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par le roi Louis, du traité qui cédait à l’empereur une province hollandaise. Lors de l’abdication de son mari, elle gouverna quelque temps comme régente, jusqu’à la réunion de la Hollande à l’empire. Comme compensation, l’empereur l’autorisa alors à se séparer du roi Louis, à garder ses deux enfants, et lui assura un douaire de 2 millions de revenu. Devenue reine honoraire, elle se fixa alors à Paris, et son salon fut bientôt le rendez-vous de la bonne société et de toutes les illustrations. Mais elle préférait à l’éclat du monde l’amitié sincère d’une de ses amies de pension, Adèle Augulê, sœur cadette de la maréchale Ney, qu’elle eut la douleur de voir se noyer dans un précipice à Aix, en Savoie, sans pouvoir lui porter secours.

La reine Hortense se mêla cependant encore une fois de politique. Lors de l’invasion de la France par les alliés, elle fit de courageux efforts pour empêcher le départ de l’impératrice pour Blois ; puis, après avoir rendu visite à sa mère, à Évreux, elle rejoignit Marie-Louise, prisonnière à Rambouillet, et ne la quitta que lors de son départ pour Vienne, bien qu’elle n’eût pas à se louer de sa réception. Elle retourna alors à la Malmaison, où les souverains alliés, outre une pension de 400,000 fr., lui formèrent un duché de tous les biens environnant la terre de Saint-Leu, duché qui devait lui donner un revenu à peu près égal (30 mai 1814). Deux jours auparavant, Hortense avait recueilli le dernier soupir de sa mère, dont elle fit déposer les restes dans l’église de Rueil. Après être allée se reposer de ses fatigues et de ses douleurs aux eaux de Plombières et de Bade, où sa cousine, la grande-duchesse Stéphanie, la reine de Bavière, Caroline, et l’impératrice de Russie Élisabeth, la traitèrent en reine, Hortense revint à Saint-Leu. On l’accusa d’y conspirer, à cause de la société de mécontents qu’elle recevait, et ces mécontents l’accusèrent à leur tour d’être portée pour la Restauration, qui lui témoignait un grand intérêt. C’est à ce moment que le tribunal de la Seine la condamna à rendre au roi Louis, son fils aîné, Napoléon-Louis, arrêt que les Cent-Jours lui permirent d’éluder. L’Empereur l’accusa, à son retour, d’avoir pactisé avec ses ennemis, puis lui rendit justice et même, à sa prière, il accorda à la duchesse douairière d’Orléans une pension de 200,000 fr. avec la permission de rester à Paris. Après Waterloo, Hortense accueillit avec un respect pieux Napoléon à la Malmaison et le soigna comme une fille dévouée. Elle le força même à accepter un collier de 800,000 fr., en échange duquel Napoléon lui donna sur le trésor une délégation qui n’eut aucun effet. Lorsqu’il fut parti, elle retourna à Paris, d’où on lui intima l’ordre de sortir dans les deux heures. Suivie de ses deux enfants, elle résida successivement à Aix en Savoie, où elle avait fondé un hôpital, à Constance et à Thurgovie. Là, elle se mit à écrire ses mémoires, tout en surveillant avec les soins d’une mère digne de ce nom l’éducation de son second fils, auquel elle enseignait elle-même les beaux-arts. Le château d’Arenenberg, sur les bords du lac de Constance, lui ayant plu, elle l’acheta (1817), et, tandis qu’on l’embellissait, elle passa l’hiver à Augsbourg, où son frère Eugène vint la voir. Elle quitta cette résidence à la mort de ce dernier, en 1824, et, autorisée par le pape Léon XII à habiter l’Italie, elle passait l’hiver à Rome et l’été à Arenenberg.

Lorsque éclata la révolution de 1830, elle fit tous ses efforts pour empêcher ses fils de se compromettre dans l’insurrection italienne ; mais l’aîné partit malgré elle, et fut emporté par la rougeole à Forli, l’année suivante, le 17 mars 1831, sans qu’elle pût recueillir son dernier soupir. Pour sauver le fils qui lui restait, elle se rendit à Paris avec un passe-port anglais et obtint une audience du roi Louis-Philippe, qui ne put que lui donner un vague espoir. Hortense retourna à Arenenberg, après un séjour de trois mois en Angleterre, et vécut tranquille jusqu’à la tentative de Louis-Napoléon à Strasbourg, le 3 octobre 1835. L’amour maternel l’entraîna de nouveau à Paris, pour solliciter la grâce de son fils. Le sort du prince était déjà décidé ; elle en reçut la nouvelle, avec l’ordre de quitter la France. Le gouvernement la faisait prier en même temps d’engager son fils à rester dix ans aux États-Unis. La déportation du prince Louis acheva de détruire la santé d’Hortense, si cruellement éprouvée. Elle lui écrivit le 3 avril de venir lui fermer les yeux. Quittant aussitôt l’Amérique, Louis-Napoléon arriva à temps en Suisse pour recevoir son dernier soupir, le 5 octobre 1837. Selon son désir, la reine Hortense fut inhumée à Rueil, près de sa mère. Son fils, pendant sa détention au fort de Ham, fit élever à sa mémoire un monument funèbre, inauguré le 20 avril 1848.

