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haut les rois d’Asie devenus ses tributaires ; avec les Gaulois, elle eut toujours quelques ménagements conseillés par la prudence, jusqu’à ce qu’enfin, la dernière barrière étant tombée avec Mithridate, la Galatie, comme tout le reste de l’Asie Mineure, fût, sous le règne d’Auguste, réduite en province romaine.

Jusqu’à l’année 154 avant l’ère chrétienne, Rome n’avait rencontré les Gaulois que hors de leurs domaines et, pour ainsi dire, à l’état de campement. Une occasion se présenta pour Rome de passer les Alpes pour la première fois ; elle fut saisie avec empressement. À dater de ce moment et pendant un siècle, on voit s’introduire dans les vieilles Gaules les intrigues du sénat romain et les légions à la suite. Les aigles avancent lentement, mais elles avancent toujours et no reculent jamais. Unis, les Gaulois n’eussent jamais été vaincus ; divisés, ils devaient l’être, de telle sorte que leur longue résistance, illustrée par des actes héroïques, finit par l’absorption des Gaules dans le monde romain, qui était alors le monde universel.

C’est cette dernière partie de l’histoire dos Gaulois qu’il nous reste à exposer. Mais, comme le récit des dernières luttes, qui furent les plus brillantes, a trouvé sa place dans la vie de César, pour ne pas nous répéter, nous passerons rapidement sur cette époque de notre histoire.

Depuis dix siècles environ qu’ils s’étaient fixés dans le pays, les Gaulois s’étaient peu modifiés. Ils étaient restés barbares. Ils se plaisaient aux sacrifices humains et affichaient un grand mépris de la mort. Nous avons exposé au mot druide leur religion, mélangée de polythéisme grec introduit sans doute par les Phôn iciens, et de ce naturalisme originaire où l’on retrouve, comme dans l’Inde, le dogme de la métempsycose. Si les mœurs vêtaient féroces, elles y étaient pures, et la chasteté des femmes était proverbiale. En politique, pas de constitution écrite, point de droits reconnus, mais le despotisme absolu dune multitude de grandes familles qui, par des élections factices, perpétuaient leur domination avec la connivence des druides. Les arts et les sciences enfin avaient fait quelques progrès. Les Gaulois avaient inventé la charrue à roues, les. cribles de crin, l’emploi de la marne comme engrais, les procédés de l’étamiige et du placage, la trempe du cuivre, le tissage et la teinture des étoffes. Ce n’était pas un peuple sans génie, tant s’en faut ; mais il était absolument dépourvu d’esprit politique, et ce fut sa perte, si tant est qu’on doive déplorer une conquête qui devaitles doter de deux grands bienfaits, une constitution politique et une législation.

Pour l’intelligence de ce qui va suivre, il ne nous reste plus qu’à faire un rapide dénombrement des Gaules telles qu’elles s’offraient à la première invasion des Romains.

1° Au sud, les Aquitains et les Ligures, d’origine ibériennne. Capitales : Narbo, Tolosa, Burdigala. L’Aquitain était vif, intelligent et brave, mais vantard et rusé. C’est le Gascon de nos jours ; le Ligure, sobre, économe et dur au travail ; sol riche, mais mal cultivé, habitants pauvres. Les Massaliotes les entraînèrent peu après dans leur orbite et les déshabituèrent du origandage.

2" Au centre, la vraie famille gauloise où dominaient les Arvernes (Auvergnats), les Eduens (Bourguignons), les Séquanais (Francs-Comtois), Tes Bituriges (du Berry), les Carnutes (de la Bëauce), les Cadurkes (du Quercy), les Allobroges (des Hautes-Alpes), les Helvètes (Suisses), etc., etc. Ceux-ci ne ressemblaient en rien aux Aquitains et aux Ligures. Hardis, violents, bruyants, impétueux, propres à tout comprendre et à tout entreprendre, ils sont restés le type primitif des Français des temps modernes. Entre tous ces peuples, il régnait une profonde et implacâble inimitié, et ce fut la cause principale de leurs désastres.

30 Gallo-Kymris, mélange de Galls originaires et de Kymris envahisseurs, constituant principalement la confédération armoricaine. De la Garonne à la Seine, ils occupaient toute la partie occidentale des Gaules. Là se trouvaient les Santons (de Saintes), les Nannètes (de Nantes), les Vénctes (de Vannes), les Aulerques (d’Evreux), etc. Moins industrieux que les Gau/ois, lesKymris’étaient plus pauvres ; de là un âpre sentiment d’indépendance et de jalousie invétérée, qui les précipita tous ensemble dans la servitude.

