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avait pris une extension remarquable. Néanmoins, les Alsaciens embrassèrent avec ardeur les principes de la Révolution. Des feux de joie avaient accueilli à Strasbourg la nouvelle de la prise de la Bastille ; des clubs s'organisèrent, et l'on remplaça l'administration municipale par un conseil d'échevins chargé d'étudier les réformes les plus pressantes. Le savant et habile Frédéric Dietrich fut nommé maire ; il prit dans ce poste une grande influence, et son libéralisme lui acquit les sympathies de tous. Mais bientôt arrivèrent les décrets qui divisaient l'Alsace en deux départements, Haut-Rhin et Bas-Rhin ; l'Alsace avait cessé d'exister. Elle ne devait revivre qu'en 1871, mais pour être, avec la Lorraine, incorporée au nouvel empire d'Allemagne. En 1648, les Allemands nous livrèrent l'Alsace couverte de ruines ; ils l'ont couverte de ruines avant de nous la reprendre en 1871. Entre ces deux dates néfastes, l'Alsace a connu, sous la domination française, deux cent vingt-deux ans d'admirable prospérité : elle s'en souviendra.

- Littérature. Bien que l'Alsace n'ait pas, à proprement parler, une littérature originale et que ses écrivains. nationaux aient tour à tour parlé la langue latine, la langue allemande et la langue française, l'activité intellectuelle de cette contrée offre des caractères si particuliers qu'il nous parait intéressant d'en retracer les différentes phases. Réfugiée d'abord dans les couvents, la littérature alsacienne est exclusivement religieuse ; elle s'affranchit peu à peu, et poëtes et chroniqueurs racontent ensuite sous diverses formes, en langue allemande, des légendes gracieuses ou terribles et les guerres sanglantes qui déchirent le pays. La Réforme arrive, et l'Alsace, qui embrasse ardemment les nouvelles doctrines, voit naître en foule de savants théologiens et d'éloquents prédicateurs ; bientôt après, les érudits, les philosophes et les archéologues, attentifs aux travaux de l'Allemagne, préparent les matériaux aux historiens qui vont naître. Enfin, l'Alsace devient française et, après un long travail de fusion, ne produit plus, au XIXe siècle, que des œuvres presque exclusivement françaises. Placée entre les deux nations dont elle parle également la langue, elle s'assimile les œuvres littéraires de l'Allemagne, les traduit ou les explique à la France. Tel est, rapidement, le tableau que nous allons essayer d'esquisser.

Jusqu'au milieu du XIIe siècle, l'Alsace resta sans littérature ; les traditions n'avaient pas encore eu le temps de se former ; on ne songeait qu'a la guerre. Ce n'est que dans quelques monastères, où se retirèrent de studieux solitaires, que l'on voit se produire par moments des manifestations isolées de la pensée. Ainsi c'est au fond du cloître de Wissembourg que le moine Otfried compose, vers 869, une paraphrase des Évangiles dans la langue du peuple. C'était une innovation hardie. Son poëme, intitulé le Christ, dans lequel il s'est abandonné à ses inspirations mystiques, est un des premiers monuments littéraires qui nous restent de l'idiome teutonique, à moins de remonter à la Bible d'Ulphilas et au serment prononcé à Strasbourg en langue vulgaire par Charles le Chauve. Dans le même couvent, un autre moine, du nom de Hederich, écrivait en latin des traités de théologie qui ne nous sont point parvenus. À cette époque, l'impératrice Richardis, femme de Charles le Gros, fondait l'abbaye d'Andlau pour les dames de haut rang fatiguées des vanités du monde, et s'y retirait elle-même quelquefois, pour composer des vers élégiaques pleins de grâce et d'autres poésies dans la langue de Virgile. Un peu plus tard, lorsque l'Alsace, sous les Hohenstauffen, s'est peuplée de monastères, les religieux qui s'adonnent à l'étude des belles-lettres sont de plus en plus nombreux, et l'on voit se produire en foule des travaux d'érudition et des imitations de l'antiquité. Le couvent de Hohenbourg ou de Sainte-Odile surtout fut illustré par deux femmes du plus grand mérite : l'une, l'abbesse Relindis, parente de l'empereur Frédéric Ier, vivait vers 1150 ; l'autre, Herrad de Landsperg, qui lui succéda, a laissé un Hortus deliciarum, qui est une encyclopédie poétique et historique, où la religieuse, à la fois érudite et créatrice, a déposé « le miel qu'elle avait butiné sur toutes les fleurs du savoir. »

