Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 8, part. 2, Fj-Fris.djvu/176

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change en même temps. L’accélération varie en raison inverse de la masse. Il en résulte que la force est proportionnelle à la masse du corps auquel elle est appliquée et à l’accélération du mouvement qu’elle lui imprime. Sa mesure est le produit des mesures de la masse et de l’accélération :

.

Dans l’industrie, on distingue les forces en forces mouvantes et forces résistantes. Les premières sont celles dont on dispose ou que l’on crée ; Ses autres sont celles qu’on veut vaincre. Les premières entraînent leurs points d’application dans le sens dans lequel elles agissent ; les autres voient fuir leurs points d’application devant elles. Les premières ont leurs travaux positifs, tandis que les autres les ont négatifs ; de là les dénominations de travail moteur et de travail résistant.

On nomme forces instantanées les forces, telles que celles qui naissent des chocs, qui ne s’exercent que pendant un temps assez court pour pouvoir être négligé. Les autres forces sont dites continues.

On décompose souvent la force qui agit sur un point en ses deux composantes, tangentielle et normale. La première a, pour expression le produit de la masse par la dérivée de la vitesse, par rapport au temps, ; la seconde est le produit de la masse par le quotient du carré de la vitesse, par le rayon de courbure de la trajectoire, ; c’est la force centripète. La force centrifuge est l’opposée de la force centripète.

On attribue souvent une force aux corps en mouvement. Ainsi, l’on dira qu’un corps en a choqué un autre avec force, qu’on a communiqué une grande force a un corps, etc. Ces expressions traduisent inexactement des faits vrais.

Ce que l'on entend par force d’un corps en mouvement est ce que, dans la langage de la science, on appelle quantité de mouvement ; c’est la force emmagasinée, en tenant compte du temps ; c’est l’intégrale des impulsions élémentaires de la force pendant tout le temps qu’elle a agi. Les quantités de mouvement se transmettent de proche en proche, par le contact, dans tout l’univers.

Force vive. On entend par force vive d’un corps le produit de sa masse par le carré de sa vitesse. C’est quelquefois la force vive que l’on, entend désigner, vaguement il est vrai, dans le langage ordinaire, quand on parle de la force d’un corps en mouvement. La force vive est du travail ; elle se transforme en travail utile ou se perd en écrasements, ébranlements, vibrations inutiles, etc. Soient F la résultante des forces qui agissent sur un point matériel, M la masse de ce point, a l’angle que fait la direction de la force avec la trajectoire du point matériel au point où il se trouve ; enfin v, la vitesse déjà acquise, et t, le temps compté à partir d’une origine quelconque. On sait que l’expression, de la force tangentielle F cos a est



Si l’on multiplie les deux membres de cette équation par vdt ou par son égal ds, s désignant le chemin parcouru par le mobile sur sa trajectoire, il vient

;

or F cos a ds est le travail élémentaire de la force (v. travail) ; d’un autre côté, mvdv est la différentielle de , c’est-à-dire de la demi-force vive du point matériel. L’équation signifie donc que, pour chaque élément du temps, le demi-accroissement de la force vive d’un point matériel est égal au travail élémentaire, de la force. Si on intègre l’équation entre des limites quelconques, on en tire ce théorème que l’accroissement de force vive d’un point matériel, entre deux époques quelconques, est le double du travail total de la résultante des forces qui ont agi sur ce point pendant le temps considéré



Un système matériel quelconque peut toujours être ramené a un système de points matériels indépendants les uns des autres, à la condition qu’on joigne aux forces extérieures données les forces intérieures qui naissent des liaisons des parties de ce système entre elles. Si F désigne la résultante des forces, tant intérieures qu’extérieures, qui agissent sur l’une des molécules du système, on a donc, pour chacune de ces molécules,



et, en faisant la somme des équations dû ce genre, dans toute l’étendue du système,



Ce qui veut dire que l’accroissement de force vive d’un système matériel quelconque, pendant un temps quelconque, est le double du, travail total de l’ensemble des forces, tant inférieures qu’extérieures, qui ont agi sur le système pendant le temps considéré. Les forces extérieures sont les forces mouvantes et les forces résistantes. Le travail des premières est le travail moteur, que l’on dépense}; le travail des secondes est le travail résistant, que l’on se proposait d’effectuer ; c’est le travail utile.

