Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 8, part. 2, Fj-Fris.djvu/130

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ment ambitieux à qui tes yeux de Dieu ne suffisent point. (Boss.) Nous avons horreur de cette brutalité qui, sous les faux noms d’ambition et de gloire, va follement ravager les provinces. (Fén.) Le monde paraît follement étrange quand on le revoit après une longue absence. (Mme E. de Gir.)

Des jugements d’autrui nous tremblons follement.
Boileau.
J’aime mieux mettre encor cent arpens au niveau,
Que d’aller follement, égaré dans les nues.
Me lasser à chercher des visions cornues.
Boileau.

FOLLEN (Auguste, Adolphe-Louis), poète allemand, né à Giessen (Hesse-Cassel) en 1794, mort à Berne, en Suisse, le 26 décembre 1855. Il étudia la théologie et la philologie dans sa ville natale, servit dans la guerre contre la France, en 1814, et devint, en 1817, un des rédacteurs de la Gazette universelle d’Elberfeld. Compromis dans les affaires politiques de 1819, il fut emprisonné à Berlin pendant deux ans, se retira ensuite en Suisse, enseigna, à Aarau, la langue et la littérature allemandes, devint successivement citoyen de Zurich et membre du Conseil suprême, et se retira à Berne en 1854. Il a traduit les Hymnes homériques, en collaboration avec M. Schwenck (Giessen, 1814), et un volume d’Hymnes religieuses latines (Elberfeld, 1819). Ses autres principales productions sont, outre des ouvrages satiriques : un poème épique intitulé : Tristans Eltern (Giessen, 1814) ; Libres accents de la vaillante jeunesse (Iéna, 1819) ; Musée de la poésie allemande (1827, 2 vol.) ; Malegys et Vivian, roman de chevalerie ; Aux profanes, aux méchants, feuille d’un oublié (Heidelberg, 1846) ; les Ancêtres de Tristan, épopée romantique en 20 chants, publiée d’après ses manuscrits (Giessen, 1857).

FOLLEN (Charles), écrivain allemand, frère du précédent, né à Giessen (Hesse-Cassel) en 1795, mort dans l’incendie du Lexington, dans le détroit de Long-Island, le 13 janvier 1841. Il fit, avec son frère, la campagne de 1814 contre la France, fut reçu, en 1818, docteur en droit civil et ecclésiastique, et devint, cette même année, professeur agrégé à l’université de Giessen ; mais ses opinions libérales et sa participation aux mouvements révolutionnaires qui agitaient l’Allemagne à cette époque, brisèrent sa carrière. Impliqué dans l’assassinat de Kotzebue, il fut forcé de se réfugier à Paris. De là il passa en Suisse, où il fut successivement professeur de latin et d’histoire, à Coire (Grisons), et professeur de droit et de métaphysique à l’université de Baie. Mais les puissances alliées allemandes ayant demandé et obtenu son extradition comme révolutionnaire, il se vit encore obligé de fuir, gagna le Havre, s’embarqua pour les États-Unis et arriva à New-York en 1825. Il fut immédiatement nommé professeur de langue allemande à l’université d’Harvard. En 1835, il devint pasteur d’une Église unitaire de New-York et il allait prendre la direction d’une Église de la même communion dans le Massachusetts lorsqu’il périt dans la terrible catastrophe du Lexington. Le docteur Follen a publié une Grammaire allemande fort estimée et un Cours de lectures dans la même langue ; il a collaboré à un grand nombre de revues et a longtemps fait des cours publics. Ses sermons, ses leçons, des fragments d’un ouvrage sur la psychologie qu’il n’a jamais terminé et sa biographie, par Mme Follen, ont été publiés en 5 volumes (Boston, 1841). Pendant toute la durée de son séjour aux États-Unis, le docteur Follen a été l’un des plus ardents promoteurs du mouvement antiesclavagiste. — Follen (Elisa Lee, dame), femme du précédent, née à Boston (États-Unis) en 1787, épousa le docteur Follen en 1828. On lui doit : Choix de Fénelon (1827-1828) ; Heures bien employées ; Manuel de l’instituteur chrétien (1829) ; un grand nombre de livres pour les enfants (1829-1834) ; le Sceptique (1835) ; Vie matrimoniale, Petites chansons et un volume de poésies (1839). De 1843 à 1850, elle a dirigé la publication de l’Ami des enfants, et a publié, en 1857, les Contes du crépuscule. Depuis 1859, elle a donné une Seconde série de petites chansons, et une compilation intitulée : Drames de famille.

