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série d’Eludés philosophiques. Nous voulons cependant dire un mot, du Chef-d’œuvre inconnu, qui, pour tenir en quelques pages, n’en est pas inoins une des plus jolies Nouvelles qu’ait écrites Balzac. Il s’agit d’un peintre qui, depuis dix ans, travaille à un tableau. Personne n’a vu son œuvre ; car son œuvre à lui, ce

n’est pas une toile, c’est une femme ; une

femme avec laquelle il rit, il pleure, il cause, il pense ; cette femme n’est pas une création, c’est une créature ; cette peinture n’est pas une peinture, c’est un sentiment, une passion. Cependant lo peintre n’est pas complètement satisfait de son œuvre ; pour l’achever, ilflui faudrait un modèle parfait. Un de ses élèves se charge de le lui fournir ; il a une maîtresse d’une beauté idéale, et il la livre à son maître émerveillé, qui ne demande à la garder que pendant deux heures, après quoi il montrera son tableau achevé. Mais lorsque le peintre découvre sa toile, après ces deux heures de travail en face de la personne vivante, on n’y découvre que des couleurs confusément amassées, une multitude de lignes bizarres ; puis, dans un coin de la toile, le bout d’un pied nu, mais un pied..., un pied délicieux, un pied vivant ! Et cependant le peintre détaille son tableau, ombre par ombre, ligne par ligne ! 11 ne s’aperçoit pas des diversessuperpositions de couleurs dont il a successivement chargé toutes les parties de sa figure en voulant la perfectionner ! L’insensé a cru donner la vie, et il a fait œuvre de destruction ! Le Chef-d’œuvre du peintre restera toujours inconnu, mais celui du romancier est incontestable, et ce charmant récit, fort bien placé dans les Eludes philosophiques, est digne des meilleures créations de Balzac.

En résumé, les Études philosophiques puisent surtout leur valeur en ce qu’elles présentent le faisceau des vues d’ensemble de l’auteur, et que, sans philosophie, le savant n’est qu’un manœuvre, et l’artiste qu’un amuseur. On a vu ce qu’étaient la philosophie, la politique, la physiologie, la psychologie, la métaphysique de Balzac : un roman ; et nous ne reviendrons pas sur les critiques que nous avons eu occasion de semer ça et la dans cet article ; mais nous répéterons, avec M. Taine, qu’un cerisier doit porter des cerises, un théoricien des théories, et un romancier des romans.

Il existe encore dans notre littérature et dans celle des étrangers.un grand nombre d’ouvrages dans le titre desquels entre le mot Étude. Une bibliographie particulière nuus mènerait beaucoup trop loin ; nous allons donc nous borner à donner les titres des principaux de ces ouvrages ; du reste, la partie du titre qui suit le mot Étude détermine suffisamment la nature de l’œuvre, de même que le nom de l’auteur peut servir à en fixer le mérite :

Ktudes frunçuiftes ci étrangères, par Emile

Deschamps (1 vol. in-8° publié vers 1827).

IDtudes sur les poêles latins de la Déradouce, par Nisard (1834, 2 vol. in-8°).

Étude* critique*, par Philarète Chasles (Paris, 184(5-1804, 13 vol. in-12).

lïltude* littéraire* et historiques, par Cuvillier-Fieury (1854 et 18G0).

I£lude4 morales sur le temps prcieul, par E. Caro (1855, 1 vol.).

Études historiques et littéraires, par de

Barante (1857-1858, -t vol.).

Kiudes homérique», par Gladstone, chancelier de l’Echiquier (Oxford, 1858, 3 vol. in-s°).

Études de politique et île philosophie religieuse, par Ad. Guéroult (18G3, 1 vol.).

Elude sur la sigullication des tioms de

lieux eu Krnuco, par A. Houzé (Paris, 1866),

Étude philosophique sur Dieu et l’unie

par Gustave Grand (Paris, 1803).

Éludes ncndr.niiu.ucB (MÉTHODE DES), par

Schilling. V. méthode.

" Études parlementaire» ou Livre des orateurs, par Cormenin. V. ohateurs.

Étude de femme, et Autre étude de femme,

romans par H. de Balzac. V. scènes de la

vie PIÎIVÉE.

Études sur les tragiques grecs, par M. Patin. V. TRAGIQUE.

Étude do l’homme, par Laténa. V. HOMME. Étude» d’histoire religieuse, par Renan.

