Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 15, part. 3, Vamb-Vi.djvu/313

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passaient dans leurs villes. 0 Vin d’ost, Impôt qu’on levait pour frais de gueri’e. ij Vin du clerc, Présent que le plaideur offrait au secrétaire du tribunal où il avait été jugé, durant le moyen âge. il Vin du curé, Présent en nature ou en argent que l’on faisait au curé pourlebaptêmed’unenfant. il Crieurde corps et de vins, Crieur public qui annonçait les enterrements et l’arrivée des vins. Il Coureur de vin, Employé qui transportait le vin à la suite du roi.

— Féod. Droit de vin, Droit dû au seigneur, outre les droits ordinaires, en cas de vente d’héritage, et qui ne pouvait s’élever à moins de 16 pintes de vin : Le couvent de Farmoutier percevait le droit de vin sur les habitants de Jouy. il Droit de vins et ventes, Droit que payait au seigneur censuel celui qui achetait un héritage censuel.

— Jurispr, Vin de messager, Somme que l’on allouait a la partie qui obtenait gain de cause, pour la dédommager de ses propres frais de voyage et de ceux des messagers qu’elle avait du expédier, dans le cas où elle demeurait hors de la juridiction où l’affaire avait été jugée.

— Pharm. Infusion pharmaceutique dans laquelle le vin joue le rôle d’excipient ; Vins médicinaux. Vin de quinquina.

— Alchim. Vin des sages. Mercure.

— Arboric. Poire de vin, Variété de poire.

Encycl. -Hist. Il serait impossible de rien dire, même d’approximatif, sur les premières origines du vin. Il parait hors de doute que la vigne, comme la plupart des arbres à fruit, est originaire de l’Orient ; mais si l’on connaît à peu près l’époque de son introduction en Gaule, on ignore absolument la date de son importation en Grèce et même en Italie. Quant à la vinification, les plus anciens documents nous la montrent connue dans tous les pays qui possèdent la vigne. Nous ne pouvons citer que pour mémoire les traditions qui font de Saturne, de Bacchus ou de Noé les inventeurs de la fabrication du vin, et nous devons renoncer à hasarder aucune conjecture sur ce point obscur de l’histoire de l’industrie vinicole.

Le vin, cependant, est fréquemment cité dans les livres juifs, et le peuple hébreu semble avoir cultivé la vigne avec un certain succès. La vigne prospérait admirablement en Palestine, et lorsque l’auteur de l'Exode nous raconte que deux, hommes étaient nécessaires pour porter une grappe cueillie dans ce pays, il ne s’écarte peut-être pas autant de la vraisemblance qu’on pourrait le croire au premier abord. Strabon affirme que, dans ces pays, les grappes atteignaient 2 pieds de longueur.

Les Grecs ont excellé, de toute antiquité, dans l’art de fabriquer le vin, Virgile, au livre II des Géorgiques (vers 89 à 102), énumérant les différents vins ou raisins de la Grèce et de l’Italie, nomme les vignobles de Méthymne ou de Lesbos ; ceux de Psythie, canton de la Grèce dont la situation n’est pas bien connue, produisant trois sortes de raisin, le rouge, le précoce et le gris, qu’il appelle lageos, parce que, dit-on, les lièvres (lagôoi en grec) en étaient très-friands, ou bien parce que sa couleur ressemblait à la nuance de leur poil. « Son jus, dit le poête, fait plus d’une fois bégayer et chanceler le buveur. » Il célèbre les vins d’Amminée, en Thessalie, dont il vante le corps, les appelant firmissima vina, mais qu’il déclare inférieurs à celui du Tinole, montagne de la Grande Phrygie, et à celui de Phanée, qu’il considère comme le roi des vins. Il cite l’Argitis, ou petit Aigos, vignoble qui ne le cédait à aucun autre pour l’abondance des fruits et la bonne conservation du vin. Le délicieux raisin de Rhodes se servait au dessert, et son vin était préféré pour les libations aux dieux. Il nomme un gros raisin rouge, qu’il appelle bumaste, probablement le même qu’on fait figurer, encore aujourd’hui, au dessert à Florence. Virgile, dans son énumération, comprend, en outre, deux vins blancs, celui de Thasos, lié de la mer Egée, et celui des environs du lac Maréutis, en Égypte. Aux vignes de l’un convenait un terrain léger ; aux vignes de l’autre, un terrain gras. Le poète conclut en affirmant qu’il ne serait pas plus possible de dire combien il existe d’espèces de raisin et d’en rapporter les noms, que de connaître combien de grains de sablo sont soulevés dans les plages de la Libye ou combien de flots se brisent sur les côtes de la mer Ionienne, quand le souffle impétueux do l’Eurus se précipite sur les navires.