FOLLET, ETTE adj. (fo-lè, è-te — dimin. de fol). Fam. Un peu fou. : Si je questionnais le chevalier de Boufflers, je lui demanderais comment il a été follet pour aller chercher ces malheureux confédérés qui manquent de tout et surtout de raison. (Volt.)

Poil follet, Cheveux follets, Poil, cheveux courts, légers et blonds, comme ceux qui poussent au visage à l’époque de la puberté, et ceux que l’on a ordinairement sur la nuque :

.....Que d’autres, narguant les sarcasmes jaloux,
Vantent un poil follet au-dessus d’une bouche.
Sainte-Beuve.

|| Duvet qui vient avant les plumes, chez les petits oiseaux : Ces serins n’ont encore que du poil follet.

Esprit follet ou, substantiv., Follet, Sorte de lutin à qui les croyances populaires attribuaient de petits tours malins, souvent empreints d’une douce bienveillance pour l’homme : Il n’était pas rare de voir des esprits follets faire le travail des ménagères, pour jouir de leur surprise.

Le follet fantastique erre sur les roseaux.
V. Hugo.
Il est au Mogol des follets
Qui font office de valets.
La Fontaine.

— Météorol. Feu follet, Exhalaison d’un gaz qui s’enflamme à l’air, et qui se dégage assez fréquemment dans les cimetières, les marais et autres lieux qui contiennent des matières organiques en décomposition : Les feux follets sont encore la terreur des villageois. (Denne-Baron.) || Fig. Ardeur passagère, éclat fugitif : Cet amour n’est qu’un feu follet qui s’éteindra demain. Les pensées brillantes sont des feux follets qui brillent et s’évanouissent.

— Substantiv. Personne follette, badine :

Par les yeux d’Annette
L’Amour m’a blessé ;
Elle est trop jeunette ;
Mais je suis forcé
D’aimer la follette.
***

— s. m. Véner. V. folilet.

— s. f. Pathol. Nom populaire d’un catarrhe épidémique, souvent accompagné de pneumonie.

— Bot. Nom vulgaire de l’arroche des jardins ou bonne-dame.

— Encycl. Feu follet. V. feu.

FOLLETIÈRE (la), village et comm. de France (Calvados), cant. d’Orbec, arrond. et à 24 kilom. de Lisieux ; 286 hab. Sur le territoire de cette commune, à 4 kilom. du village, se trouve la belle source de la rivière d’Orbec, dont les eaux, d’une limpidité remarquable, jaillissent au pied d’un coteau à base crayeuse, et font tourner un moulin à quelques pas de leur naissance.

FOLLEVILLE, village et comm. de France (Somme), cant. d’Ailly-sur-Noye, arrond. et à 16 kilom. N.-O. de Montdidier ; 194 hab. Le château, aujourd’hui en ruine, date du xve siècle. Il fut pris, en 1439, par 2,000 Anglais, commandés par le comte de Sommerset et par Talbot. Il en reste deux tours rondes, l’une au S.-O., l’autre au N. Dans celle du S.-O., assez bien conservée, se voient deux cheminées superposées. La tour du N., qui renferme un escalier à vis, se fait remarquer par l’élégance et l’originalité de sa construction. « Le soubassement, dit M. E. Pénel, se compose d’une tour ronde, dont les mâchicoulis sont presque intacts ; puis la construction se rétrécit et prend une forme hexagonale ; plus haut, elle s’élargit de nouveau, présente douze côtés, et déborde en encorbellement au-dessus des étages inférieurs. De la plate-forme, la vue s’étend sur les plaines de la Somme et de l’Oise. Les souterrains sont aujourd’hui couverts d’arbustes. » L’église renferme le tombeau de Raoul de Lannoy et de sa femme Jeanne de Poix, sculpté par Antonio de Porta, artiste milanais. Les statues des deux époux sont étendues côte à côte et vêtues de longues robes. Les vitraux de l’une des fenêtres de l’abside figurent les portraits de plusieurs seigneurs et dames de Folleville. On remarque, en outre, dans ce petit édifice : la voûte ornementée du chœur ; une verrière moderne ; des médaillons en marbre, représentant des empereurs romains ; les fonts baptismaux, décorés des armes des seigneurs de Folleville, et la chaire dans laquelle saint Vincent de Paul prêcha en 1617.