V. HISTOIRE.

Études sur le XVIII<* siècle, par Ernest"

Bersot. V. siècle.

ÉTUDIANT (é-tu-di-an) part. prés, du v. Etudier : Des jeunes gens étudiant avec ardeur. Courtisans, par intérêt soumis,

Amis de la grandeur, mais des lois ennemis, Et qui, toujours du prince étudiant les vices, Lui vendent des forfaits qu’ils nomment leurs services, M.-J. Chéhier.

ÉTUDIANTS, m. (é-tu-di-an —rad. étudier). Celui qui étudie : Jai été étudiant toute ma vie. (Dupin.) Il Celui qui fréquente les «ours d’une université ou d une faculté : Etudiant en droit, en fnédecine. Les étudiants de Liège. Le quartier des étudiants. La vie de I’ùtu- maNT, réputée si frivole et si joyeuse, est, au contraire, consumée tout entière dans le travail. (Teulet.) L’étudiant a plus de travers et de ridicules que de vices. (G. Sand.)

— s. f. Fam. Maîtresse d’étudiant : Toute étudiante pur-sang fume son petit cigare, de manière à faire envie aux femmes de lettres les plus célèbres. (L. Huart.) Le quartier latin est peuplé d’une foule de grisettes d’un genre particulier et qu’on nomme les étudiantes, bien qu’aucun observateur n’ait pu encore déterminer le genre de science qu’elles cultivent. (Th. Gaut.)

— Encycl, Hist. Il n’est pas inutile, selon nous, de parcourir la vie publique des ' 'étudiants. Retrouver leur trace dans les âges écoulés ; détacher du passé tout ce qui peut ramener la vie politique au sein de la jeunesse actuelle, tel pourrait ’être le but d’un travail plus complet que celui dont nous allons donner une esquisse. Ce travail, un écrivain compétent, Antonio Watripon, l’avait entrepris ; mais la mort est venue le surprendre avant qu’il eût pu mettre la dernière main à son Histoire politique des écoles et des étudiants, dont la première partie, 1815-1830, a seulement vu le jour en 1850 (in-8°). Cette première partie et la seconde, dont nous avons tenu le manuscrit entre nos mains, nous serviront de guide dans le résumé que nous abordons.

— I. Nous devons rappeler d’abord, au moins à titre d’introduction, ce qu’étaient les premières écoles dans les Gaules. Dès le ive siècle, il n’y a plus d’autres écoles que celles que les évêques ouvrent à l’ombre de leurs églises^et pour le clergé seul. Ce n’est qu’avec Charlemagne que les études refleurissent. Au commencement du xno siècle,

Abailard groupe autour de son enseignement un grand’ nombre d’élèves. » Bientôt après lui, dit Y Histoire littéraire de France, la multitude des étudiants surpassa, dans certains quartiers de Paris, le nombre des habitants, au point que l’on avait peine à •se loger. Il en venait de toutes les parties de l’Europe. La France, malgré son état féodal, était la seule nation qui offrit ces gages d’hospitalité, et le roi assurait aux étudiants étrangers des privilèges semblables àceux dont jouissaient les nationaux. La capitale s’enrichissait par l’affluence de tous ces aspirants à la science, parmi lesquels se trouvaient des princes et des rois. L’archiduc Léopold d’Autriche y vint faire ses études, et, vers la fin du siècle suivant, Charles de Luxembourg, roi de Bohème, et ensuite empereur d’Allemagne, prit l’école de Paris, où il avait été élevé, pour modèle de celle qu’il fonda depuis à Prague. On classa d’abord les élèves en quatré nations : France, Angleterre, Normandie, Picardie. Plus tard, sous Charles VI, lorsque l’Anglais fut expulsé de notre territoire, la nation allemande fut substituée à l’Angleterre. Forts de la protection royale, ces jeunes gens se laissaient aller a toutes leurs fantaisies. Ils avaient, au xmo siècle, surnommé les bourgeois, victimes de l’ignorance, cornificiens ; et ceux-ci, envieux des avantages des étudiants, se vengeaient en les appelant bœufs d’Abraham, ou bien encore ânes de Balaam." Un écrivain de ce temps représente les étudiants comme de francs débauchés : « Ils préfèrent quêter de l’argent.plutôt que de chercher l’instruction dans les livres ; ils aiment mieux contempler les beautés des jeunes filles que les beautés de Cicéron... » L’abbé Loboeuf, au contraire, cite une lettre où les témoignages d’estime sont prodigués aux étudiants de Paris. Alors comme aujourd’hui, il- y avait des jeunes gens studieux et d’autres qui menaient une vie folle et paresseuse. Les écoles étaient situées rue du Fouarre, ainsi nommée à cause de la paille ou feurre sur laquelle les écoliers s’asseyaient pendant les leçons. Ils logeaient chez des particuliers de la montagne Sainte-Geneviève, reconnus par l’Université sous le titre de grands messagers et chargés de communiquer avec les familles des étudiants, français ou étrangers. En 1218, l’oflicial de Paris défendit le port d’armes aux écoliers, sous peine d’excommunication. Tout le monde se plaignait de leur conduite tapageuse., et l’on voit, en effet, qu’ils ne se faisaient pas faute d’entrer à main armée chez les bourgeois, d’enlever les femmes et les filles.