4° Kymris-Belges, entre la Seine, la Marne, la chaîne des Vosges, le Rhin et l’Océan. Au premier rang venaient les Trévises, nation considérable dont la cité principale, Trêves, eut l’honneur de devenir la capitale des Gaules ; puis les Eburons (de Liège), les Nerviens (de Namur), les Rémois (de Reims), les Atrébates (d’Arras), les Ambaces (de la Somme) et les Morins (des côtes de l’Océan). Ces tribus étaient restées plus farouches que toutes les autres. Plus éloignées des centres do civilisation méridionaux, elles en avaient moins ressenti l’influence. Le commerce y était nul et la culture presque ignorée.

Tel était, à vol d’oiseau, l’état des Gaules dans.le milieu du siècle, lorsque apparureût la toge et les enseignes romaines.

Dans ce dénombrement, nous n’uvons pas compris la cité massaliote, dont le peuple cultivé, lettré, souvent artiste et industriel, n’appartenait pas ù la fumille ijauloise et sa

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tenait en dehors de toutes les associations politiques.

En l’an 154, une querelle surgit, et elles n’étaient pas rares, entre les Massaliotes et les Ligures ; elle fut portée devant le sénat romain. C’était à peu près la répétition du débat survenu autrefois entre les Gaulois d’Italie et les Etrusques. Le sénat procéda de même et envoya des députés. Surgit une altercation où deux Romains sont tués. Il n’en fallait pas tant à l’ambition romaine pour faire de ce débat étranger sa propre cause. Trois légions sont dirigées sur le pays en litige. Tout plie devant elles. Les consuls Flaccus et Sextius attaquent même des peuples paisibles, tels que les Voconces et les Saliuviens, prennent possession du pays et y fondent une colonie, qui est aujourd’hui la ville d’Aix en Provence. On dirait, mise en action, la fable de YOuitre et les Plaideurs.

Vingt ans après, la guerre éclate entre les Eduens et les Allobroges. Par l’entremise des Massaliotes, Rome intervient encore, et, s’attachant de préférence au peuple le plus puissant pour en faire le pivot de ses intrigues futures, elle conclut avec les Eduens un traité de paix et d’amitié, où elle les qualifie pompeusement d’amis et d’alliés du peuple romain. La sotte vanité du peuple qui accepta cette dangereuse amitié fut pour les Gaules le premier anneau de leurs chaînes.

Les Arvernes et les Allobroges se coalisent contre les Eduens et la guerre éclate : troisième prétexte d’intervention pour Rome, qui prend feu pour ses amis et écrase successivement leurs adversaires. Les Allobroges répondirent mal à leur réputation de bravoure, ils se débandèrent au premier choc ; mais les Arvernes firent meilleure contenance. Fier et plein de jactance à l’aspect des petits bataillons romains, dont il était loin de soupçonner la force, le roi des Arvernes s’était écrié avec mépris : • Quoil ce n’est pas un repas de mes chiens 1 » La mêlée s’engagea. Elle fut affreuse. Cent vingt mille Gaulois y périrent. Bituit s’échappa ; mais, pris par trahison, il fut envové à Rome d’où il ne revint plus. Le sénat déefara les Allobroges sujets du peuple romain, réunit leur territoire aux conquêtes déjà faites sur les Ligures, et du tout il composa une province. Mais, avec les Arvernes, il vit qu’il fallait compter. Il ne confisqua aucune partie de leur territoire et ne leur imposa même aucun tribut. C’était la tâche de l’avenir.

Le but principal du sénat, lorsqu’il s’arrogea les terres des Allobroges, était de s’assurer les passages des Alpes. Puis, pour se tenir en garde contre l’inconstance des Massaliotes, déjà inquiets des suites de leur imprudence, il fonda à Narbonne une colonie romaine, véritable petite Rome, image de la grande patrie dont elle reflétait le génie, nouvelle base pour des opérations futures. L’influence romaine gagnant de proche en proche, toute l’Aquitaine lui fut bientôt soumise ou inféodée. Les Gaulois du centre ne paraissaient pas s’inquiéter beaucoup des envahissements de cette puissance dont ils ne

soupçonnaient pas les desseins ; et ils n’auraient pas discontinué leurs guerres privées, si un terrible orage venu du Nord n’eût menacé d’engloutir tout à la fois les vainqueurs et les vaincus.