Pline affirme que Démocrite seul avait cru jadis qu’il était possible de compter les différentes espèces de vin. Néanmoins, sous l’empereur Commode, le grammairien Pollux dressa une assez longue liste de raisins, en assignant à chacun un nom ou une qualité : l’elæeosamaxis, le méline, ou jaune comme un coing ; l’écarlate, le silvestre, l’alopécien, ou ressemblant à la queue du renard ; le gracieux, le réjouissant, le vineux, l’enivrant ; les raisins de Crète, de Rhodes, de Coronée (Coron, dans la Messénie), de Syrie, d’Egypte, de Libye, de Nicostrate, de Byblia, de Pirgé (en Pamphylie) ; le brun-noir ou de Pella (Macédoine), celui de Samos, qui croissait dans un terrain pierreux, et celui de Lemnos, rouge comme l’argile de l’Ile des Cyclopes (Onomasticon, 1. VI, ch. xi). À cette


nomenclature ajoutons les eugenix, grappes de raisin avec lesquelles on obtenait, suivant Columelle, un vin très-fort ; le raisin d’Héria, en Arcàdie, et celui de Cérannia, ou plutôt de Cérynia, canton limitrophe à cette contrée. Elien dit que, du raisin d’Héria, on faisait un vin qui ôtait aux hommes la raison et rendait les femmes fécondes ; de celui de Cérynia, un vin que les femmes avaient coutume de boire lorsqu’elles désiraient avorter (Histoires diverses, 1. III, c. sc|vi}}). Dressons, à notre tour, par ordre alphabétique et au moyen des documents épars dans les auteurs, un relevé sommaire de tous les vins les plus fameux de l’antiquité.

Les principaux vins grecs, soit d’Europe, soit d’Asie, étaient : celui d’Amminée ; ceux d’Argos et d’Argitis, le premier moins estimé que le second, qu’on appelait aussi petit argos ; levin de Chio, doux, moelleux, non moins prisé que le falerne par les Romains, qui l’employaient comme condiment dans certains plats, et dont il y avait deux qualités supérieures, l’arvisium et le phanée, ainsi nommées de deux promontoires de l’île où étaient situés ces deux vignobles ; le vin de Cos, dont la lie était un stimulant qui ouvrait l’appétit des convives ; celui de Crète, d’où s’exhalait l’arôme des fleurs ; ceux d’Halicarnasse et de Myndus, en Carie, très-renommés ; de Lesbos, inoffensif, quoique chaud, mais suave et délicat, préféré presque partout aux meilleurs crus de la Grèce et proclamé par Aristote plus agréable que le vin de Rhodes ; do Lydie ou Mœonie, dont Cyrène offrit une large coupe à son fils Aristée, pour en faire des libations à l’Océan ; de Magnésie, ville de Thessalie, léger, mais liquoreux ; de Peparethus, île de la mer Egée, âpre, assez amer, et qu’Aristophane proscrit, dans les Thermophories, comme un aphrodisiaque, ainsi que le vin de Thasos, la pramne et le chio ; de Pramue, sec et dur, mais généreux, consacré à Cérès, dit Elien, et qu’on trouve dans Athénée qualifié de vin de Lesbos, quoiqu’il tirât son nom d’une colline de l’île d’Icare, dans la mer Egée ; de Psythie, qui n’était pas seulement un vin gris et fumeux, mais aussi une espèce de malvoisie, exprimée des grappes qu’on avait laissé cuire au soleil sur la vigne ; de Rhodes, vin de dessert, comme celui de Lesbos ; de Syracuse, ainsi nommé d’un roi de cette ville, originaire de l’Argolide, qui en transporta le plant en Italie ; de Thasos, dont Epylicus, dans Athénée, dit : « Versez-moi, comme antidote, du vin de Thasos ; quelque chagrin qui me ronge le cœur, dès que j’en bois, je renais à la vie. » Ce vin était si fort, cependant, qu’il n’était potable, disait-on, qu’après avoir été coupé de 24 parties d’eau. Citons, enfin, le vin du Tinoie, que Virgile met presque sur la même ligne que le phanée.