La reine Hortense était une femme pleine de bonté de cœur. L’adversité, en mûrissant sa raison, la rendit plus respectable aux yeux de tous, et l’on fut obligé de reconnaître qu’en la jugeant d’après les apparences, on s’était montré trop sévère à son égard ; si d’ailleurs elle a eu des torts, elle les a cruellement expiés et noblement rachetés par son dévouement à l’empereur, qui l’avait rendue malheureuse en la forçant à contracter un hymen vers lequel elle ne se sentait pas attirée, et par son amour maternel, toujours prêt à tout sacrifier au bonheur de ses enfants. Aujourd’hui, que les passions se sont éteintes ou tout au moins assoupies, la reine Hortense occupe avec l’impératrice Joséphine, sa mère, une grande place dans le cœur reconnaissant de tous les Français et surtout des Françaises.


BEAUHARNAIS (Joséphine, vicomtesse de). V. Joséphine (impératrice).


BEAUHARNAISIE s. f. (bo-ar-nè-zi — de Beauharnais, n. pr.). Bot. Syn. de tovomile.


BEAUJEU (Dellijocus), ville de France (Rhône), ch.-l. de cant., arrond. et à 22 kil. N.-O. de Villefranche, sur l’Ardière, pop. aggl. 3,099 hab. — pop. tot. 3,993 hab. Papeteries, fabriques de tonneaux, chapeaux, tanneries, récolte de vins rouges estimés. Beaujeu, la plus ancienne ville du Beaujolais, dont elle était la capitale, possède plusieurs maisons curieuses, une entre autres dont le portail gothique, à la fois élégant et simple, est surmonté d’un écusson que soutiennent deux moines ailés. L’église Saint-Nicolas, construction du XIIIe siècle, offre un singulier mélange des styles roman et ogival. Mais ce que cette ville présente de plus intéressant, ce sont les ruines imposantes de son ancien château fort, qui fut la résidence des sires de Beaujeu. Ce château existait déjà en 523, lors de la première conquête de la Bourgogne par les Francs. Quatre tours carrées, réunies par d’épaisses murailles, avaient d’abord formé son enceinte ; posées sur un monticule escarpé, elles étaient à l’abri de toute attaque. Hugues de Beaujeu, ayant été aux croisades, fut frappé des magnificences de l’architecture orientale, et, de retour dans son manoir, il fit abattre trois des antiques tours, et sur leur emplacement s’élevèrent six tours rondes, construites à la mode de l’Orient, n’ayant aucune ouverture sur la campagne, et se terminant par des dômes élevés. Au commencement du XIVe siècle, ce château fut assiégé par le sire de Blamont, et ce siège fut la cause de l’illustration qui s’attacha au château de Beaujeu. La châtelaine, Marie de Beaujeu, sur le point d’épouser le sire de Pontaillier, était dans son château lors de l’attaque, qui n’avait d’autre but que celui de livrer Marie au sire de Blamont ; elle allait succomber lorsque son amant, Guy de Pontaillier, arriva à son secours ; un moment elle reprit courage, mais elle vit son sauveur tomber baigné dans son sang, et Erard de Blamont sur le point de la saisir ; éperdue, elle gravit l’escalier qui conduit à la plate-forme, l’autre la poursuit d’étage en étage, elle arrive à la plate-forme, s’élance sur le parapet et se précipite dans le vide.

Au commencement du XIIe siècle, ce château fut occupé par Humbert IV, qui se rendit célèbre par les étranges immunités dont il gratifia ses sujets. Ce châtelain, peu sensible aux charmes du sexe aimable, accorda aux maris le droit de battre leurs femmes, jusqu’à effusion de sang, pourvu toutefois que la mort ne s’en suivît pas.