An 113. Chassées par un tremblement de terre qui avait bouleversé leurs demeures, d’innombrables hordes kymriques et teutoniques, qui habitaient les bords de la Baltique, se précipitèrent en masse vers le sud de l’Europe en poussant tout devant elles. Jamais pareil tumulte ne s’était produit dans les populations humaines. Ces hordes étaient éminemment guerrières : elles avaient deux chefs remarquables, Boio-Rix et Teutobokus, géants du Nord qui franchissaient d’un saut six chevaux rangés de front. Le bruit de leur arrivée s’annonçait par de bruyantes clameurs et leur passage se signalait par des désastres et des ruines. Bientôt elles arrivèrent aux frontières des Gaules et de la république. Raconter leurs expéditions, leurs sept grandes batailles et -leur défaite, qui a porté au plus haut degré de renommée ie nom de Marius, serait sortir de notre sujet. Nous n’en dirons que la part qu’y prirent les Gaulois et les graves conséquences qui en résultèrent pour leur liberté.

Les Belges soutinrent le premier choc, puis ils traitèrent avec les envahisseurs en leur cédant la ville d’Ailuat, destinée à devenir l’entrepôt de leur butin. Par les Alpes Noriques, une partie des Kymris parvint en Helvétie et dans les Kymris sédentaires, Tigures et Ambres, reconnurent d’anciens membres de leur famille. Le goût des aventures se réveillant chez ces demi-barbares, ils renforcèrent les bandes et descendirent avec elles dans la vallée du Rhône. Rome s’émut pour sa Province, et d’autant plus que les déprédations de ses proconsuls lui avaient déjà aliéné jusqu’à ses premiers partisans. Les Tectosages de Toulouse étaient, comme les Ambres, fortement tentés de s’allier à leurs frères du Nord. Le consul Cépion les prévint et mit à sac leur ville, la plus riche dos Gaules après Marseille. Après une excursion en Espagne, les hordes revinrent sur le Rhône et se partagèrent en deux courants : l’un de Kymris, qui, par les Alpes Tridentines, giigmi la haute Italie ; l’autre de Teutons et d Ambres, qui ravagea la Province. Le consul Ciissiiis uvuit e^aajé de les arrêter à

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Genève, et il avait été battu. Les consuls Manlius et Cépion furent encore moins heureux sur le Rhône ; leurs camps furent forcés, toute la savante discipline romaine échoua contre la fureur kvmrique ; 80,000 soldats romains tombèrent dans une seule bataille, et il ne s’en échappa que dix. Rome trembla pour elle-même, les souvenirs de l’Allia se réveillèrent dans tous les esprits. On appela Marins.

Chacun sait comment, par un courage au-dessus de tout éloge, par une fermeté presque cruelle, et surtout par d’habiles manœuvres, le grand homme de guerre parvint à écraser successivement les Ambro-Teutons près d’Aix et les Kymris dans les plaines de Verceil ; deux victoires qui, dans la mémoire des hommes, n’ont d’égales que celles de Marathon et de Châions, ou fut aussi sauvée la civilisation. Mais ce qui n’a pas été assez remarqué, c’est le profond ressentiment que Rome conçut contre les Gaulois, pour avoir secondé ou laissé passer les barbares. À dater de ce moment, toutes les entreprises

firojetées contre les Gaules devinrent popuatres à Rome, et la conquête complète en fut méditée.

Mais, dans la Gaule centrale comme dans une partie de l’Aquitanique, l’animation contre Rome n’était pas moins vive. Puis les troubles de la métropole se répercutaient dans les provinces. Dans les guerres civiles, l’Aquitaine prit le parti de Sertorius. Le soulèvement devint général. Narbonne et Massalie furent assiégées. Puis l’insurrection, trop partielle et trop faible, fut étouffée dans les proscriptions et les supplices. Une misère affreuse désola ces belles contrées, naguère si florissantes. Elles devinrent désertes, et Rome dut les repeupler par des colonies militaires. Sûre désormais, à ce prix, de la fidélité de la Province, elle attendit, pour s’étendre vers le nord, une occasion qui ne tarda pas à se présenter.