L’Italie n’était pas moins riche en vignobles que la Grèce et l’Asie Mineure. Le vin d’Albe était fourni par un raisin à peau tendre, qu’on durcissait à la fumée. Nasidienus, dans une satire d’Horacef cite ce vin h cô.té du falerne, et Horace invite Phyllis à venir boire en sa compagnie du «» ?’« d’Albe, âgé de plus de neuf ans. » On comprenait sous le nom de vins des Alpes tous les crus de cette vaste région qui embrasse à la fois le pays des Grisons, la Valteline, le Trentin et le Tyrol. Celui de Rhétie (Grisons) passait pour le meilleur ; l’empereur Auguste le préférait à tous les autres vins. Le calés, ou vin de Calenum, ville de la Campanie, proche de Capoue, était également en grande estimé chez les gourmets. » Si tu veux boire avec nous, dit Horace à Virgile, de ce vin de Calés que Sulpitius conserve maintenant dansées celliers et qui est si propre à chasser les soucis, à rendre l’espérance, tu payeras ta part en apportant un petit onyx plein de nard. » Le céçube avait plus de réputation encore ; il valait mieux que le vin même dont buvaient les pontifes et méritait qu’on le gardât sous cent clefs :

Absumcl lissres Cxcubu dignior
Servala ceutum clavibus, et mero
Tingct pavimentum superbo,
Pontificum piAiore cœnis.

Les vignobles de ce nom croissaient dans un terrain marécageux aux environs de Gaëte. Ceux de Falerne, au contraire, étaient situés sur une montagne de la Campanie ; on en foulait le raisin an mois d’octobre. Le falerne avait la couleur de l’ambre. On y délayait le miel du mont Hymette (mixture inexplicable pour nous), et il ne perdait rien de sa force en vieillissant. Sene xtatem fert ! « Il porte bien son âge, » dit Cicéron à Damasippe, qui lui eu avait fait boire d’un tonneau de cent ans. Juvénal qualifie en termes énergiques le bouquet du falerne :

Quum ptrfusa mero spumant unguenta falerno.

Horace recommande d’en éteindre l’ardeur dans une eau courante, et il affirme ailleurs que, mêlé avec du chio, c’est une boisson exquise. Une anecdote courait à Rome, à propos du falerne. On racontait que Mécène avait pour maîtresse la femme de Sulpitius Galba et que celui-ci, en mari complaisant, feignait de s’endormir après souper. Un jeune esclave, tenté par l’occasion, voulut goûter au vin de son maître ; mais Galba s’écria aussitôt : Heul puer, non omnibus dormio ; « Halte-là ! esclave, je ne dors pas pour tout le monde. »