Sous le règne de Frédéric Barberousse, la littérature commence à sortir du cloître, et l'on sent qu'une poésie nationale va éclore. À la fin du XIIe siècle, on cite déjà Frédéric de Husen, poëte chevalier qui, guerroyant loin de sa terre natale, rime des vers où il exprime les regrets de la patrie ; Luthold, de Haguenau, qui chante les fleurs, le mois de mai et l'amour pur du troubadour ; Henri, dit le Gleissner, qui reproduit avec des variations nouvelles le thème de maître Renard (Reineke Fuchs). Mais, bien au-dessus d'eux, vient se placer Godefroy de Strasbourg, l'auteur du vaste poëme de Tristan et Yseult, qui date, à ce que l'on croit, du commencement du XIIIe siècle. Godefroy est la plus grande illustration du moyen âge allemand ; sou poëme est le miroir des mœurs de la cour des Hohenstauffen et des princes de l'époque, avec les passions qui sont de tous les temps. D'autres poésies de Godefroy sur l'amour sont d'une pureté exquise. Après lui, viennent divers imitateurs, tels que Fuller de Hohenbourg, de la fin du XIIIe siècle, qui fait des vers en l'honneur du printemps et des dames ; le sire de Colmar, poëte didactique qui déplore, comme l'Ecclésiaste, la vanité des choses terrestres, et, dans le château de Gliers, en Sundgau, Guillaume de Montjoie, qui se livre à la poésie méditative. Haguenau était alors le centre où se réunissait la société élégante de l'Alsace, qui venait visiter dans leur splendide palais les empereurs d'Allemagne. Là se donnaient les tournois et les fêtes ; les dames y paraissaient avec leur cortège obligé d'adorateurs et de chantres de leur beauté.

Le XIVe siècle, sombre et rempli de terreur, fut peu favorable à la poésie ; les guerres désolaient le pays, et l'on attendait la fin du monde. Au milieu de ces tristesses, on était particulièrement disposé aux méditations mélancoliques et religieuses. Rulman Meerswin écrivait des lettres et des traités mystiques ; le dominicain Jean Tauler, s'adressant au peuple dans sa langue, attirait par son éloquence au pied de la chaire de la cathédrale de Strasbourg une foule frappée de la crainte de l'enfer ; une abbesse de Colmar, Catherine de Guebwiller, écrivait, vers 1325, la biographie des religieuses de son couvent. On commence à faire quelques chroniques. Déjà, sous Rodolphe de Habsbourg, Godefroy d'Ensningen avait raconté en latin les luttes des Alsaciens avec leurs évêques et avait eu les honneurs d'une traduction allemande ; au XIVe siècle, Closener, puis Matthieu de Neuenbourg relatèrent les événements du temps de Rodolphe de Habsbourg jusqu'à la mort de Charles IV. Voici enfin Gutenberg, qui, tandis qu'on se bat aux portes de Strasbourg, trouve dans cette ville l'idée des caractères mobiles et contribue puissamment au rapide développement des intelligences. À cette époque, la théologie et l'éloquence étaient cultivées de préférence en Alsace. Jean Creutzer attire à Bâle de nombreux auditeurs autour de sa chaire ; Eikhart Arzt, bourgeois de Wissembourg, raconte dans un style précis et pittoresque la lutte soutenue par sa ville natale contre Frédéric le Victorieux, et Pierre de Blarru, chanoine de Saint-Dié, célèbre en vers latins les guerres de Charles le Téméraire. En même temps s'établit à Schelestadt une école d'humanistes, qui va bientôt donner à lacontrée une foule d'hommes distingués par leur savoir.

