 30 octobre 1751, mort à Londres le 7 juillet 1816. Sa mère dirigea sa première éducation et essaya vainement de développer son intelligence, qui paraissait obtuse. À Dublin, puis au collège d’Harrow, où il fit ses études, il laissa de lui une pitoyable impression à ses professeurs, qui ne trouvèrent dans le jeune Sheridan qu’un écolier profondément paresseux et sans aucune disposition pour l’étude. Se ne fut que lorsqu’il vint habiter Londres a/ec sa famille que cet esprit, jusqu’alors presque ferm/ commença à se développer et

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à regagner tout le temps perdu. L’amour fut pour beaucoup dans cette métamorphose, qui devait donner à l’Angleterre un des plus grands talents dont elle s’honore. Ne sachant quelle profession adopter, il venait de faire avec ses amis une traduction d’Aristénêie et menait une existence des plus oisives, lorsqu’il entendit un jour, à Bath, une cantatrice de seize ans, miss Elisabeth Linley, dont la beauté égalait le talent. L’obscur jeune homme s’éprit de la plus vive passion pour la jeune cantatrice, autour de laquelle s’empressaient les adorateurs. Un certain capitaine Mathews, repoussé par la jeune fille, voulut s’en venger en faisant paraître dans un journal un article diffamatoire sur Elisabeth. Sheridan prit aussitôt fait et cause pour celle qu’iL aimait, provoqua, en duel le capitaine, qu’il désarma, et le força k signer une rétractation. Mais Mathews, furieux, provoqua à son tour Sheridan à une nouvelle rencontre. Le duel s’engagea au pistolet, se continua à l’épèe et se termina par une lutte a coupa de poing. Miss Elisabeth, informée de ce qui venait de se passer, ne resta pas insensible aux marques d’amour que venait de lui donner son défenseur. Sheridan voulut l’épouser ; mais les parents des.deux jeunes gens s’opposèrent à cette union, et un beau jour l’amoureux couple quitta l’Angleterre et se rendit en France. Là, Sheridan épousa secrètement miss Linley, qu’il dut, faute de ressources, ramenerau bout de quelque temps dans sa famille. M. Linley continua à ne pas vouloir de lui pour gendre, et ce ne fut qu’en 1773 qu’il parvint à arracher enfin un consentement et h contracter un mariage public. Il ne voulut plus que sa femme chantât sur un théâtre et, comme il était sans fortune, il résolut de se créer des ressources en écrivant des œuvres dramatiques. Ses premiers essais, les Rivaux (1774), le Jour de Saint-Patrice (1774), la Duègne (1775), commencèrent sa réputation. Par suite d’un arrangement avec le célèbre acteur Garrick,

il devint, en 1776, directeur du théâtre de Drury-Lane et gagna alors beaucoup d’argent. L’année suivante, il fit représenter l’École de la médisance (1777), comédie dans laquelle se trouve une peinture piquante des mœurs anglaises et qui lui valut d’être proclamé le premier auteur dramatique de son temps. Cette même année, Sheridan donna k son théâtre le Relaps, pièce de Vanbrugh qu’il avait arrangée, et, en 1779, lo Critique, spirituelle et amusante comédie dont le succès fut très-grand.