Le faustianum provenait des vignobles de


la côte même du montFalefne. Le/’ormiViHu» !, ou vin de Formie, était récolté, comme le cécube, dans le voisinage de GaBte, mais sur une hauteur. C’était un vin excellent, avec lequel Horace eût bien voulu corriger les vins de son cru. Ces mélanges, abhorrés des gourmets modernes, étaient très-appréciés de ceux d’autrefois. Le mamertinum était un fin de Messine assez recherché, bien moins cependant que le massique, vin de la Campanie. Le nomentanum avait toutes les qualités stomachiques des vins de Bordeaux. Les vignes de la Sabine ne donnaient qu’un vin très-médiocre. Les vins de Salerne et de Vélie étaient aqueux, et l’on n’en faisait aucun cas. Celui de Sétine, dans la Romagne, flattait agréablement le palais. Il y avait entre Sinnesse et Minturne, dans la Campanie, des vignobles qui produisaient un assez bon vin. Celui de Sorrente valait mieux. Spolette avait donné son nom à un vin brillant et doré. Martial dit de celui de Véies qu’il aime mieux le. flairer que le boire. Le vin de Vénafre était non moins renommé que son huile. Peut - être aussi faut-il placer au nombre des vins de l’Italie le vin chalybonien, ou d’Alep, que buvait le roi de Perse, et dont le plant, suivant Posidonius, était originaire de Damas. Il paraît qu’on récoltait à Issa ou Lissa, île do l’Adriatique, un vin qu’on aurait pu lui comparer. Les Romains, enfin, prisaient beaucoup les muscats de la Narbonnaise, ainsi que le vin de Narbonne, dont la supériorité était encore parfaitement établie au moyeu âge, puisque- Henry d’Andély, trouvère anglo-normand, le cite dans son poème de la Bataille des vùts. Quant au maréotique, ou vin blanc d’Égypte, doux, léger, mais fort capiteux, l’éloignement, les frais de transport ne le rendaient accessible qu’aux familles opulentes. Cléopâtre en buvait avec excès dans les banquets magnifiques où elle tenait tête au triumvir Marc-Antoine. Horace y fait allusion. Nous n’avons eu jusqu’ici qu’à citer et à qualifier les vins consommés par les anciens ; nous devons maintenant donner quelques détails sur leurs procédés de vinification et aussi sur les lois et usages relatifs à. la consommation du vin. Chez les Hébreux, la vendange était l’occasion de grandes réjouissances. Lorsque le raisin avait été pressé, on recueillait le jus dans de grandes cruches en terre et on l’y laissait fermenter ; quelquefois, on le faisait cuire, de manière a le réduire à l’état sirupeux. Les Hébreux, comme les Arabes actuels, avaient l’habitude de transvaser le vin, qu’ils trouvaient meilleur lorsqu’il avait subi plusieurs fois cette opération. Les droits de propriété, les méthodes de culture de la vigne, etc., étaient soigneusement réglés par la loi, qui exemptait du service militaire tout propriétaire iqui n’avait pas encore fait sa vendange. En dehors de ses usages domestiques, la vin servait encore chez les Hébreux aux libations. On n’a pas pu déterminer d’une façon sûre si les Hébreux connaissaient le mélange de l’eau et du vin, l’eau rougie, le vinum temperaium des Grecs et des Romains, comme boisson ordinaire. Mais il est avéré qu’ils’ aromatisaient le vin avec de la myrrhe, de l’encens, même de l’opium. Outre le vin de la vigne, les Hébreux connaissaient et désignaient.sous le nom générique de sicher plusieurs boissons fermentées et enivrantes, telles que le vin d’orge des Égyptiens, le vin de dattes, usité dans tout l’Orient ; l’hydromel, un mélange de vin et de miel, etc. Les Grecs, très-friands de leurs savoureux raisins, conservaient longtemps les grappes sur les ceps en les tenant renfermés dans de petits vases de terre cuite, percés par le bas et bien clos par le haut, i méthode inutile pour les autres fruits, » dit Palladius, puisqu’on les conserve aussi longtemps en les couvrant de plâtre. Les Romains n’avaient pas un goût moins prononcé pour le raisin. Ils buvaient aussi le moût tel qu’il, sortait de la cuve, c’est-à-dire avant qu’il eût fermenté, goût singulier et bien capable de nous surprendre. Ce muslum, quand on l’avait cuit, prenait le nom de defrutum, et, quand on l’avait réduit de moitié ou des deux tiers, celui de sapa ; ce n’était plus alors qu’uneièspèce de raisiné. Les légionnaires, au commencement de la république, ne connaissaient pas d’autre régalque ce raisiné, dont ils se faisaient des tartines. Les vins des anciens, en général, ne ressemblaient aucunement aux nôtres. La Grèce fabriquait quatre sortes de vins. Le bon vin ou vin de bonne chère était obtenu par le procédé suivant : les raisins, détaches des ceps, étaient exposés au soleil pendant sept jours sur des claies suspendues à 7 pieds de hauteur, pour que l’air pût les sécher convenablement ; la nuit, on les rentrait ou on les couvrait de nattes de paille ; le huitième jour, on les portait au pressoir, et l’on obtenait un vin de choix possédant un arôme particulier qui rappelait la framboise, " comme certains crus de notre temps. Sur les marcs résultant de la première opération, on versait une quantité d’eau équivalente au dixième du vin déjà obtenu ; ou laissait macérer quelques heures, on pressurait ensuite. Sur les marcs provenant du premier pressurage, on versait, au lieu d’un dixième d’eau, trois ou quatre dixièmes du résultat en vin de la première VIN 1067 serre ; on laissait macérer un peu plus longtemps