Le règne de Maximilien correspond à la Renaissance qui, portant de l'Italie dans tous les pays de l'Europe le goût de la littérature classique, fut le vrai point de départ d'une civilisation nouvelle. L'administration sage et pacifique de Maximilien contribuait alors à répandre le goût des études en Alsace ; aussi y voit-on, à ce moment, une foule d'illustrations locales qui, comparées à celles qui honoraient les autres pays, ne brillent pas sans doute d'un bien vif éclat, mais dont la gloire relative rejaillit sur la contrée. La figuré du savant Jean Wimpheling , né à Schelestadt en 1450, domine cette époque. À la fois historien, poëte, humaniste, pédagogue, théologien, il exerça sur la littérature de son temps et de son pays une influence prépondérante. Deux sociétés savantes furent fondées par ses soins, l'une à Strasbourg, l'autre à Schelestadt. « Souvent persécuté, a dit de lui M. Louis Spach, parce qu'il ne connaissait point l'art de déguiser ses opinions et d'adopter un système de bascule, sa vie fut une longue lutte, où l'énergie et le courage de l'homme furent au niveau de l'érudit encyclopédique. En rapport avec toutes les illustrations littéraires de l'Allemagne, il s'attacha de préférence à Geyler, dont il devait être le biographe, à Érasme, dont il édita le Traité sur la folie, et à Jean Sturm, dont il pressentait les brillantes destinées. » Au-dessous de Wimpheling brillent les humanistes formés à la nouvelle école de Schelestadt. Nous voyons l'historien Beatus Rhenanus , Jean Malus, secrétaire intime de Maximilien Ier ; Beatus Arnoldi, le secrétaire de Charles V ; Vogler, le poëte latin lauréat ; Ottomar Nachtigall, l'helléniste ; Jérôme Guebwiller, de Horbourg , recteur de l'école de Schelestadt ; Matthieu Schurer, le grammairien ; les théologiens Matthieu Zell, Koepfel (Capito), Bucer, etc.

La poésie nationale est représentée dans cette période par deux écrivains célèbres : Sébastien Brandt et Thomas Murner. Le premier, né à Strasbourg, a poursuivi de ses sarcasmes, dans la langue vigoureuse du peuple, les vices de son temps. Son Esquif des fous, édité, interprété, imité et traduit dans toutes les langues de l'Europe, est une œuvre de haute valeur. Quant au second, Thomas Murner, s'il eut de son temps une célébrité égale à celle de Sébastien Brandt, son émule, qu'il imita dans la Conspiration des fous, sa réputation s'est évanouie aujourd'hui. Ses satires sont amères et sans tact ; il n'a pas le coup d'œil d'ensemble du philosophe, ni l'émotion généreuse de celui qui frappe, non par rage, mais pour guérir.

Au magnifique épanouissement littéraire de la Renaissance succéda une période d'accalmie, où l'on ne trouve que peu d'hommes remarquables. Cependant, si le mouvement intellectuel se ralentit, il serait injuste de nier son existence. Sous l'intelligente impulsion de Sturm, l'instruction publique est organisée en Alsace, et l'on voit se fonder, en 1538, la haute école qui deviendra plus tard le gymnase de Strasbourg, d'où sortiront d'habiles dialecticiens et de savants philosophes, défenseurs des doctrines de Luther. La Réforme, en effet, tournait toutes les intelligences du côté de la théologie et des discussions métaphysiques. Le luthéranisme donnait naissance à une poésie en langue vulgaire, cultivée par les pasteurs du nouveau culte, qui composaient à l'usage de leurs paroissiens des hymnes imitées des anciens chants d'Église, ou des cantiques modernes inspirés par la méditation et le désir d'édifier les jeunes paroisses. Au nombre de ces poëtes hymnologues est le moine Matthieu Gretter ou Greiter, qui, un moment protestant, rentra dans le sein de son Église ; puis Oswal Welbel, chatelain de Hohenack, qui, sur les hauts plateaux des Vosges, se livrait au culte des muses saintes. Parmi les poëtes latins de cette période, n'oublions pas Jérôme Guebwiller, l'auteur de la Panegyris Carolina , composée à la gloire de Charles-Quint. Il faut aussi donner une mention à la littérature populaire qui sortit du mouvement de réaction contre la Réforme ; elle ne fut point cultivée en Alsace par des talents éminents, mais nous ne devons pas néanmoins passer sous silence les noms de Georges Wickram, de Colmar, auteur de drames, de romans et collecteur d'anecdotes ; Valentin Rote, qui écrivit des drames représentés avec succès en Suisse ; Jérôme Bouer, traducteur de beaucoup d'auteurs anciens ; Michel Herr, médecin à Strasbourg, traducteur élégant d'ouvrages classiques latins sur l'agriculture, l'hygiène, la géographie, l'histoire naturelle ; Jean Schott, traducteur de Plutarque, de Sénèque et des auteurs comiques latins. Parmi les historiens, successeurs et émules des beaux noms de l'école de Schelestadt, figure Berler, de Rouffach, disciple de Jérôme Guebwiller. Il se fait l'annaliste des évêques de Strasbourg. À côté de lui est Jean-Philippson Sleidanus, Irlandais naturalisé citoyen de Strasbourg, qui se fit l'historien de la ligue de Smalkalde et des réformateurs. Citons encore Bernard Hertzog (1550), généalogiste ; Guillimann (1618), historien des évêques de Strasbourg, et Osée Schadaeus, qui a décrit la cathédrale et continué Sleidanus. Quant aux jurisconsultes, ils abondent en ces temps de litiges, et les théologiens continuent à disputer entre eux. Strasbourg , ville protestante par excellence, était même le lieu où se réfugiaient de préférence ceux qui avaient été chassés de leur pays pour leurs opinions religieuses ; ils trouvaient commode d'y faire imprimer leurs livres et de lancer de l'autre côté des Vosges tantôt leurs mémoires justificatifs, tantôt leurs écrits véhéments.