À cette époque, Sheridan était en complète possession de la renommée. Il gagnait beaucoup, mais, prodigue k l’excès et adonné à la déplorable passion du jeu, il se trouvait comme toujours dans une situation pécuniaire embarrassée. Ce fut alors que Fox, son ami, l’engagea a profiter de sa popularité pour se lancer dans la carrière politique. Nommé lors des élections de 1780 membre de la Chambre des communes par le bourg de Stufford, il alla siéger parmi les whigs et ne tarda pas à prendre rang parmi les défenseurs les plus ardents de la liberté. « Avec une ample part de renommée littéraire, mais non pas assurément de celle qui promet le plus un homme d’État, dit lord Brougham, avec une très-mince provision de connaissances de quelque utilité dans les affaires politiques, avec une naissance et une position sociale peu propres a obtenir la considération du pays le plus aristocratique de l’Europe, fils d’un acteur et lui-même directeur de théâtre, il entra duns ce Parlement alors éclairé par le vaste savoir, non inoins que fortifié et embelli par la hauté réputation de Burke et soumis à l’empire d’orateurs accomplis, tels que Fox et Pilt. Son premier essai fut modeste et ne fut pas heureux. Sans porter trop loin ses prétentions, il échoua dans son humble tentative... Ce qui lui manquait en talents acquis et en facilité naturelle, il y suppléa par une industrie infatigable. Dans certaines limites et avec un objet déterminé en vue, aucun labeur ne pouvait l’abattre ; nul ne pouvait travailler, pendant un temps, avec une application plus active et plus soutenue. Par une attention constante aux moindres détails et aux entretiens des eomitès secrets ; par une diligente assiduité à tous les débats-, par des relations habituelles avec tous les agents du drame politique, depuis les chefs de parti et les cercles à la mode jusqu’aux pourvoyeurs de discussions quotidiennes pour le public et aux rapporteurs des séances parlementaires, il s’accoutuma à une aisance d’élocuiion absolument indispensable pour tous, excepté pour les génies supérieurs, et même presque nécessaire à ceux-là, et il acquit tout ce qu’il posséda jamais d’instruction pratique ou tout ce que ses discours en décèlent. Par ces degrés, il s’éleva au rang d’orateur de premier ordre et d’improvisateur aussi habile que le défaut de promptitude et le besoin de préparation pouvaient le permettre. •

À son entrée au Parlement, il y parla peu et rarement. Il se trouvait plus à l’aise dans les réunions privées et dans les clubs et faisait une guerre acharnée au cabinet de lord Nortb, soit dans des pamphlets, soit dans des articles publiés dans l’Englishman. Lorsque les whigs arrivèrent au pouvoir en mars 17S2, il l’ut nommé secrétaire d’État des affaires étrangères ; mais, au mois de juillet suivant, le cabinet Rockinghum donna sa démission et Sheridan redevint simple député. Il lit

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alors paraître le Jésuite, journal satirique dans lequel il continua à attaquer les tories de la façon la plus acerbe et la plus mordante. À la suite d’une nouvelle crise ministérielle qui ramena les whigs aux affaires (avril 1783), Sheridan reçut le poste de secrétaire du trésor, dont il dut se démettre au mois de décembre suivant. Le jeune Pitt, devenu ministre, trouva en lui un redoutable adversaire. Comme il le raillait un jour sur son origine théâtrale, Sheridan l’écrasa de sa mordante ironie et désigna le ministre sous le nom A’Angry boy (le petit garçon en colère), surnom qui lui resta longtemps. À cette époque, il s’éleva par son éloquence au rang des Fox, des Burke et des Pitt. Lors du procès d’Hastings, gouverneur de l’Inde, il prononça contre lui, le 7 février 1787, un célèbre discours, regardé comme le chef-d’œuvre de la tribune anglaise et au sujet duquel Pitt disait : 0 Sheridan a dépassé l’éloquence des temps anciens et des temps modernes. » Devenu un des familiers du prince de Galles, dont il égayait par ses saillies les réunions intimes et qui lui fit donner par la suite la lucrative sinécure de receveur général du duché de Cornouailles, il se prononça pour qu’on conférât à ce prince la régence et les pouvoirs royaux lorsque George III, frappé d’aliénation mentale, fut hors d’état de gouverner.