FOLLEVILLE (Gabriel Guyot de), ecclésiastique français, connu sous le nom d’évêque d’Agra. V. Guyot.

FOLLI (Sébastien), peintre italien, né à Sienne en 1563, mort en 1621. Il reçut les leçons d’Alessandro Casolani, et s’adonna surtout à la peinture à fresque. Bien que ses compositions se ressentent du goût faux et maniéré du temps, elles se recommandent néanmoins par d’excellentes qualités. Elles attestent la vive imagination du peintre, sa science de la perspective et l’élégance de ses ornementations. Parmi les ouvrages de Folli qui se trouvent dans sa ville natale, nous citerons : Saint Michel, à l’église Saint-Dominique ; Madeleine, à Sainte-Marguerite ; l’Annonciation, Sainte Elisabeth, la Naissance du Christ, à la Visitation ; un Christ mort, sur la façade de la casa Mensini ; de remarquables camaïeux à Saint-Sébastien ; Sainte Marthe portée au tombeau, dans l’église de Sainte-Marthe, etc. Citons encore : la Vierge avec le bienheureux Franco, à l’église de Foliano ; la Vierge dite del Manto, à Ancajano ; un Crucifiement, à Pili.

FOLLI ou FUOLI (Cécile), médecin italien, né près de Modène en 1615, mort vers 1660. Il se fit recevoir docteur à Padoue, puis s’établit à Venise, où il professa l’anatomie jusqu’à sa mort. On a de lui des écrits peu volumineux, clairs et concis, dans lesquels on trouve des idées ingénieuses. Tels sont : Sanguinis a dextro in sinistrum cordis ventriculum defluentis facilis reperta via (Venise, 1639, in-4o) ; Discorso anatomico... sopra la generazione e l’uso délia pinguedine (Venise, 1644) ; Nova auris internæ delineatio (1645, in-4o).

FOLLI (François), médecin et agronome italien, né en Toscane en 1624, mort en 1685. Il fut médecin du grand-duc de Toscane, puis se retira à Citerna, où il passa le reste de sa vie. Tout en se livrant à la pratique de son art, Folli s’occupa beaucoup d’agriculture et de physique, et se livra à de nombreuses et ingénieuses expériences pour y introduire des perfectionnements. Ses principaux ouvrages sont : Recreatio physica in gua de sanguinis et omnium viventium universali analogia circulatione disseritur (Florence, 1665, in-8o) ; Dialogo intorno alla cultura della vite (Florence, 1670, in-8o), etc.

FOLLICULAIRE s. m. (fol-li-ku-lè-re — du lat, folliculum, dimin. de folium, feuille). Journaliste sans valeur et sans conviction : Le voilà sans pain ; il devient folliculaire ; il infecte la basse littérature et devient le mépris et l’horreur de la canaille même, et cela s’appelle des auteurs (Volt.) Certains journaux semblent souvent rédigés par des folliculaires.

Mais ne pardonnons pas à ces folliculaires,
De libelles affreux écrivains téméraires,
Qui ne pouvant apprendre un honnête métier,
S’occupent, jour par jour, à salir du papier.
Voltaire.

— Encycl. Ce mot devrait signifier « écrivains de petits journaux, » comme folliculum signifie « petite feuille. » Telle a été le sens de ce mot dès l’origine, mais il a promptement changé. On peut écrire dans de petits journaux, et être un écrivain sérieux ; rédiger un grand journal, et n’être jamais qu’un folliculaire.

Le folliculaire est l’homme qui use de sa plume pour insulter, diffamer et calomnier dans un journal un homme ou un parti. Cette engeance peut se diviser en deux catégories : les folliculaires qui travaillent par passion, et ceux qui travaillent par intérêt.

La première catégorie est la moins nombreuse. Elle se compose des hommes qui, par ambition, ne reculent devant aucun mensonge quand il s’agit de combattre leurs adversaires, et dont on peut dire ce que disait Boileau d’un folliculaire de son temps :

Sur ses pieds vainement tentant de se hausser,
Pour s’élever à moi cherche à me rabaisser.