Le château de Beaujeu ne se recommande, dit l’auteur des Mystères des vieux châteaux de France, ni par les sièges qu’il a soutenus, ni par les guerriers qui lui ont rendu visite, mais seulement par un fait singulier, merveilleux et dramatique, dont l’une de ses châtelaines, la comtesse de Monteval, fut l’héroïne, et qui eut, au moment de sa réalisation, le plus grand retentissement en Europe : La comtesse étant morte fut enterrée dans le caveau de sa famille ; le fossoyeur, poussé par la misère, eut la déplorable pensée de tenter de déterrer le cadavre, pour s’emparer des bagues que la comtesse portait aux doigts. Ne pouvant les arracher, il se préparait à faire l’amputation d’un doigt lorsqu’un cri de douleur se fit entendre ; la comtesse n’était qu’en léthargie. Elle revint complètement à la vie, et cet événement devint la légende du château de Beaujeu, qui devait appartenir à une reine de France. Pierre de Bourbon, sire de Beaujeu, épousa Anne de France, fille de Louis XI, et, en 1483, Anne devint régente de France. Elle visita souvent l’antique château dont elle portait le nom. Elle se plut avec son mari à enrichir cette propriété d’appartements nouveaux et de jardins magnifiques ; c’est dans cette résidence, dit M. Bouché de Cluny, qu’elle venait se délasser des soins du gouvernement, et c’est là aussi qu’elle passa les instants les plus doux, les plus heureux de sa vie. Le château de Beaujeu ayant, lors de la Révolution, été déclaré propriété nationale, fut acheté par un spéculateur qui le fit démolir pour en vendre les matériaux. Aujourd’hui, on n’en voit plus que quelques ruines éparses, et des troupeaux de bœufs et de brebis viennent brouter l’herbe des champs à l’endroit où les grands seigneurs de la cour venaient présenter leurs hommages à la régente de France.


BEAUJEU (maison de). La ville de Beaujeu avec ses annexes, portant titre de baronnie, était possédée par les comtes de Lyon et de Forez, sous le règne des successeurs de Charlemagne. Guillaume II, comte du Lyonnais vers 890, fit du Beaujolais l’apanage de la branche cadette de sa maison, branche qui finit dans sa postérité mâle avec Guichard, cinquième du nom, sire de Beaujeu, mort en 1265, laissant pour héritière Isabeau de Beaujeu, sa sœur, qui avait épousé en secondes noces Renaud, comte de Forez. Elle eut de ce mariage plusieurs fils, dont l’un a continué la ligne des comtes de Forez, et dont un autre, Louis, a formé une nouvelle maison de Beaujeu. Ce dernier, marié à Aliénor de Savoie en 1270, eut pour fils Guichard VI, dont la descendance, en ligne de primogéniture, s’éteignit en 1374, en la personne d’Antoine, sire de Beaujeu, fils d’Édouard de Beaujeu, maréchal de France, tué au combat d’Ardres. Guichard VII, un des fils de Guichard VI, forma une branche collatérale, dite des seigneurs de Perreux. Son fils Édouard de Beaujeu, seigneur de Perreux, recueillit la succession de son cousin Antoine, de la ligne directe. N’ayant pas d’enfants, il fit don, en 1400, de ses possessions à Louis II de Bourbon. La baronnie de Beaujeu resta dans la maison de Bourbon jusqu’en 1522, époque où, confisquée sur le connétable de Bourbon, elle fut donnée à Louise de Savoie, mère de François Ier, par le roi François II. Réunie à la couronne en 1531, elle fut rendue à la maison de Bourbon, d’où Marie de Montpensier la porta en dot à Gaston d’Orléans, dont la fille, Mademoiselle, la légua au frère de Louis XIV, dans la famille de qui elle est depuis restée. La baronnie de Beaujeu ou du Beaujolais fut érigée en comté en 1626.

La maison de Beaujeu comptait au nombre des premières baronnies de France, ainsi que l’indique ce passage du Grand coutumier : « Au royaume de France ne souloit avoir que trois baronnies, savoir : Bourbon, Coucy et Beaujeu. » Plusieurs sires de Beaujeu, barons de Beaujolais, ont joué un rôle important au moyen âge ; nous consacrons donc une notice biographique aux plus remarquables d’entre eux,