Ce fut avec enthousiasme que Sheridan accueillit les grandes réformes de la Révolution française, dont il se fit constamment le défenseur contre les attaques passionnées de Burke. En 1792, il perdit la femme qu’il avait tant aimée et épousa, trois ans plus tard, la fille du doyen de "Winchester, miss Ogle, qui lui apporta une belle fortune, mais avec laquelle il fut loin de trouver le bonheur domestique. Pour se distraire de ses chagrins, il se livra plus que jamais aune vie de dissipation et de désordre, et se trouva plongé dans de nouveaux embarras d’argent qu’il cherchait à oublier dans le vin. En 1798, il fit jouer k Drury-Lane deux pièces imitées de Kotzebue, Pizarre et Misanthropie et repentir, dont le succès fut énorme. Depuis quelque temps, il avait acheté le beau domaine de Polesden, où il songeait à se retirer, lorsque l’arrivée de Fox au ministère le rappela aux affaires. Il fut nommé membre du conseil privé et trésorier de la marine (1806) ; mais à la mort de Fox, qui survint peu après, il perdit ces deux fonctions. Son caractère d’homme politique ne l’empêchait pas de rester à la tête de Drury-Lane ; mais, ne pouvant y donner tous ses soins, il le voyait déchoir. Les affaires personnelles de Sheridan étaient des plus embarrassées, lorsque l’incendie du théâtre, en 1809, précipita sa ruine. Non-seuloment il n’eut plus les ressources nécessaires pour se faire élire député, mais des créanciers avides le poursuivirent à outrance. Avec la gène et la vieillesse, il se vit abandonné de ceux qui l’avaient recherché ; les bourses se fermèrent et il fut plongé pour dettes dans une prison dont il ne sortit que par la libéralité de ses médecins, les docteurs Bain et Baillie, les seuls amis qui, avec Rogers et Thomas Moore, lui restèrent rideras dans le malheur. A su mort, ses restes furent déposés à Westminster, k côté des hommes illustres dont l’Angleterre s’honore. On lui fit des funérailles pompeuses ; elles donnèrent lieu k une anecdote trop curieuse pour ètro passée sous silence. Au moment où le cercueil allait être placé sur le char funèbre, un huissier vint saisir le défunt, en vertu d’un mandat de prise de corps, pour une dette de 500 livres sterling, et il fallut que Canninget iord Sidmouth payassent sur-le-champ cette somme pour empêcher que la cérémonie ne fût suspendue.

Dans les Mémoires qu’il a écrits sur Sheridan, Thomas Moore cite le jugement suivant de lord Byron sur le célèbre auteur de l’École de la médisance : « Lord Holland m a raconté un trait curieux de sensibilité de Sheridan. L’autre soir, chacun de nous exprimait son opinion sur lui et sur d’autres hommes marquants. Je dis, pour ma part, que tout ce que Sheridan avait fait ou tenié de faire avait toujours été la chose par excellence, la meilleure eu son genre. li a écrit la meilleure comédie (l’École de la médisance), le meilleur opéra (la Duègne, bien supérieur, selon moi, à l’opéra du Gueux), la meilleure farce (le Critique), qui n’a d’autre défaut que d’être une trop bonne pièce pour une pièce de second ordre ; le meilleur monologue (celui sur Garrick), et, pour couronner le tout, il a prononcé le meilleur discours oratoire (le célèbre Begum speech) qui ait jamais été conçu ou entendu dans ce pays. Quelqu’un répéta ceci à Sheridan le lendemain, et, en l’entendant, il fut ému jusqu’aux larmes. Pauvre Brinsleyl si ce furent des larmes de plaisir, j’aime mieux avoir dit ce peu do mots sincères que d’avoir écrit l’Iliade un d’avoir composé sa belle Philippique. Sa charmante comédie ne me fit même jamais autant de plaisir que j’en eus à apprendre qu’un de mes éloges lui avait causé un moment de satisfaction. » L’esprit de Sheridan était un

mélange d’insouciance et de vivacité, d’activité et de paresse. Il excellait dans l’art de renvoyer à ses adversaires les traits qu’ils lui lançaient, et il les battait presque toujours avec leurs propres armes. Des qu’il appliquait sérieusement son intelligence à l’examen d’une question, il en saisissait rapide SHER

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ment toutes les faces, et personne ne savait mieux que lui profiter d’un avantage. Il n’avait pas une conviction passionnée, mais raisonnée et spirituelle qui lui laissait toute sa liberté d’esprit et lui permettait de choisir de sang-froid ses moyens d’attaque et de défense. Son instruction était très-bornée, et il lui arrivait souvent de faire les recherches les plus simples au moment même où il en avait besoin ; mais il savait jusqu’où il pouvait s’aventurer et allait rarement au delà. Les Œuvres dramatiques de Sheridan ont été publiées avec une notice par Thomas Moore (Londres, 1821, 2 vol. in-8o). Ses comédies ont été traduites en français. Il existe une douzaine de traductions sous divers titrea de son École de la médisance. Son Théâtre complet a été traduit par Bonnet (1836, 2 vol. in-8") et par B. Laroche (1841, in-8o). Quant à ses discours politiques, ils ont été publiés à Londres (1816, 5 vol. in-8o, et 1842, 3 vol. in-8"). Enfin, on a publié sous le titre de Sheridiaua un recueil de la plupart de ses mots spirituels et de ses piquantes saillies. — Son frère aîné, Charles-Francis Shkridan, devint membre de la Chambre des communes, fut secrétaire du ministre anglais à Stockholm et fit paraître une Histoire de la réuolution de Suède en 1772, -laquelle a été traduite en français par Bruysel (1783, in-S°J.