Quant aux forces intérieures, elles sont aussi de deux sortes : la première comprend les actions mutuelles des parties solides en contact, actions qui se décomposent elles-mêmes en forces normales, dont le travail est en somme nul, et forces tangentielles ou forces de frottement, dont le travail nuisible est, au contraire, généralement considérable ; la seconde sorte comprend les forces moléculaires qui naissent de la compression, de la tension, de la flexion ou de la torsion que les différentes pièces solides peuvent subir ensemble ou séparément. Les travaux de ces forces moléculaires donneraient une somme nulle, lorsque toutes les pièces seraient revenues à leur état primitif, si la matière qui les compose était parfaitement élastique, ce qui n’est admissible que pour les parties les plus solides et les mieux travaillées. Les forces moléculaires donnent toujours lieu à un travail nuisible, qui se consomme en usure des pièces, en échauffements, en extensions permanentes des courroies, en flexions durables des ressorts, en vibrations transmises au sol, etc.

En résumé, si l’on désigne par le travail des forces mouvantes, par le travail utile des forces résistantes, par le travail des forces de frottement et par celui des forces qui n’agissent que pour détériorer les appareils,



On voit par là que lorsqu’une machine industrielle est revenu au repos, après avoir fonctionné plus ou moins longtemps, étant nul,

;

ou .

Ainsi, le travail résistant utile que l’on recueille, , est toujours moindre que le travail moteur, , que l’on dépense. Il y a transformation avantageuse à certains égards, mais accompagnée toujours d’une perte sensible.

Nous venons de considérer le théorème des forces vives au point de vue industriel ou de la mécanique pratique ; ce théorème joue aussi un grand rôle dans la mécanique rationnelle, principalement dans les théories astronomiques.

Supposons d’abord qu’il ne s’agisse que d’un point matériel. Soient m la masse de ce point, x, y, z ses coordonnées rectangulaires, X, Y, Z les composantes de la résultante des forces qui y sont appliquées : on sait que le travail de la résultante de plusieurs forces appliquées en un même point est égal à la somme des travaux des composantes ; d’un autre côté, , et représentent évidemment les travaux élémentaires des composantes X, Y et Z de la force appliquée au point x, y, z ; l’équation du travail ou des forces vives, relative à ce point, est donc

.

Si les expressions connues des forces données X, Y, Z sont telles que se trouve être la différentielle exacte d’une fonction ce qui exige que X, Y et Z ne dépendent que de x, y, et z, et que, d’ailleurs, ces fonctions satisfassent aux identités

 et ,

l'équation différentielle



pourrait s'intégrer et donnera

,

se rapportant à l’époque t = 0, tandis que v, x, y, z se rapporteraient au temps t.

Cette équation ne sera plus que du premier ordre ; on aura donc une des premières intégrales des équations du problème.

Or, la plupart des questions physiques comportent cette première réduction des difficultés analytiques, parce que les forces agissantes sont dirigées vers des points fixes et ne dépendent, quant à leur intensité, que des distances du mobile à ces points fixes.

Dans un pareil cas, en effet, si r désigne la distance du mobile à l’un des centres d’action, et que représente l’action, soit attractive, soit répulsive, du point influençant sur le point mobile, le travail élémentaire de cotte force est

. C’est la différentielle de f(r).

Que l’on imagine donc dans l’espace un mobile de masse m soumis à la fois aux actions attractives ou répulsives des points fixes, dont il soit, à l’époque t, éloigné de distances ,… ; si ,etc., sont les fonctions des distances ,…, qui représentent les actions respectives des points fixes sur le mobile, l'équation du travail donnera pour ce mobile

….;

d’où, en intégrant,

Le théorème s’étend sans difficultés au cas d’une force de direction constante dont l’énergie ne dépendrait que de la distance du mobile à un plan fixe. La pesanteur rentre dans ce cas.