« En 1-223, dit un historien, il s’éleva, entre les habitants et les écoliers, une querelle violente, lïois cent vingt clercs (ou étudiants) furent tués et jetés à la Seine. Des professeurs allèrent porter plainte auprès du pape ; quelques-uns se retirèrent avec leurs disciples hors de la capitale. Deux ans plus tard, l’Université s’étant donné un sceau, le légat cardinal de Saint-Ange le brisa. Aussitôt les écoliers s’armèrent et allèrent attaquer le légat dans sa maison, où ils l’auraient tué sans le secours que le roi lui envoya. Le légat, en quittant Paris, excommunia en bloc ses nombreux assaillants. »

Au carnaval do 1229, une bande d’écoliers, après avoir bu et mangé- chez un cabaretier du bourg Saint-Marcel, alors hors des murs, engagent une querelle au moment de payer, battent le cabaretier et sa femme. Les voisins mettent en fuite les agresseurs. Le lendemain, les écoliers reviennent en plus grand nombre, forcent la maison, brisent les meubles, répandent le vin, frappent et blessent plusieurs personnes. Le prévôt de Paris vient avec ses archers, et, rencontrant des écoliers qui jouaient paisiblement, fond’sur eux, les

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prenant pour les coupables ; deux Flamands sont tués, tandis que c’étaient des Picards qui avaient causé le mal. Les maîtres demandent réparation et ne l’obtiennent pas. Alors les écoles sont suspendues ; professeurs et écoliers quittent Paris et se dispersent en différentes villes : Reims, Toulouse, Montpellier, déjà célèbre par sa Faculté de médecine, Orléans et Angers reçurent ces émigratits, qui y jetèrent les fondements de nouvelles universités. La suspension des cours dé Paris dura deux ans.

L’année !251 revit les étudiants aux prises avec les bourgeois, malgré le serment qu’on leur avait fait prêter, ainsi qu’aux professeurs, de vivre en paix entre eux, et de dénoncer secrètement les fauteurs de désordres. Une nuit du carême de 1252, quatre écoliers sont arrêtés dans les rues de Paris par les archers du prévôt, dépouillés, battus, mis en prison : un d’eux perd la vie. L’Université fait fermer les écoles jusqu’à ce que réparation ait été faite. Deux des archers furent condamnés à la potence et les autres au bannissement.

Un règlement du légat du saint-siége- de 1276 porte que les écoliers, au lieu de célébrer les fêtes de l’Église par des exercices de piété, s’adonnaient aux excès du vin et à toutes sortes de dissolutions ; qu’ils prenaient les armes et couraient par troupes dans.- les rues de la ville pendant la nuit, troublaient le repos des habitants et s’exposaient eux-mêmes à tous les dangers. Il ajoute qu’il se trouvait des écoliers qui poussaient l’impiété jusqu’à jouer aux dés sur les autels en blasphémant le nom de Dieu. Jacques de Vitry, qui avait été écolier lui-même, achève le tableau en peignant les mœurs des étudiants de chaque nation qui abondaient à Paris. « Peu s’instruisent, à cause de la diversité de leurs opinions et de leurs pa3’S ; ils ne cessent de se quereller ;.. Les Anglais sont ivrognes et poltrons ; les Français fiers, mous et efféminés ; les Allemands furibonds et obscènes dans leurs propos de table ; les Normands vains et orgueilleux ; les Poitevins traîtres et avares ; les Bourguignons des brutaux et des sots ; les Bretons légers et inconstants ; les Lombards avares, méchants et lâches ; les Romains séditieux, violents, et se rongeant les mains de colère ; les Siciliens tyrans et cruels ; les Brabançons hommes de sang, incendiaires, routiers, voleurs ; quant aux Flamands, ils sont prodigues, aiment le luxe, la bonne chère et la débauche, et ont des mœurs très-relàehées. » Voilà un joli tableau 1