Sheridan (MÉMOIRES DK), par Thomas

Moore (Londres, 1825). Cet ouvrage n’est pas une autobiographie. Le rédacteur de ces Mémoires a puisé largement dans les papiers de Sheridan. Malheureusement, un ami, même le plus intime, ne pouvait remplacer le héros du livre pour l’exécution d’une tâche de ce genre ; comment aurait-il pu s’emparer de tous ses souvenirs, pénétrer les plus secrets sentiments de son âme, rendre compte enfui de toutes ses actions ? Sheridan avait obtenu dans la société des succès brillants. On peut faire bon marché de ses exploits mondains, mais on regrettera toujours de n’avoir pas reçu sans intermédiaire les pensées et las observations d’un orateur patriote, d’un écrivain dramatique, qui marquait parmi les hommes les plus illustres de son pays et de son temps. Moore a tiré parfois des choses curieuses des papiers de Sheridan ; mais il aurait pu y laisser des détails dont l’importance s’est évanouie. On n’embrasse pas bien toute l’époque, dont le grand caractère est en quelque sorte noyé dans une foule de petites circonstances trop longuement exposées. On reconnaît néanmoins torigine de l’ouvrage à la manière dont il est composé : en effet, la partie littéraire y est traitée avec plus de soin que la partie politique ; les dissertations 3’sont plus fréquentes que les récits. Sheridan avait coutume de travailler longtemps les écrits qu’il destinait k voir le jour ; avant de paraître à Drury-Lane et d’exciter l’enthousiasme général, son École de la médisance avait subi mille métamorphoses ; ses notes en font foi ; on y trouve consignées toutes les inspirations de l’auteur, toutes les corrections que son goût et son jugement lui dictaient chaque jour. C’est en les rapprochant que Moore est parvenu a tracer l’histoire des compositions littéraires de Sheridan, k décrire les travaux de son génie. Quelquefois aussi il y a puisé des éclaircissements sur divers événements de la vie de son héros. Mais il laisse encore bien des faits dans le doute et dans l’obscurité. Toutefois, il a fidèlement retracé la vie aventureuse de l’homme singulier que Byron a jugé avec une bienveillance si rare chez le grand poëte. L’admiration et la partialité n’ont point égaré son propre jugement. Il a peint, avec une parfaite exactitude, le brillant, l’ingénieux Sheridan, fameux par ses talents, dégradé par ses désordres ; comblé des dons de la nature et négligé dans son éducation ; distingué par la noblesse de ses inclinations, et conduit à la misère par ses folies et son imprévoyance. Sous sa plume, la morale ne perd jamais ses droits.

SHERIDAN (Philippe), célèbre général américain, né k Albany, dans l’État de New-Ynrk, en 1831. Il appartient à une pauvre famille irlandaise, avec laquelle il alla s’établir, en 1834, k Somerset, dans l’État d’Ohio, où il reçut une éducation première très-incomplète. Sheridan était, depuis quelques années, apprenti chez un mercier, lorsque le hasard le rapprocha du générai Ritchie, représentant du district au Congrès, qui s’intéressa à lui et lui fit obtenir une place de cadet k l’École militaire de Westpoint. Après avoir terminé ses études, Sheridan entra comme lieutenant dans un régiment de cavalerie k Oregon, fit pendant longtemps la guerre aux Indiens et ne parvint que très-lentement.au grade de capitaine. Ses supérieurs n’avaient pas une haute idée de ses capacités ; aussi, au début de la guerre de sécession, le laissèrent-ils k sa garnison, sur la côte de l’océan Pacifique. Ce ne fut que vers la fin de l’année 1861 que, sur ses instances, on l’appela dans le Missouri, où il fut attaché à l’administration militaire ; enfin, le manque d’officiers expérimentés dans les troupes volontaires décida le général Halleck k l’appeler, en mai 1862, au service actif dans l’armée de l’Ouest devant Corinthe. Sheridan fit d’abord, sous les ordres de BuelJ, la campagne du Kentucky contre Bragg, et, k la tête d’une brigade, prit une part glorieuse Iv la bataille de Perryville. Sous Rosencrans,

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