Soient, en second lieu, ,…, les masses de divers points matériels, X, Y, Z, ,…, les composantes parallèlement aux axes des résultantes des forces, tant extérieures qu’intérieures qui y sont appliquées, on aura, d’après ce qui précède ;

;

or sera encore la différentielle exacte d’une fonction des coordonnées de tous les points du système, si les forces agissantes ne sont que des attractions ou des répulsions dirigées vers des points fixes et dépendant seulement des distances des points influencés à ces points fixes, ou des actions mutuelles des différents points du système, pourvu encore que ces actions ne dépendent que des distances des points agissant les uns sur les autres. La première partie de la proposition n’exige aucune explication nouvelle ; quant à la seconde, si et sont les masses de deux points qui s’influencent mutuellement, que r soit la distance qui les sépare, la formule de la force qui naît de leur voisinage et qui ne peut être appliquée que dans la direction de la droite qui les joint,



représentera encore, dans ce cas, la somme algébrique des travaux des deux forces, action et réaction qui s’exercent sur les deux points. Cette expression sera encore une différentielle exacte.

Lorsqu’il ne s’agit que d’un point, le théorème reçoit une expression extrêmement remarquable de ce fait que l’équation



attribue une valeur constante à la vitesse v du point matériel dès que reprend la même valeur, c’est-à-dire en tous les points de la trajectoire du mobile où elle est coupée par une même surface

.

Les surfaces que représente l’équation

.

portent le nom de surfaces de niveau. Le théorème donne la vitesse du mobile dès que l’on sait sur quelle surface de niveau il se trouve, et sans qu’il soit nécessaire de connaître le chemin par lequel il y est arrivé.

Lorsque la force agissante est simplement la pesanteur, son travail élémentaire est mgdz, m, g et z désignant respectivement  : m, la masse du point matériel, g, l’accélération des graves, et z la distance du mobile à un plan horizontal fixe, mgdz est la différentielle de mgz, en sorte que l’équation du travail est alors

;

les surfaces de niveau sont alors des plans horizontaux. Il résulte du théorème que si un point matériel soumis seulement à l’action directe de la pesanteur, mais assujetti à rester sur une courbe fixe ou sur une surface fixe, glisse sans frottement sur l’obstacle, comme le travail de la réaction normale est nul, la force vive du point matériel ne dépend que de la hauteur à laquelle il se trouve. Chaque fois qu’il repasse dans le même plan horizontal, il reprend la même vitesse.

Force d’une machine. La valeur industrielle d’un moteur ne dépend pas seulement de l’effort qu’il peut exercer, mais aussi de la persistance avec laquelle cet effort peut être continué. Le moindre choc produit une pression énorme, si on la compare à une force continue ; mais la courte durée de ce choc réduit presque à rien le travail qu’on pourrait en recueillir. Le mot force, appliqué a une machine, n’implique effectivement que d’une manière indirecte l’idée de tension ou de pression.

D’un autre côté, tout moteur quelconque est capable de produire un travail indéfini dans un temps suffisamment long ; on ne dirait donc rien de précis en donnant en kilogrammètres le travail qu’une machine pourrait transmettre à l’aide du moteur qui y est appliqué. Pour exprimer d’une manière complète la valeur industrielle d’une machine, moteur compris, il faut donner le travail qu’elle peut transmettre dans un temps connu. La force d’une machine est le nombre d’unités de travail ou de kilogrammètres qu’elle peut fournir par seconde. L’unité de force de machine est le cheval-vapeur : c’est la force d’une machine qui rend par seconde un travail de 75 kilogrammètres. Ainsi, quand on dit d’une machine qu’elle a la force de 100 chevaux, cela signifie qu’employée, par exemple, à puiser l’eau d’une rivière, elle pourrait, par chaque seconde, élever à un mètre de hauteur 7 500 litres d’eau. Elle fournirait par jour



ou 43,200,000 litres d’eau élevés à 5 mètres de hauteur.

La force d’une machine dépend principalement du moteur ; mais le travail de ce moteur se trouve toujours réduit dans une proportion plus ou moins considérable, soit parce qu’il n’est pas transmis en totalité à la machine, soit parce que la complication du mécanisme en absorbe une partie. Le calcul des résistances passives étant toujours, par sa nature même, très-incertain, il en résulte que la force d’une machine peut être rarement prévue théoriquement avec une approximation suffisante. Toutefois, comme on peut toujours obtenir des données exactes sur les machines analogues à celles qu’on veut construire, en les essayant au frein, les constructeurs peuvent combiner les modifications à faire subir aux machines déjà établies pour obtenir à peu près les effets qu’ils désirent.