D’autres ont à assouvir une vengeance particulière ou de secte. C’est ainsi que les folliculaires du parti clérical diffament sans cesse les hommes les plus honorables, s’ils sont libres penseurs, leur attribuent à chaque instant les idées les plus perverses, les plus immorales, les accusent de vouloir mettre la société tout entière à feu et à sang ; c’est ainsi que, sous la Restauration, les folliculaires royalistes prétendaient que les journalistes libéraux étaient complices de l’assassin Louvel ; c’est ainsi que., sous la monarchie de Juillet, les folliculaires orléanistes affirmèrent, après l’attentat de Fieschi, d’Alibaud, etc., la fameuse « complicité morale » de l’opposition ; c’est ainsi que, sous la république de 1848, les folliculaires du « parti de l’ordre » prétendirent que les socialistes commettaient des excès épouvantables, et qu’ils ne rêvaient que massacres et guillotines ; c’est ainsi que, sous le second Empire, les folliculaires officieux ont attaqué le parti démocratique, en le rendant responsable des échecs subis par la politique impériale au Mexique et en répétant que » les fusils des soldats de Juarez étaient bourrés avec les discours des députés de l’opposition ; c’est ainsi qu’après la chute de la Commune, des journaux de scandale se sont faits délateurs et ont donné le coup de pied de l’âne aux vaincus. » C’est ainsi qu’à toutes les époques, les impuissants de la politique et de la littérature, etc., ont dénoncé dans leurs « follicules » leurs adversaires ou leurs rivaux comme ennemis du gouvernement. Déjà la chose se passait ainsi sous Louis XIV, puisque le satirique Boileau nous dit :

Qui méprise Cotin n’estime point son roi,
Et n’a, selon Cotin, ni Dieu, ni foi, ni loi.

Si l’abbé Cotin eût écrit dans une gazette, il eût été un pur folliculaire.

Le journaliste qui, pour une passion quelconque, trahit la vérité et attente à l’honneur de ses semblables est donc un folliculaire. A plus forte raison, ce nom revient-il de droit à l’impudent et cynique condottiere littéraire qui soutient tel ou tel homme, attaque telle ou telle idée moyennant salaire. Malheureusement pour l’honneur de l’humanité, le nombre de ces folliculaires est grand. Aux uns, on promet une place qu’il leur faut conquérir à force de zèle diffamatoire ; aux autres, une médaille ; aux autres, un ruban quelconque. Et, sans aller plus loin, racontons à ce sujet une petite anecdote dont nous garantissons l’authenticité de visu, et dont tout homme un peu répandu dans la littérature aura certainement vu plusieurs fois l’équivalent. Le Français, « né malin, » à ce qu’assure Boileau, est né aussi fort amoureux du clinquant et des distinctions visibles, moins sage en cela que les Indiens, qui se parent avec des morceaux de verroterie, et que les nègres, qui s’ornent d’un anneau au travers du nez. Les chancelleries française et étrangères sont accablées de demandes de décorations ; depuis celle de M. Prudhomme, qui demandait la croix « parce que cela ferait plaisir à son épouse, » jusqu’à celles de X***, un journaliste de notre connaissance, qui quémandait partout un ruban, ne fût-ce que celui de l’Éléphant noir, ou même celui de la Marmelade, inventé par Soulouque. Il rencontra un jour l’agent d’un petit prince barbaresque, en quête de journaux consentant à soutenir un emprunt fantaisiste et un gouvernement rappelant ceux des temps les plus obscurs, un de ces souverains en miniature qui jouent au Mourad ou au Mammoud. L’occasion était belle : le petit Mourad en question avait un ordre qui s’appelait quelque chose comme le Chameau blanc. Offre de services ; acceptation et promesses de grand cordon. Sur ces entrefaites, les journaux racontent que ledit Mourad, un jour de belle humeur, a fait prendre par ses janissaires une trentaine de ses bons sujets, qui refusaient de payer leurs impositions, et leur a fait administrer une correction paternelle, si paternelle que douze d’entre eux, parmi lesquels des vieillards de plus de quatre-vingts ans, sont morts sous le bâton. L’agent est consterné, ne sait que dire, tremble pour son emprunt. Seul, X*** est impassible. Il s’asseoit, retrousse ses manches, prend sa bonne plume de Tolède, et, de sa plus belle écriture, rédige à peu près ce qui suit : « La malveillance s’est plu à dénaturer l’acte de justice et de douceur accompli par le grand Mourad. Ce prince clément, alors qu’il pouvait faire empaler plusieurs centaines de sujets rebelles, s’est contenté de faire administrer quelques coups de baguette à trente d’entre eux, et encore n’a-t-il fait frapper que sur la partie la plus charnue du corps. Si quelques vieillards sont morts, c’est qu’arrivés au terme de la décrépitude, leur heure avait sonné, et qu’ils fussent morts tout de même. » Un peu plus, il aurait ajouté que l’exercice qu’on leur avait fait faire avait prolongé leur vie d’une demi-heure. L’agent émerveillé fit son rapport, et Mourad envoya, par le retour du courrier, la grande-croix du Chameau blanc à l’audacieux folliculaire.