On le voit, quoiqu'il y ait eu moins de noms éclatants et de réputations brillantes au XVIe siècle qu'au XVe, le mouvement intellectuel fut cependant remarquable en Alsace durant la Réformation, Malheureusement, la guerre de Trente ans, qui désola la contrée au commencement du siècle suivant, fut peu favorable au développement littéraire. Si l'on excepte le jésuite J.-J. Balde, qui composait des odes latines ; le pasteur Spener et quelques chroniqueurs , comme le pharmacien strasbourgeois Saladin, le bourgmestre Petri, de Mulhouse, et F. Annibal de Schauenberg, qui voulaient laisser à leurs enfants, en manière d'exemple et de leçon, le récit des événements terribles dont ils avaient été les acteurs ou les témoins, on ne trouve, à cette époque, que bien peu d'hommes capables de conserver au milieu du sang, et des larmes le culte des belles-lettres.

Il faut aller jusqu'au XVIIIe siècle pour retrouver en Alsace l'activité littéraire et des écrivains de renom. Alors le calme est rétabli, la contrée est devenue française et un fécond travail de fusion commence à s'accomplir. Sous Louis XIV, la question grave et vitale avait été celle du culte ; on s'était efforcé de catholiciser le pays. Dès 1682, les ordres religieux étaient rentrés à Strasbourg et la ville avait vu affluer des prédicateurs, des controversistes, des convertisseurs. L'école des jésuites fondée à la fin du XVIe siècle à Molsheim par l'évêque Jean de Manderscheid, pour contre-balancer l'influence de la haute école luthérienne, fut transférée aussi à Strasbourg et installée dans un bel édifice, construit à cet effet sur la place du Dôme, près du palais épiscopal. La théologie, les langues, l'histoire, le droit canon, étaient enseignés dans cette haute école catholique, dont le Père Laguille était l'un des professeurs les plus distingués. Son Histoire d'Alsace est lucide et élégante. À côté de lui on remarquait le Père Baegert, de Schelestadt ; le Père Guillaume, d'Isenheim, qui écrivit une histoire des ducs de Lorraine, etc. Controversistes habiles et éloquents, ces jésuites entraînaient dans les rangs de l'Église plus d'un luthérien. Aussi est-ce à la nécessité de lutter avec ces rivaux redoutables par l'érudition qu'il faut attribuer l'éclat de l'université protestante de Strasbourg pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle. Fondée en 1566 par Maximilien II, cette université existait en germe depuis 1538 comme simple gymnase. Elle fut dirigée avec éclat par le recteur Jean Sturm de Heyde, aussi célèbre comme diplomate que comme écrivain et pédagogue. L'impulsion qu'il donna aux études du gymnase fut si puissante que, dès les premières années, les élèves affluaient de très-loin. L'acte impérial du 30 mai 1566 conférait à l'académie de Strasbourg le privilège de délivrer des diplômes. En 1621, Ferdinand II éleva l'académie au rang d'université. Cette haute école réunissait en 1770, sous la surveillance d'un recteur et de trois scholarques, une vingtaine de professeurs. Là régnait le savant Schoepflin, qui, le premier, remit en honneur les chartes poudreuses et forma, dans son Alsace illustrée, son Alsace diplomatique et son Histoire de la maison de Zaehringen, un trésor de faits où les historiens de France et d'Allemagne iront toujours chercher des matériaux précieux. Auprès de Schoepflin nous trouvons deux jeunes professeurs, Oberlin et Koch, dont la renommée va bientôt grandir et qui seront, au commencement du XIXe siècle, l'honneur de l'Alsace. Schweighaeuser, le futur éditeur de Polybe, d'Appien et d'Hérodote, préludait par des opuscules académiques à sa gloire philologique et réchauffait le culte presque oublié des muses grecques et de l'histoire de la philosophie. Brunck sans faire partie du corps académique, cueillait aussi dans le champ de la philologie grecque des palmes méritées. Ses belles et ingénieuses éditions de Sophocle, d'Anacréon, d'Aristophane illustrèrent à la fois son nom et la typographie strasbourgeoise. Grandidier, Strobel, etc., se livraient également aux études sérieuses. Lorey, sec et froid, mais érudit, expliquait les historiens et les auteurs latins. À la Faculté de médecine on remarquait Ehrmann, Lobstein et Spielmann ; à la Faculté de théologie, Reuchlin exerçait une toute-puissante influence. On le voit, l'université de Strasbourg était, en 1770, entièrement prospère ; aussi, c'est l'époque où une élite de jeunes hommes venus de Russie, du nord et du midi de l'Allemagne et, en partie, de l'intérieur de la France, se pressait autour des chaires des professeurs. Le plus célèbre est Goethe, qui, à peine âgé de vingt et un ans, réunissait autour de lui un cénacle de compagnons et d'hommes plus âgés qui étaient suspendus déjà à ses lèvres éloquentes. C'est à Strasbourg qu'il conçut la première idée de Faust, l'œuvre capitale de sa vie ; c'est près de là aussi, au village de Sessenheim, que son cœur reçut les premières atteintes d'un amour qu'il a immortalisé. Avec Goethe, l'université comptait parmi ses élèves Jung-Stiling, le mystagogue le plus naïf de l'Allemagne ; le poëte Lenz, etc. Herder, déjà en possession d'une certaine renommée, y vint aussi.