Humbert II sire de Beaujeu, succéda à son père Guichard III, mort en 1127, après avoir pris l’habit des religieux de Cluny. Humbert se livra d’abord à toutes sortes d’excès ; puis, afin d’expier ses fautes, il se rendit en Palestine et se fit templier. Alix, sa femme, protesta contre le vœu que venait de faire son mari, en appela au pape Eugène III, qui cassa le vœu, et Humbert revint dans sa baronnie. Le sire de Beaujeu recommença aussitôt à se livrer à toutes sortes de déprédations, à désoler les terres de ses voisins, et finit par s’emparer d’une partie de la Bresse. Il mourut au couvent de Cluny en 1174. — Humbert III, fils du précédent, mort vers 1202, acquit par mariage la seigneurie de Montpensier et fonda Villefranche, qui devint en 1532 la capitale du Beaujolais. Philippe-Auguste fut obligé d’intervenir en 1180 pour mettre un terme à ses agressions contre ses voisins, — Guichard IV, son fils, lui succéda vers 1202, et mourut à Douvres en 1216. Il se joignit en 1206 à Louis de France pour combattre contre les Albigeois, fut chargé en 1207, par Philippe—Auguste, d’une mission près du pape Innocent III et de l’empereur de Constantinople, en rapporta de grandes richesses, fonda à Villefranche le premier couvent de franciscains qu’ait eu la France, et mourut en Angleterre, où il avait accompagné le prince Louis dans son expédition contre ce pays. — Humbert IV, fils aîné du précédent, mort en 1250, joua un grand rôle sous Louis VIII et saint Louis. La grande part qu’il prit à la guerre des Albigeois lui valut d’être nommé par Louis VIII gouverneur de tout le pays, titre qui lui fut confirmé par saint Louis. Pendant son gouvernement, il prit le château de la Bessède (1227), et fit brûler vif Géraud de Mota, un des chefs albigeois, ravagea le comté de Foix et s’empara du château de Montech. Élevé en 1240 à la dignité de connétable, il alla en Orient soutenir l’empereur de Constantinople Baudouin II, et accompagna saint Louis à la croisade. Joinville parle à plusieurs reprises du connétable de Beaujeu, dont il vante à la fois la bravoure sur le champ de bataille et la sagesse dans les conseils. D’après une ancienne chronique, il mourut en Égypte. — Guichard V, fils du précédent, mort en 1285, fut élevé à la dignité de connétable de France comme son père. Il se distingua à la bataille de la Massoure (1250) et au siège de Tunis (1270), commanda l’armée envoyée au pape par Philippe III, lors du concile de Lyon, en 1274, puis il assista à la prise de Pampelune et à la réduction de la Navarre. Nommé connétable en 1277, il fut chargé d’un commandement dans le Languedoc, où il termina sa vie. — Guichard VI, surnommé le Grand, mort en 1331, hérita en 1290 de son père Louis, qui lui laissa le Beaujolais et une partie de la principauté de Dombes, où il battait monnaie. Il porta le titre de chambellan et de grand gouverneur sous Philippe le Bel, Louis le Hutin, Philippe le Long, Charles le Bel, Philippe de Valois. Il fut mêlé à une guerre que soutenait la maison de Valois contre les dauphins de Vienne, et fait prisonnier à la bataille de Saint-Jean-le-Vieux (1325). Mis en liberté en 1327, il accompagna en Flandre le roi Philippe VI, et commanda une partie de l’armée française à Cassel, où il se conduisit d’une façon brillante. — Édouard, sire de-Beaujeu, né en 1316, mort en 1351, était fils du précédent, et devint maréchal de France. Après avoir bataillé contre les musulmans, il fut chargé par Philippe de Valois d’aller reconnaître les forces de l’armée anglaise, qui venait de passer la Somme (1346). Contrairement à son avis, on donna la bataille dans la plaine de Crécy (1346). Après la déroute de l’armée française, il fut un des cinq gentilshommes qui accompagnèrent Philippe VI de Valois à Broye, puis à Amiens, où il rassembla les débris de son armée. Nommé maréchai de France l’année suivante, après la démission de son beau-frère, de Montmorency, il marcha au secours de Godefroy de Charay, gouverneur de Saint-Omer, surprit les Anglais à Ardres (1351), les tailla en pièces, fit prisonnier Aimeri de Pavie, et périt sur le champ de bataille, âgé seulement de trente-cinq ans. On voit son nom inscrit sur les tables de bronze du palais de Versailles. — Antoine, sire de Beaujeu, fils du précédent, mort en 1374, se signala par sa bravoure à la bataille de Cocherel (1364), accompagna en Guienne et en Espagne le célèbre Bertrand Duguesciin, et mourut sans postérité à Montpellier, laissant la seigneurie de Beaujeu et celle de Dombes à Édouard II de Beaujeu. — {sc|Édouard}} II, sire de Beaujeu et petit-fils de Guichard VI, se vit contester la succession d’Antoine par la sœur de ce dernier, Marguerite, femme de Jacques de Savoie, prince d’Achaïe. Après de longs démêlés, il finit par s’arranger avec Jacques de Savoie (1383) ; puis il fut attaqué en justice par Béatrix, veuve de son prédécesseur, dont il avait saisi le douaire. Ayant jeté par une fenêtre un huissier qui venait lui faire une citation, au sujet d’un rapt qu’il avait commis, il fut saisi par des troupes employées contre lui, et jeté en prison à Paris par l’ordre du parlement. Il n’échappa à une juste peine que grâce à Louis de Bourbon, auquel il acheta sa liberté moyennant la cession de ses domaines (1400) dans le cas où il mourrait sans enfants, ce qui eut lieu quelques semaines après. C’est pendant qu’Édouard était seigneur de Beaujolais que des bourgeois et des officiers de Villefranche rédigèrent une espèce de code, contenant les coutumes, immunités et libertés de la ville (1376). Un des articles de ce code, approuvé par Édouard, porte qu’il est permis aux maris de battre leurs femmes, jusqu’à la mort exclusivement. — Pierre II de Bourbon, connétable de France, né en 1439, mort en 1503, reçut en apanage (1475) le Beaujolais et le comté de Clermont. Ayant épousé la fille aînée de Louis XI, Anne de France, devenue célèbre sous le nom d’Anne de Beaujeu, il eut un grand pouvoir pendant la minorité de Charles VIII, car il gouverna conjointement avec sa femme, devenue régente. À la mort de son frère Jean, Pierre entra en possession de tous les biens de la branche aînée des Bourbons. Il n’avait qu’une fille, Suzanne, qu’il maria à Charles de Montpensier, devenu plus tard si célèbre sous le nom du connétable de Bourbon. Louis XII consentit à ce que les duchés de Bourbonnais et d’Auvergne, ainsi que le comté de Clermont, passassent à ce dernier, de telle sorte que, grâce à cette alliance, le futur connétable devint un des princes les plus riches de l’Europe.