Nous sommes au commencement du ter siècle avant l’ère chrétienne. Le sort des Gantois devient de plus en plus critique. Par la province Narbonnaise, Rome les enveloppe au midi, tandis qu’au centre, chez les Eduens, elle entretient un foyer d’intrigues. Sur les bords du Rhin apparaissent chaque jour de nouvelles hordes, que les intarissables steppes du nord vomissent sans cesse sur l’Europe méridionale. Si, dans ces conjonctures menaçantes, les peuples de la Gaule eussent été doués de l’ombre d’un sentiment politique, ils auraient compris la nécessité d’une organisation unitaire, ou du moins d’une fédération assez puissante pour réunir les forces éparses et faire face de tous côtés aux dangers communs. Loin de là, c’est ce moment critique qu’ils choisirent pour se diviser de plus en plus. Orgueilleux d’un patronage qui aurait du les humilier, les Eduens s’en autorisèrent pour tyranniser les autres tribus galliques. Possesseurs dos rives de la Saône, ils établirent sur cette rivière, au préjudice des Séquanais, des droits de péage excessifs, qui gênaient leur commerce avec le midi. Les Séquanais lésés se liguèrent avec les Arvernes contre les Eduens, et, prévoyant que Rome ne faillirait pas à secourir ses amis, ils eurent la malheureuse idée d’appeler dans les Gaules, pour les opposer aux Romains, les peuplades germaines qui s’étaient avancées jusqu’aux frontières de leur territoire. C’était, en réalité, se créer deux ennemis au lieu d’un, et, pour la réparation d’un dommage supportable, mettre -en péril l’indépendance de toutes les tribus galliques.

Le chef des Germains, Arioviste, ne se fit pas prier, À la tête de l’élite de ses troupes, il entra dans les Gaules, battit les Eduens, exigea d’eux des otages et termina promptement cette guerre funeste. Mais le climat des Gaules policées et cultivées lui paraissant préférable à l’âpre climat de la Germanie, il exigea pour prix de ses services une cession de territoire. Les Séquanais se récrièrent. Arioviste se rit de leurs plaintes. À son appel descendit du Nord une nouvelle inondation de Germains. Il fallut combattre. Or les Gaulois de l’Est, à moitié civilisés, n’avaient plus la vigueur des tribus sauvages et n’avaient pas encore la force que donne la discipline. Vainement les Eduens, émus du péril commun, oublièrent-ils un moment leurs griefs particuliers pour s’unir aux Séquanais et aux Arvernes ; tous ensemble ils furent vaincus à la mortelle journée de Magetobria, qui coûta à la Gaule des torrents de sang, et, mieux que cela, son indépendance.

L’insolent vainqueur germain resta campé dans les Gaules, mais sans s’immiscer dans un gouvernement qu’il eût été aussi incapable de diriger que de comprendre. Mieux valait peut-être lui céder quelque partie de territoire et l’attirer par tous les attraits d’une civilisation supérieure dans une alliance commune. Mais les Eduens, qui avaient repris le pas sur leurs voisins, en appelèrent à Rome, et Rome leur envoya César.

Il apparaît enfin pour la première fois dans l’histoire des Gaulois, ce grand nom qui y projette un reflet sinistre. Talent militaire hors ligne, éloquence entraînante, génie de l’intrigue, ambition démesurée, activité prodigieuse, tout se trouve réuni dans cet homme providentiel ou fatal, destiné à changer la face des empires et a lancer le monde dans des voies nouvelles. Pour le malheur des Gau GAUL

les, Il fallut que cet ambitieux eût besoin de les bouleverser pour acquérir de la gloire, du prestige, de la popularité et des légions dévouées a sa fortune, avant de bouleverser sa propre patrie. À dater de son arrivée, l’histoire de la Gaule devient la sienne. Nous les avons, ces annales, écrites de sa main, et, en les analysant, nous avons dû soulever plus d’une fois le coin d’un voile qui recouvre des cruautés gratuites, indignes du caractère d’un grand homme. L’astre au front rouge de sang qui se levait sur les Gaules annonçait le massacre des Helvètes, l’extermination des Eburons, le supplice des sénateurs et des héros de la Gaule, le sac d’Avaricum, le cachot de Vercingétorix, et, pour résultat suprême, l’asservissement du pays. Ici nous ne pouvons qu’exposer la cause occasionnelle de ces événements racontés ailleurs (v. la biographie de César) et terminer par quelques réflexions.