L’enceinte du quartier appelé pays latin, comprenant toutes les maisons d’instruction publique, commençait au pont de la Tournelle, passait derrière Sainte-Geneviève jusqu’à la porte Saint-Jacques, puis, descendant vers la Seine, elle se terminait où s’élevaplus tard le collège Mazarin ou des Quatre-Nations, aujourd’hui l’Institut. À la place de ce t édifice, se d ressaient alors la porte de Nesle et la fameuse tour où, prétend-on, Marguerite de Bourgogne attirait les écoliers pour assouvir avec eux sa passion et les faire ensuite, dit Villon, « jecter en un sac en Seine. ■ Cette circonscription était, pour ainsi dira, inviolable ; malheur à celui qui y poursuivait un écolier, même coupable. De "la rue Mazarine actuelle à la rue de Bourgogne, sur une longueur de 1,400 mètres environ, et depuis la Seine, au nord, jusqu’à la rue Saint-Dominique, au sud, sur une largeur de 400 à 450 mètres, s’étendait une vaste prairie, célèbre sous le nom de Pré aux clercs, et qui servait de promenade aux écoliers ou clercs. Ce lieu fut témoin de démêlés sanglants en 127S, et pendant plusieurs siècles, entre les étudiants et les moines de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, la première fois k propos

d’un mur, la seconde fois au sujet du, droit de pèche dans le canal de petite Seine, où les écoliers aimaient à venir prendre du poisson, puis à cause des envahissements de diverses parties du petit pré. Les luttes à main armée n’étaient pas rares à cette époque. Les écoliers furent une fois (juillet 1-404) assaillis par les sergents et les valets du seigneur de Savoisy et foulés aux pieds ; mais, sur la plainte de l’Université, le parlement ordonna la démolition de l’hôtel de Savoisy ; le seigneur fut condamné à cent mille livres d’amendes pour la fondation de cinq chapelles, à mille livres d’amende envers les blessés, et à pareille somme envers l’Université, etc.

Les écoliers de l’Université avaient leur fête des fous. Le 5 décembre, veille de la Saint-Nicolas, ils élisaient entre eux un évêque des fous, et l’ayant revêtu d’ornements pontificaux, le menaient chez les recteurs. En 1365, ce cortège eut maille à partir avec les sergents du guet, qui firent prisonniers plusieurs écoliers. Les professeurs virent là un grave attentat aux privilèges des écoles ; ils firent condamner les sergents du guet à la prison, à l’amende honorable, à la perte de leurs offices. Le lendit d’été et le lendit d’hiver, deux jours de promenades tumultueuses et de divertissements, offraient encore aux écoliers des occasions de scandales ; ils payaient les maîtres à ces deux époques, et allaient à Saint-Denis faire leur provision de parchemin à la foire ouverte avec la permission et en présence du recteur, qui prélevait un droit.

— II. À mesure qu’on s’éloigne du moyen âge, les écoliers, tout en pefdant de leur originalité, ne cessent pas de se montrer turbulents et indisciplinés. À la foire Saint-Ger ETUD

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main de 1609, on les voit se livrer à toutes sortes de débauches, lutter en batailles rangées avec les pages, les laquais et les soldats aux gardes. L’Estoile nous apprend « qu’un laquais coupa les deux oreilles à un écolier et les lui mit dans sa pochette, dont les écoliers mutinés, se ruant sur tous les laquais qu’ils rencontraient, en tuèrent et blessèrent beaucoup. » Les étudiants, sous Louis XIII, sont « plus débauchés que jamais, portant armes, pillant, tuant, paillardant et faisant plusieurs autres méchancetés" ; les maîtres desquels négligent d’y mettre ordre, et ainsi, dérobent l’argent de leurs parents en « débauches, saletés, et quelquefois emportent l’argent de leurs maîtres, en changeant tons les mois de nouveaux... » (Caquets de l’accouchée.)