BEAUJEU (Anne de France, duchesse de Bourbon, dame de), fille de Louis XI et de Marguerite de Savoie, sœur et gouvernante de Charles VIII, et regardée, à ce titre, comme régente de France.

Le 25 août de l’an 1483, Louis XI, sentant prochaine cette mort que tant il redoutait, manda près de lui sa fille Anne, et son gendre monseigneur de Beaujeu ; il leur recommanda le roi son fils, et leur donna, dit Commines, toute la charge et gouvernement dudit roi.

Cinq jours après, le 30 août, à huit heures du soir, Louis XI, en dépit des reliques dont il avait dévalisé toutes les églises du monde, des prières de l’ermite calabrais, François de Paule, malgré les soins de Coictier, son médecin, et le sang des jeunes enfants qu’il buvait et humait, rapporte l’historien Goguin, pour réchauffer son sang refroidi..... mourut en sa prison-forteresse de Plessis-lez-Tours, dans sa soixante et onzième année, et après vingt-deux ans de règne.

D’un bout à l’autre de la France, un cri de joie répondit, unanime comme un écho, à la nouvelle de la mort du roi. Le monarque, sous sa main de fer, avait maté et contenu, durant tout son règne, nobles, clergé, parlement, peuple ; lui mort et sa main devenue impuissante, tous relevèrent la tête, crièrent, réclamèrent.

La noblesse reprochait au roi de s’être entouré de préférence de gens de basse condition, d’un Coictier, d’un Olivier le Daim ; de l’avoir abaissée, rapetissée, ridiculisée, anéantie, en la volant et l’égorgeant ; elle montrait les enfants de Nemours et les frères d’Armagnac, Saint-Pol, Croy, René…

Le parlement ne voulait point pardonner à l’ombre du roi terrible de s’être passé de lui ; Tristan, ses gibets et ses cages de fer lui avaient suffi en effet.

Le clergé criait aussi contre Louis XI, qui s’était moqué de lui comme du parlement, et aussi parce qu’il avait pris l’habitude de crier depuis la fameuse comédie par laquelle fut abolie la Pragmatique.

Le peuple s’élevait contre l’impôt, devenu excessif par la création de l’année permanente, et plus excessif encore par les exactions des percepteurs royaux.

Ce fut tout à coup un débordement d’ambitions et de passions, d’autant plus violent que violemment il avait été contenu : une exaspération générale, unanime, acharnée contre le fantôme, une réaction comme celle qu’on avait vue éclater cent ans auparavant, en 1314, sous Philippe le Bel. Et un instant, on crut que l’unité de la France allait de nouveau être brisée ; on vit déjà gisant à terre, réduit