Il serait bien difficile de dénombrer, même, approximativement, les folliculaires d’argent. Depuis Fréron, dont Voltaire disait qu’il calomniait pour une petite somme, jusqu’aux folliculaires modernes, tous bâtis sur le patron de celui dont parle Musset, « jadis séminariste, »

Qui vingt fois dans sa vie, a bon marché vendu,
Sur les honnêtes gens crachait pour un écu,

on rencontre cette misérable industrie dans tous les pays, sous tous les régimes, sous toutes les formes. Le folliculaire est un protée qui se plie aux circonstances, tantôt sérieux, tantôt badin, attaquant ici violemment et sans retenue ; là, voilant ses turpitudes et ses perfidies sous des restrictions hypocrites et odieux ménagements ; ce sont les plus habiles ; ils font d’abord l’éloge de leur victime, puis tempèrent cet éloge par des ménagements, et arrivent, de réticence en réticence, à la noircir à l’instar du dernier scélérat.

C’est là jouer d’adresse et médire avec art,
Et c’est avec respect enfoncer le poignard.

Le folliculaire se glisse dans toutes les parties d’un journal ; on le rencontre à l’article de fond, et on ne l’évite pas aux annonces de la quatrième page.

Le folliculaire politique a pour métier de travestir les opinions de ses adversaires et de diffamer leurs personnes et leurs amis.

Le folliculaire artistique, soudoyé par un artiste envieux, décrie les œuvres les plus méritantes et conteste les gloires les mieux acquises.

Le folliculaire littéraire ridiculise les plus nobles ouvrages en tronquant les phrases qu’il cite, en changeant l’accentuation, en séparant deux idées voisines, et réalise la menace de Laubardemont : « Donnez-moi trois lignes de l’écriture d’un homme, et je le ferai pondre. »

Le folliculaire scientifique contestera à un inventeur la paternité de sa découverte, et l’attribuera à un de ses « protecteurs ; » il enlèvera l’Amérique à Colomb pour la donner à Vespuce.

Arrêtons-nous un peu sur le folliculaire théâtral. De célèbres exemples nous ont appris, en ces derniers temps, quelle était leur influence, et combien grand leur nombre. Ici, leur industrie porte un nom spécial, elle s’appelle le chantage, beau néologisme, en vérité, et bien approprié à la noblesse du sujet. Voici en quoi consiste leur procédé.

Lorsqu’un artiste fait ses débuts sur un théâtre, surtout à Paris, son sort dépend exclusivement des feuilletonistes en renom. Nous disons « surtout à Paris ; » car dans la plupart des villes de province, c’est le public tout entier qui se prononce, à la fin de la troisième représentation du débutant, pour ou contre son admission. Il faut donc, à Paris, que les feuilletonistes se montrent favorables à l’artiste pour qu’il soit reçu. Lorsque le débutant a affaire à des écrivains comme Étienne Arago, Francisque Sarcey et autres, cela va tout seul. S’il tient dignement son emploi, la critique le constate, et il est admis ; dans le cas contraire, il est rejeté, à bon droit, ou du moins, selon la conscience des écrivains. Mais si le feuilleton d’un journal important est occupé par un folliculaire, l’artiste, même et surtout le plus méritant, est obligé de chanter, c’est-à-dire de se rendre chez le critique en question et d’acheter sa sympathie, de lui graisser la patte (employons un vilain mot pour dire une vilaine chose). S’il néglige ce devoir, il est harcelé toutes les semaines dans le feuilleton du folliculaire, jusqu’à ce qu’il vienne à résipiscence. Prenons, entre cent autres, l’anecdote suivante, qui est authentique et récente.

Une jeune et intelligente artiste débute sur un de nos grands théâtres ; elle est accueillie par des applaudissements, et tous les criti-