La force d’une machine n’est pas un nombre absolu de chevaux-vapeur. On peut, en effet, changer le travail transmis par l’intermédiaire de cette machine en changeant l’effort exercé par le moteur. Ainsi, par exemple, une même machine a vapeur rendra plus de travail si on lui donne plus de charbon ou de meilleur, et, par conséquent, plus d’eau. Mais toutes les machines sont toujours établies pour marcher sous un régime normal dont on ne s’écarte guère dans la pratique. L’évaluation de la force d’une machine, d’une manière abstraite, en chevaux-vapeur, suppose cet état normal.

Composition des forces. V. résultante.

— Astron. Forces centrales ou Force centrifuge et Force centripète. Les lois de ces forces, découvertes par Huyghens, sont indiquées au mot attraction, t. Ier du Grand Dictionnaire.

— Jurispr. Force publique. On appelle ainsi « la réunion des forces individuelles organisées par la constitution pour maintenir les droits de tous et assurer l’exécution de la volonté générale. » Ainsi s’exprime la loi du 15 juin 1791, et cette définition est applicable dans tout gouvernement constitutionnel. La force publique est destinée : 1° à défendre l’État contre les ennemis du dehors ; 2° à assurer au dedans le maintien de l’ordre et l’exécution des lois. Elle est divisée en trois parties, ayant chacune son usage, son organisation et son mode de service particuliers. Ce sont : 1° l’armée ; 2° la gendarmerie ; 3° la garde nationale. L’armée est particulièrement destinée à agir contre les ennemis du dehors ; la gendarmerie et la garde nationale à réprimer les désordres intérieurs. Mais cette destination n’est point exclusive ; en cas de rébellion sérieuse, ce sont même les troupes qu’on emploie toujours. La force publique, instrument de la loi, est essentiellement obéissante, et, lorsque l’ordre donné est régulier, elle doit l’exécuter passivement.

Indépendamment de ces corps armés, le caractère d’agent de la force publique s’attache encore à divers autres fonctionnaires, tels que les gardes champêtres, les gardes forestiers, lorsqu’ils exercent la surveillance qui leur est confiée, les agents de police, lorsqu’ils arrêtent, en vertu d’un mandat spécial dont ils sont pourvus, un individu prévenu ou condamné.

D’après la constitution en vigueur jusqu’au 4 septembre 1870, l’autorité qui pouvait mettre en mouvement la force publique résidait dans la personne du chef de l’État. C’était lui seul qui commandait les armées de terre et de mer, lui seul qui déclarait la guerre et aussi l’état de siège. Cette autorité a passé maintenant à l’Assemblée nationale.

Dans certains cas exceptionnels, par exemple en cas de flagrant délit, lorsqu’il s’agit de crimes, les agents de la force publique peuvent agir spontanément et arrêter de leur chef un individu ; mais, dans les cas ordinaires, ils ne peuvent agir que sur les réquisitions des magistrats, fonctionnaires ou officiers dépositaires de l’autorité publique. Tous les officiers de police judiciaire, le juge d’instruction et le procureur de la République, ont le droit de requérir la force publique. Le porteur du mandat d’amener peut aussi la requérir, s’il rencontre de la résistance, et celle-ci est tenue d’obéir. Elle doit aussi obéir à la réquisition des huissiers pour l’exécution des jugements. Mais, qu’on le remarque bien, dans ces deux cas, elle n’obéit, en réalité, qu’aux autorités publiques qui ont lancé le mandat ou prononcé le jugement.

Les agents de la force publique doivent être respectés comme le pouvoir au nom duquel ils agissent. La loi les a couverts d’une protection spéciale et frappe de peines sévères ; tout délit commis à leur égard. La loi protège encore les agents de la force publique contre les outrages et les injures, lesquels sont l’objet d’une répression plus ou moins rigoureuse, suivant les circonstances. La peine est plus forte lorsque l’offense s’adresse, non à un simple agent, mais à un commandant de la force publique. Ce n’est pas le grade de l’agent qu’il faut considérer ici ; mais le point de savoir s’il exerçait ou non un commandement. Mais si la loi protège d’une façon spéciale