Trop resserrés dans leurs montagnes et menacés par le voisinage des Germains qui, périodiquement, passaient le Rhin et faisaient

des excursions sur leurs terres, les Helvètes projetèrent une émigration en masse et jetèrent leur dévolu sur les contrées occidentales comprises entre les embouchures de la Charente et de la Gironde. Four y parvenir, il fallait passer ou par la Province romaine ou par le territoire de nations indépendantes. Rome refusa le passage par la Province ; c’était son droit, mais il n allait pas plus loin, et puisque les Eduens consentaient à livrer le passage aux émisrants, on ne voit pas à quel titre leur alliée les aurait protégés plu3 qu’ils ne désiraient l’être. Mais, après une série d’intrigues et d’actes de la plus mauvaise foi, .Rome envoya des légions à la poursuite des Helvètes. En une seule campagne, César écrasa les tribus émigrées, en renvoya les débris dans leurs repaires, puis s’attaqua, toujours sous couleur de protectorat, au Germain Arioviste, qu’il défit complètement et rejeta au delà du Rhin. Sa tâche paraissait donc terminée.Hélas ! elle ne faisait que de commencer, et lorsque, à leur grande surprise, les Gaulois virent les légions romaines s’établir en permanence sur leur territoire, elles finirent par comprendre que de tels protecteurs sont plus dangereux que des ennemis. L’allié des Eduens d’abord et des Rèmes ensuite devint leur maître absolu, et toutes les convulsions de la Gaule expirante ne pouvaient plus que la jeter, ruinée et affaiblie, à ses pieds.

Sous la domination romaine, le caractère des Gaulois, éminemment sympathique et ouvert à toutes les impressions inorales, se modifia un peu et prit plus de consistance. Les barbares du Nord qui débordèrent ensuite ylaissèrent moins de traces. Le Gaulois se retrouve encore dans le Français de nos jours, aventureux, ingénieux, brave et joyeux jusque dans l’adversité. Est-ce don de race ou saveur du sol ? Il y a de tout dans le produit supérieur de la civilisation, et l’on peut affirmer, sans être trop Gaulois, que jamais race mieux douée n’a habité un plus beau pays.

Gaulois (histoire des), par AmédéeThierry (182s, 3 vol. in-8"). Cet ouvrage, tout à fait neuf et original, se distingue par la science et l’esprit philosophique qui caractérisent les ■ grands travaux historiques de notre époque. Il commence aux temps les plus reculés pour s’étendre jusqu’à l’entière soumission de la Gaule à lu domination romaine. Par ce livreT" M. Amédée Thierry ne tarda pas à conquérir un rang élevé parmi nos historiens, et l’on peut regarder aujourd’hui l’Histoire des Gaulois comme un monument classique faisant autorité, à peu d’exceptions près, dans les matières si délicates des origines delà nation gauloise. Parmi les plus beaux chapitres de "ouvrage, on doit citer ceux qui contiennent la lutte des Arvernes sous Vercingétorix et les destinées de l’empire gaulois fondé par le Batave Civilis. L’auteur, dans son Introduction, établit un système qui lui est propre. Ce système a reçu, dans les dernières éditions, plus de développement et de rectitude ; il est donc équitable de l’apprécier d’après la refonte qu’il a subie. En entreprenant de remonter aux origines gauloises, l’auteur était le premier historien a tenter d’amener aux proportions d’une histoire les lambeaux disséminés dans les auteurs grecs et romains. C’était un dessein hardi que de chercher à introduire l’unité et à porter la lumière dans un chaos plus obscurci que débrouillé par les théoriciens du xvme siècle. Le progrès continu des connaissances ethnologiques, l’étude des idiomes gaulois et des antiquités nationales, les recherches de l’érudition allemande ont démontré que l’auteur s’était engagé dans une voie raisonnable ; et, d’autre parc, une critique sérieuse, reprenant les parties douteuses de la question, a notablement servi à l’amélioration de l’œuvre primitive. Le problème consistait à déterminer les éléments ethnologiques de la grande famille gauloise, à rechercher de quelles races elle se compose, à retracer son caractère et ses moeurs, à suivre enfin ses destinées sur tous les points du globe, tant que la nation fut en possession de son indépendance barbare. Les idées émises par M. Ara. Thierry on t été adoptées dans l’enseignement des écoles et dans les travaux

récents qui traitent de l’histoire de France.

L’ouvrage est distribué en neuf livres, non compris l’introduction génénile, dont l’étuu-