Les écoles, en attirant une foule considérable de jeunes gens, et en forçant, pour ainsi dire, la cité à élargir son enceinte, avaient principalement contribué à faire do Paris le centre le plus puissant, L’agent lo plus actif de la civilisation. Elles étaient un foyer de discussion, un vaste laboratoiro d’idées. Le libre arbitre trouve ses plus hardis défenseurs parmi les écoliers. Combien sont suppliciés, pendus, brûlés vifs dans dos cages de bois, après avoir "été convaincus d’hérésie, pour avoir osé soutenir la liberté de conscience ! « On se tromperait étrangement, dit Antonio Watripon, si on jugeait les étudiants d’autrefois par leur côté apparent : défis de buveurs, taverniers battus, querelles au Pré aux clercs, femmes de marchands enlevées, expéditions dans la ruelle du Val d’Amour en compagnie de ribaudes et de truands, meurtres et rapines : c’est tou-jours le même tableau à la superficie ; mais, au fond, il y a quelque chose de plus sérieux que vous n’apercevez pas d’aooid, et qui marche toujours, c’est l’idée I Ce pauvre étudiant, logé au collège de Fortet, et qui a fait son droit à Orléans, est l’objet des persécutions du parlement. Le recteur est mandé à la barre, on lui ordonne de mettre en prison cet étudiant soupçonné d’hérésie ; il aie bonheur de se réfugier en Saintonge. Bientôt le monde entier saura qu’il s’appelle Calvin. Les livres protestants sont brûlés, les imprimeurs sont jetés dans les cachots de l’évêché. Ces persécutions ont pour effet de grossir les rangs des réformés. »

La réputation des écoles françaises se répandit au loin, et leur influence civilisatrice féconda même quelques institutions utiles, autant chez les peuples voisins que chez nous. Les écoles de Paris, qui entretenaient depuis longtemps des messagers à leurs frais, donnèrent l’idée de l’institution des postes et des messageries. Les étudiants rendirent de non moins grands services aux sciences, aux lettres et aux arts. De leurs rangs sortirent, au xviie et au xvmc siècle, des artistes et des écrivains’ qui sont restés la gloire de la France. Ils défrichèrent le champ philosophique où germait la Révolution. Le pays latin’, malgré son nom antique, était réputé la patrie des idées nouvelles, des pensées hardies et le centre du bon goût. « Quand la Comédie-Française était dans le pays latin, dit Mercier, le parterre était beaucoup mieux composé qu’il ne l’est aujourd’hui (1783). Ce parterre savait former des acteurs. Ceux-ci, privés de l’utile censure que les étudiants exerçaient, se pervertissent devant un parterre grossier, parce qu’on n’y voit plus que les courtauds de boutiques de la rue Saiiit-Honoré et les petits commis de la douane et des fermes. Ainsi la perfection-d’un art tient à des rapports presque insensibles et rarement aperçus. »

— III. Un grand nombre d’étudiants étaient initiés à la franc-maçonnerie et aux Sociétés occultes qui précédèrent la Révolution. Ils saluèrent avec enthousiasme l’ère de notro émancipation politique. Le premier acteur de ce grand drame, Camille Desmoulins, sortait à peine des bancs de l’École de droit. La plupart des orateurs ou hommes politiques do nos grandes Assemblées : constituante, législative, Convention, étaient d’anciens étudiants. On voit, dès 1789, les élèves en droit et en médecine des départements fraterniser avec ceux de Paris et travailler ainsi à l’unité des idées, conséquence de l’unité territoriale. Beaucoup volent aux frontières menacées. Au 9 thermidor, ('étudiant en médecine Soubervielle rallié autour de lui les étudiants patriotes de Paris, et un grand nombre d’entre eux s’apprêtent, en cas d’insurrection, à voler au secours des principes sacrés qui vont périr avec les derniers montagnards.

Pendant le Directoire, les généreux élans d’une minorité de jeunes gens se perdent nu milieu des orgies de la jeunesse dorée. Le despotisme impérial pesa sur les étudiants comme sur tous les autres citoyens. Cependant, chez eux, comme chez les élèves de l’ér cole polytechnique, l’idée républicaine resta vivace. Aussi jouèrent-iis un rôle important comme citoyens au milieu des faits qui furent le développement de la grande tradition révolutionnaire.

C’est au delà du Rhin, pour la première fois *■ dans le xixe siècle, que se manifestent, par contre-coup, ainsi que le fait observer Antonio Watripon, la résurrection des idées démocratiques et le tressaillement du progrès révolutionnaire. La campagne.d’Allemagne est fertile en épisodes qui prouvent lu part