que pour obtenir du vin do deuxième cuvée, et l’on portait au pressoir. Enfin, une dernière boisson se fabriquait avec les marcs de la première cuvée ou ne la deuxième qualité, que l’on faisait bouillir avec une quantité à eau variable et que l’on soutirait après refroidissement. À Rome, la plupart des vins lès plus chers, les plus recherchés, étaient liquoreux, sucrés, épais et offraient presque la consistance d*j sirop ; il fallait les couper, les délayer, pour les boire ; de là cet usage ou cet abus de l’eau qui étonne les buveurs modernes. Les Romains poussaient jusqu’au préjugé la passion du vin vieux ; ils le gardaient jusqu’à un âge, où les nôtres, beaucoup trop dépouillés, ne présenteraient plus ni force ni saveur. Pétrone parle d’un vin de Falerne de cent ans, et Pline d’un autre vin qui en avait près de deux cents et qui était réduit presque à l’état de miel coagulé ; « car c’est 1 la forme, reînarque-t-il, que prend le vin en ! vieillissant, » C’était donc une nécessité de ! le délayer avec.de l’eau chaude ; on le pas’ sait ensuite par la chausse. Rien d’étonnant, j du reste, que le vin très-vieux (vêtus) acquît la consistance du miel, car les Romains mêlaient toujours du miel au vin fort, afin d’en | adoucir l’âpreté. Ce mélange portait le nom ! de vinum melle condilum ou simplement de ! mulsum ; il se composait d’un tiers de miel et ’ de deux tiers du meilleur’vin ; l’opération | avait lieu au moment même où le moût sorj tait du pressoir. Le miel que Virgile con| saillait d affecter à cet usage, parce qu’il est I le plus doux à la fois et le plus pur, devait 1 être fourni par ces abeilles d’élite dont le cor* j selet, poli et régulièrement marqué de goûttes d’or, jette un éclat éblouissant ; on Te tirait surtout de l’Attique et de la Calabre. Mais ce n’est pas seulement du miel que les anciens mêlaient à leur vin ; ils y ajoutaient encore divers parfums, de l’aloès, du goudron, des feuilles de pin, des amandes amères, des figues sèches, du thym, des baies de myrrhe. Le vin où ils avaient fait macérer ces figues, ce thym, cette myrrhe prenait le nom de sycites, thymites, tnyrsinites. Les Grecs aimaient beaucoup ce dernier vin. Mais ce qu’on aurait peine à croire, si le fait n’était attesté par Athénée et par Caton, c’est que les anciens fissent entrer comme ingrédients dans leurs vins, pour les bonifier, du vinaigre et de l’eau de mer. ■ Mettez dans une futaille, dit Caton, 10 quadrantals de «in doux (48 setiers) et 2 quadrantals de fort vinaigre ; ver^ez-y pareillement S quadrantals de vin euit’et 50 d’eau douce ; brassez le mélange avec un bâton pendant cinq jours consécutifs et trois fois par jour ; ajoutez-y C4 setiers d’eau de mer puisée depuis quelque temps ; posez ie couvercle sur le tonneau et tenez-le fermé durant dix jours. Ce vin durera jusqu’au solstice ; s’il en reste après le solstice, ce sera un très-beau et très-bon vinaigre. » Ailleurs (ch. cxn), il enseigne, pour faire du «j» de Cos, une recette dans laquelle il entre aussi de l’eau de mer. « On mêlait, nous apprend de son côté Athénée, do l’eau de mer en assez grande quantité au vin de Cos et en quantité moins grande an vin de Rhodes. Les vihs tels que ceux de Myndus et d’Halicarnasse, auxquels cette eau est mêlée avec le plus de soin, no sont point capiteux ; ils lâchent le venue et aident à la digestion ; c’est pourquoi le cynique Ménippus appelle les habitants de Myndus buveurs d’eau de mer. Aux vins de Uos, de Myndus et d’Halicarnasse, comme à tout tin convenablement mélangé d’eau de mer, sont propres les eaux dures, telles que l’eau de fontaine et l’eau de pluie, si elles ont reposé assez de temps pour achever le dépôt des corps étrangers ; aussi ces vins ont-ils cours à Athènes et à Sicyone, parce qu’il y a dans ces deux villes des eaux de cettis qualité. Quant aux vins qu’on a mêlés plus modérément avec de 1 eau de mer, à ceux qui sont plus astringents, de même qu’aux vins do Chio et de Lesbos, la seule eau qui leur soit propre est une eau dépourvue complètement d’odeur et de saveur. » On est tenté, eu lisant la description de pareilles recettes, de se demander si les anciens avaient l’estomac autrement conformé que nous. Peut-être ces mixtures étranges suffisent-elles à expliquer certaines gastralgies restées historiques. Jules César, bien que irès-sobre, était toujours malade après souper. Auguste, plus faible encore d’estomac, ne buvait à ce repas que trois coups d’un sextans chacun, rarement six ; sinon, il vomissait. Tous ces vins, d’ailleurs, épais de miel et mêlés de parfums, étaient si lourds, que la prudence ordonnait aux vieillards ou aux débauchés de les boire chauds. Musa, le médecin d’Auguste, l’avait expressément prescrit à cet empereur, ne lui permettant que la vin cuit, bouilli d abord, puis refroidi dans la neige ; mais son successeur, Tibère, buvait sec et chaud, d’où le triple sobriquet de « Biberius Caldius Mero, Ivrogne de vin pur et chaud, » dont l’avaient affublé les Romains en estropiant ses nom et surnoms : Ciaudius Tiberius Nero. L’empereur Néron, lui, buvait tout d’un trait et à la glace. Nous mettons notre vin à la cave ; les Romains mettaient leur vin au grenier. Les celliers étaient toujours exposés au midi. Après que le ui’n avait fermenté pendant une année ou deux dans les tonneaux, on procédait au