La Révolution interrompit ce brillant développement. Pendant ces années de luttes, les écoles furent fermées, et le salon de Mme Louise de Dietrich , femme du maire, dans lequel Rouget de L'Isle chanta pour la première fois la Marseillaise, fut le seul lieu de rendez-vous où se réunirent à Strasbourg quelques amis fidèles des lettres et des arts.



ALSACE-LORRAINE, province d'Allemagne, relevant directement de l’empire et cédée par la France en 1871. Elle comprend : l'ancien département du Haut-Rhin ; celui du Bas-Rhin, moins les cantons de Belfort, de Delle et de Giromagny, moins 21 communes du canton de Fontaine, 4 de celui de Massevaux, 3 de celui de Dannemarie ; le département de la Moselle, moins les cantons de Conflans et de Longuyon, 12 communes du canton de Gorze, 17 de celui de Briey, 24 de celui d’Audun-le-Roman, 25 de celui de Longwy ; les arrondissements de Sarrebourg et de Château-Salins (Meurthe) presque entiers et, dans le même département, le canton de Schimerck, ainsi que 7 communes de celui de Saales, dans les Vosges. Superficie, 14,512 kilom. carrés. ; 1,529,408 hab. Chef-lieu, Strasbourg ; villes principales, Colmar et Metz.

- Géographie physique. Les détails donnés sur les départements français dont se compose l’Alsace-Lorraine actuelle nous dispensent d’entrer à ce sujet dans aucun détail. V. Rhin (Haut-), Rhin (Bas-), Moselle, Meurthe.

Les établissements industriels des départements qui ont concouru à former l’Alsace-Lorraine étaient de premier ordre. Il nous suffira de rappeler les usines métallurgiques de la haute Alsace et de la Lorraine ; les fabriques d’acier, les manufactures d'armes, la quincaillerie de la basse Alsace ; la verrerie, le faïencerie, les toiles, les cuirs et les liqueurs de la Lorraine ; enfin et surtout les filatures de la haute Alsace. Tel était, en somme, le bilan de cette industrie alsacienne, qui plaçait ce beau pays à la tête de l'activité humaine, tout à la suite ou à côté des districts les plus industrieux de la Grande- Bretagne. Les tristes événements de 1870- 1871 ont entassé dans ce riche pays des ruines qui seront longues à relever. Outre les désastres immédiats causés par l'occupation étrangère, l’Alsace-Lorraine a subi les terribles suites de l'incorporation à l'empire allemand : des masses d’ouvriers ont déserté le sol natal pour échapper aux conséquences de l'annexion ; des industriels, et non des moindres, ont transporté au delà des nouvelles frontières les industries qui avaient fait la fortune de leur pays natal. Pour combler ces